Chapitre 33

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Je n'avais que très peu fermé l'œil de la nuit, me remémorant chaque image de la journée d'hier. Cela ne m'était jamais arrivé. Ni avec des coups d'un soir, ni avec Liam. Jamais un rapprochement physique ne m'avait fait rappelé mes cauchemars. Je ne savais même pas comment ou pourquoi ils avaient surgi alors que tout se passait bien. Harry avait organisé ce pique-nique pour qu'on passe du temps ensemble. Il avait préparé à manger, et de mon côté, j'avais gâché ce moment.

Bien sûr, après nous avons un peu parlé, un peu enlacé avant que le soleil ne décline complètement et qu'on ne vissions plus rien. Le retour s'était même fait dans la légèreté. Harry avait allumé l'auto-radio. A chaque nouvelle musique, on essayait de nommer le titre et l'artiste en premier. On râlait pendant les pubs et il m'a déposé en bas de chez moi. Il voulait me ramener devant ma porte mais je lui ai répondu que j'avais envie de rester un peu sur la plage avant de rentrer. Il n'a pas insisté, je lui en étais reconnaissant. J'avais besoin d'être un peu seul face à ma confidente et à ces trois étoiles.

Et ce matin, je n'allais pas franchement mieux. J'avais toujours les yeux humides et l'esprit dans le brouillard. Je me sentais honteux par rapport à hier. Je ne voulais pas offrir à Harry seulement cette partie détruite de moi-même, cette partie que j'essayais de cacher pour ne pas attirer la pitié. Et pourtant, j'avais l'impression qu'en compagnie de Harry, elle ressortait de plus en plus. Et que je l'acceptais de plus en plus.

Je pris une longue inspiration avant de l'expirer. J'attrapais ma guitare pour gratter nonchalamment les cordes, sans envie, sans inspiration. Cela faisait quelques semaines que je travaillais sur plusieurs musiques, dans le projet d'en faire quelque chose. Je ne savais pas encore quoi, peut être un album, peut être les publier sur Internet. Je voulais simplement vivre de ma passion, ou du moins qu'elle m'aiderait à gagner un peu plus pour me permettre davantage de libertés dans ma vie.

Je posais ma guitare sur mon lit et me levais, me postant à ma fenêtre. J'écartais le rideau. Un jeune pêcheur passait au même moment dans la rue calme. Le ciel avait une petite mine aujourd'hui. Pas de pluie en vue, mais beaucoup de vent. La mer allait être déchaînée aujourd'hui, et offrirait un merveilleux paysage aux photographes.

Mon ventre commença à gargouiller et je m'imaginais descendre en bas du village pour acheter une viennoiserie à la boulangerie d'Elena. D'ailleurs, elle m'avait confié qu'aujourd'hui elle allait acheter quelques meubles et décorations pour sa boutique. Je lui avais proposé mon aide, mais elle a refusé en me répétant que j'en avais déjà fait beaucoup pour elle. Elle m'a cloué le bec en ajoutant que Marius serait là pour l'aider, en rougissant.

Enfin, je sortis des biscottes et de la confiture de mon frigo et je repensais à Harry. Devais-je m'excuser ? J'avais l'impression de le faire beaucoup en ce moment. Devais-je attendre ou le contacter ? Je ne savais que faire, mon crâne allait d'ailleurs exploser si je continuais ainsi.

J'attrapais mon téléphone tout en tapotant sur la table. Je réfléchissais, je paniquais alors je le reposais.

Je voulais le contacter, mais j'étais terrifié que cela se reproduise. Je ne voulais pas l'effrayer avec mes cauchemars. Honnêtement, je ne savais plus ce que je voulais en ce moment.

Je me postais devant ma porte fenêtre donnant sur mon petit jardin et observais le ciel, en quête de réponses. Les nuages défilaient rapidement. Le vent emportait les feuilles mortes et les faisait tournoyer. Je souriais, nostalgique, cela me rappelait la fois où Harry m'avait aidé à nettoyer mon jardin. Ou la journée barbecue où j'avais réuni les personnes les plus importantes de ma vie, et que Harry avait débarqué alors que je croyais qu'il ne viendrait pas.

Je ne voulais pas perdre Harry. Je ne voulais pas que ce monstre me vole ma chance d'avancer et d'être heureux à nouveau.

Le chemin n'allait pas être simple, je le savais, mais je voulais quand même l'emprunter. Je voulais guérir, car je savais maintenant que cela ne signifiait pas les oublier. Ils seraient toujours là, dans le ciel, dans mes musiques, dans mon cœur. Ils veilleraient sur moi. Mais je voulais avancer, et je voulais que Harry m'accompagne durant ce trajet, peu importe sa durée.

L'inconnu aux deux visagesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant