C'était un jour de tempête, le ciel grondait et les nuages grisâtres ne laissaient passer aucun des rayons du soleil, ce qui rendait les rues très sombres. Ce jour-là, presque toutes les voies routières, les villes et villages environnant étaient inondés. Le son des gouttes d'eau crépitant sur les toits des maisons était tellement fort et récurrent qu'il devenait impossible de ne pas l'entendre.
Quant à lui, il courait, il courait aussi vite que ses jambes le lui permettaient, il courait manquant de trébucher à plusieurs reprises. Mais là n'était pas ce qui le préoccupait le plus à cet instant précis. En effet, malgré le fait qu'il soit trempé jusqu'aux os et que ses muscles soient endoloris, la joie intense et l'excitation qu'il ressentait le maintenaient déterminé tout en lui faisant oublier sa souffrance. Ce seize mars 1966 fut sans aucun doute, un des plus beaux jours de la vie d'Edward. Cette sensation, il ne l'avait pas ressenti depuis son mariage.
Il était aux alentours de dix-huit heures trente à l'instant où celui-ci apprit la nouvelle par l'intermédiaire d'une de ses domestiques, étant venue le chercher. Bouche bée, il n'en croyait pas ses oreilles. Il n'avait pas de temps à perdre, la boutique où celui-ci se trouvait était à pas moins de vingt minutes de son domicile, et ce dont il avait été informé pouvait se produire à tout moment. Ce dernier reposa illico-presto les articles qu'il avait en main et monta dans sa calèche avec la jeune femme, où le cocher les attendait. Edward lui demanda ensuite de les ramener au plus vite chez lui, ce à quoi le cocher répondit avec un hochement de tête.
Après avoir quitté le centre-ville de Londres, ils décidèrent de raccourcir le chemin en passant par une petite forêt qui, normalement, débouche juste devant le manoir des De Godwin. Bien que le chemin choisi était boueux et sombre, c'était le meilleur moyen pour arriver le plus vite possible à destination. Ceux-ci ne pouvaient pas se permettre d'être en retard pour une telle occasion. Elizabeth, assise aux côtés de son maître, voyait sur son visage l'euphorie de celui-ci se transformer en anxiété. Elle-même, ayant enfanté l'année précédente, pouvait comprendre ce qu'il ressentait. Elle lui lança donc un regard complice, qui fut ignoré par l'homme. De là où elle était, elle pouvait déceler de petites gouttes de sueur couler le long de son visage, à partir de cet instant elle décida de le laisser tranquille. Certes, celle-ci souhaitait l'aider, mais, trop effrayée à l'idée de dire quelque chose de mal, préféra se taire.
Le vent soufflait et la pluie commença à tomber de plus en plus fort, ce qui ne rassura pas le jeune homme. Son inquiétude s'accentuait au fur et à mesure qu'il se rapprochait de sa demeure. Des pensées parasites envahissaient son esprit, le déconnectant totalement de la réalité. Ses mains se mirent à trembler et son cœur battait fort dans sa poitrine.
Il reprit d'un coup ses esprits quand il sentit le véhicule s'arrêter brusquement en plein milieu des bois. Ils n'avançaient plus. Alexander -le cocher-, descendit puis montra à M. De Godwin le tronc d'arbre leur bouchant le passage.
Ils se tenaient là, tout trois réfléchissant à une solution n'impliquant pas le fait de faire demi-tour. « Cela prendrait trop de temps », se disaient-ils. Ces derniers se devaient d'agir vite, autrement, Edward manquerait la naissance de son enfant. Il ne restait plus beaucoup de chemin à faire, donc, sur un coup de tête, le jeune père se mit à essayer d'enjamber l'imposant obstacle se trouvant devant lui, à la grande surprise des deux autres. Une fois parvenu à le traverser, il se mit à courir.
Il courait, il courait aussi vite que ses jambes le lui permettaient, il courait manquant de trébucher à plusieurs reprises. Il était, certes, gelé et trempé à cause de la pluie, toutefois, il ne s'en souciait guère. Ce qui lui importait à ce moment précis était d'arriver chez lui le plus rapidement possible
Au fur et à mesure de sa course, toutes ses émotions négatives commençaient à s'envoler jusqu'à pratiquement disparaître. Si tout se passait bien, il allait être père et voir un sourire sur le visage de sa femme, le bonheur de celle-ci était sa priorité.
Edward ne s'arrêtait pas, toutes ces ondes positives lui donnaient la force de continuer. Cela faisait déjà cinq minutes qu'il courait. Il sortit donc de cette forêt et put enfin apercevoir la lumière de son domicile. Il ne ralentit pas, au contraire. Il devenait de plus en plus laborieux de mettre un pied devant l'autre sans manquer une chute, ce qui devait arriver arriva donc. Il se vautra sur l'herbe, tel un enfant étourdi.
En plus d'être mouillés, ses vêtements étaient désormais crasseux. Ce dernier n'était pas présentable et avait maintenant du mal à marcher. Cependant, le jeune homme devait tenir bon, plus que quelques pas le séparaient de sa demeure.
Il était boiteux et frissonnant lorsqu'il parvint à la porte du manoir, il ne prit pas la peine de s'essuyer, laissant derrière lui une traînée d'eau de pluie boueuse, ce qui n'amusa pas du tout les femmes de chambre. Les escaliers furent un enfer à monter, son cœur palpitait, la douleur devenait insupportable, mais malgré ça, il y parvint. Néanmoins, toutes ses souffrances cessèrent dès que celui-ci franchit la porte de sa chambre à coucher, pour y voir sa femme tenir dans ses bras ce qui parut lui être le plus beau bébé du monde.
Son fils.
Andrew De Godwin, selon lui un futur grand homme.
Cependant, il se trompait lourdement...
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De Godwin's Reward
Ficção AdolescenteLa famille De Godwin, N'importe quelle dame mondaine entendant ce nom vous parlerait sans doute des désastres dont ils étaient l'auteur, durant des heures et des heures: "Oh! ce sont des gens malhonnêtes... Ma fille était souffrante, mon mari et moi...