Bel inconnu.

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Elle marche dans la rue principale de la ville. A sa grande surprise, elle n'est pas bondée du tout, ce qui rend son trajet très agréable. Après trois minutes, elle arrive dans son endroit préféré du quartier : une librairie-café.

- Bonjour Marc ! Elle lance enjouée.
- Bonjour Louise ! Comme d'habitude ?
- Comme d'habitude.

Elle s'installe à sa table favorite, celle dans le coin de la pièce non loin de la fenêtre. Ce qu'elle aime chez cette table c'est qu'elle est à moitié cachée par une énorme poutre en briques rouges, elle est plus intime, plus discrète. Elle enlève son manteau en cuir noir et le pose sur le siège à côté d'elle. Louise fait de même avec son sac à main après en avoir sorti de son intérieur un livre de poche.

Un instant après, Marc lui dépose ce qu'elle commande à chaque fois qu'elle vient ici, c'est-à-dire deux fois par semaine, un café bien serré. Quand il fait trop chaud pour boire ce genre de breuvage, elle lui demande de lui mettre exactement 2 glaçons dedans. Que voulez-vous ? Chacun ses habitudes.
Elle le remercie en souriant.

Sans plus attendre, elle ouvre son livre et se laisse guider par les pages. L'avantage de la poésie, c'est qu'on peut ne pas commencer par le début. Elle lit avec attention et admiration les poèmes magnifiques mais parfois mélancoliques, voire même dramatiques de Charles Baudelaire.

Elle est concentré sur une strophe, quand elle entend :

- "Il me semble parfois que mon sang coule à flots, Ainsi qu'une fontaine aux rythmiques sanglots, Je l'entends bien qui coule avec un long murmure, Mais je me tâte en vain pour trouver la blessure."

Louise lève la tête et fait face à un homme qui à l'air d'avoir un peu plus d'une trentaine d'années. Il a les yeux bleus, ses cheveux en bataille sont de la couleur d'un champ de blé. Sa barbe parfaitement taillée, son blazer ouvert sur une chemise dont les deux premiers boutons ne sont pas noués et ses lunettes rondes lui donnent l'air d'être sorti tout droit des années 70.
On est dans une comédie romantique ou quoi ? Bon, il faut dire qu'il est incroyablement sexy. Elle rentre alors dans son jeu en lui répondant :

- "A travers la cité, comme dans un champ clos, Il s'en va, transformant les pavés en îlots, Désaltérant la soif de chaque créature, Et partout colorant en rouge la nature."

L'homme lui sourit et se présente :

- Bonjour, Dan. Puis-je me joindre à vous ?
- Enchantée Dan, Louise. Avec plaisir, c'est la première fois que je rencontre quelqu'un connaissant un Baudelaire par cœur.
- Il en est de même pour moi. C'est rare de croiser quelqu'un qui lit ce genre de choses pour le plaisir de nos jours, il rétorque.
- Ne m'en parlez pas. Quel est vôtre préféré ? Elle demande en fermant son recueil, commençant sincèrement à apprécier cette conversation.
- "Je n'ai plus que les os" de Ronsard. La façon dont il relate de son propre déclin ainsi que de la fatalité d'une mort certaine pour tous est particulièrement touchante.
- J'admets qu'il est intéressant, elle déclare en acquiesçant. On devine un côté solennel quant aux adieux qu'il exprime, il savait que c'était inévitable et il savait qu'on allait se souvenir de lui.
- Vous m'intriguez Louise. Laissez-moi vous inviter à dîner, il lance.
- Vous êtes direct !
- Cela vous déplaît-il ?
- Non, elle admet en rougissant légèrement.
- Ce soir, 19h30 sur la place principale ? Il demande.
- Avec plaisir.

Il la gratifie d'un sourire éclatant. Avant de s'en aller, Dan lui laisse son numéro. Louise quant à elle, reste assise, les yeux rivés sur le bout de papier qu'il vient de lui donner. C'est la première fois de sa vie qu'elle cède aussi vite envers un homme, tout en ne sachant rien de lui qui plus est ! Son charme et son amour de la poésie l'ont fait craquer.

Louise et Dan.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant