Je serais morte demain

Chapitre 4

La même heure que le premier jour.
Je sens mes cheveux glisser le long de mon visage, offert au vide, toujours.
Mes mains gelées tiennent en tremblant le portable.
Je l'appelle, elle répond tout de suite.
- y a des étoiles chez toi ?
Cette fois aussi je ris.
- pas ce soir
Le silence s'installe. Je demande
- Elle était bien ta journée ?
Anna reste un instant silencieuse.
- Je sais pas, j'avais envie d'être nulle part ...
oh je comprend, je ne sais pas quoi répondre.
Qu'a t elle besoin d'entendre ?
- J'avais envie d'être sur ce pont, moi. De t'appeler.
je sens sons sourire
elle prend la parole
- tu sais, j'ai des amies. je pourrais être heureuse, mais ça me suffit plus. et puis, je leurs fais du mal.
Je regarde le sol, si loin, si loin.
- Tu sais, je crois que parfois, les quitter leurs feras plus de mal.
Elle ne répond pas.
Le vent agresse mon visage, je me sens bien.
-C'est quoi ton plus beau souvenir ?
J'aime cette question, la chose la plus marquante d'un passé aide à définir une personne.
- Quand j'étais petite, chaque été je cueillais les pâquerettes, c'était beau. Et toi ?
Le souvenir d'Anna est pleins de couleurs.
- C'était lorsque j'inventais des histoires.
J'attrape un briquet et une cigarette.
- Dis Evy, tu peux m'en raconter une d'histoire ?
La chaleur m'envahit, le goût réconfortant vient piquer ma langue et mes muscles se relâchent.
Je souffle.
- Quelle sorte d'histoire ?
- Une qui finit bien.
- Aucune ne finit bien.
Anna soupire a l'autre bout, loin ou proche, dans un endroit que je ne connais pas.
- Une qui finit presque bien.
J'inspire une bouffée, expire.
- C'est l'histoire d'une fille qui cherchait l'amour.
Anna reste silencieuse.
- Un bel amour, avec un grand A. Celui qui ne finit pas.
J'écrase la cigarette sur le sol et met le mégot dans ma poche.
- Ça faisait mal, alors elle a choisit de se réparer. Et alors elle a cessé de chercher. Un jour l'amour l'as trouvée.
J'entends Anna renifler.
- C'est beau. C'est triste. Elle a eu ce qu'elle voulait quand elle ne le voulait plus.
- Tu pleures ?
- oui
J'hésite.
- J'aimerais m'assoir et te tenir dans mes bras. T'inventer d'autres histoires, Anna.
- Mais tu ne m'aimes pas.
- Non. Et toi ?
- C'est quand qu'on se voit ?