Chapitre 2

311 13 2
                                    

Chaque jour, c'est la même routine. Je me prépare à sept heures du matin pour aller travailler, ça fait quatre ans que je suis dans la même entreprise, Stanley rénovation, avec les mêmes collègues, et leurs discussions tournent souvent autour du même sujet.

Les ragots de coucherie et d'infidélité.

Les études d'esquisse que j'ai faites pour un gros client, M. Bernard, sont posées sur mon bureau en plus de quelques dossiers empilés juste à côté.
Cela arrive que mes clients refusent mes premières propositions. À notre dernière réunion, l'aménagement de la cuisine n'était pas à son goût.

J'ai un autre rendez-vous dans mon bureau avec lui cet après-midi. Bien que j'acquiesçais à tout ce qu'il disait, et modifiait selon ces demandes. Il avait toujours quelque chose à redire ou à corriger pendant nos précédents rendez-vous. Il doit sûrement avoir des idées qui fusent avant que le projet ne soit définitif, et que l'on passe ainsi à un renouvellement global de l'intérieur, il ne voudrait sûrement pas regretter les décisions qu'il a prises.

D'un autre côté, je le comprends. Il n'y a rien de pire que d'avoir changé quelque chose qu'on n'aimait pas pour se rendre compte que ce n'est pas mieux après.
Mais malheureusement nous ne sommes jamais totalement sûrs des décisions que l'on prend surtout quand il s'agit d'un grand changement comme celui-ci, qui nécessite du temps, de la patience et de la minutie.

Nous ne pouvons jamais prévoir notre déception.

- Tiens, regarde. Je n'arrive pas à le croire, dit Sandra qui est rentrée dans mon bureau sans frapper, pour me parler d'un article vu dans le magazine qui semblait assez important à ses yeux pour en oublier ses manières.

Je le lui prends des mains et commence à le lire à haute voix.

- La famille bloom s'installe dans la région, et pour ainsi fêter l'emménagement, organise une crémaillère où ils inviterons les personnes les plus influentes de la région dans leur nouveau château qu'ils viennent d'acquérir il y a peu.
- C'est limite s'il ne dévoile pas leur adresse.

- Ne t'inquiète pas, ils sont protégés, assuré-je à la limite de soupirer.

Sandra pose ses yeux sur moi, d'un air un peu interrogateur.

- En tout cas, reprit-elle après une pause, un peu de mouvement à Grilly, va peut-être apporter un vent de nouveautés que j'avais tant espéré. J'en avais marre qu'il ne se passe absolument rien. Les ragots au travail à ses limites, et puis c'est tellement prévisible que j'ai commencé à parier avec mon acolyte sur la durée du flirt entre les différents collègues du bureau et quand ils vont enfin craquer pour se mettre au lit, ajoute-elle avec un rire gras à la fin.

- Je suis sûr que c'est avec Stephan, n'est-ce pas ?

- Et comment, Camille. J'ai gagné deux semaines de suite, à croire que je suis douée pour voir les désirs secrets des autres.

- Et Stephan te doit combien ?

- Au total vingt euros.

- S'il continue de perdre, je ne pense pas qu'il voudra continuer de jouer avec toi.
- J'en fais mon affaire, me rassure-t-elle avec un petit sourire.

Le téléphone à l'accueil sonne. Elle part de la même façon qu'elle est entrée dans mon bureau. Laissant son magazine derrière elle.
Sandra est de nature étourdie tellement que s'en était presque mignon. Ses cheveux toujours en chignon se retrouvaient vite en bataille à la fin de la journée. Elle faisait les choses à sa manière, sans se soucier du reste.

Mes yeux se sont presque immédiatement scotchés sur ce bout de papier qui venait d'annoncer une nouvelle, dont je ne devais pas me réjouir.

Il y a quelques années, quand j'ai décidé d'emménager à Grilly dans cette petite ville située dans l'Ain. Je m'attendais à y vivre calmement sans agitation, la monotonie de cette ville m'a comme je dirais endormi, mais c'était ce que j'étais venue chercher après avoir vécu dans une grande ville comme Paris, saturé de voitures, de bars, d'hommes et femmes alcoolisés.

Pendant mes études, vivant dans un studio, les murs fins, s'endormir étaient un peu difficiles surtout en plein week-end. Après quelques mois, je m'étais faite à la situation. Mais bien contente d'être partie de Paris après l'obtention de mon diplôme. Où personne ne me connaissait.

Je tournais la page de mes erreurs passées, mais après avoir entendu l'arrivée de la famille Bloom, tout allait changer. Cette porte noire que j'avais enfouie au creux de ma tête ressurgira probablement de plein fouet dans ma conscience, en permanence.

Avoir de nouveau le passé sous les yeux n'était bon pas pour moi.

Le tourment d'une erreurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant