"Seule sur la plage la nuit"... C'est peut-être un film, mais c'est aussi mon seul désir.Solitude.
Ma meilleure ennemie. Mon âme sœur diabolique. M'aider à réfléchir. Continuer de réfléchir. Toujours réfléchir. Mais à quoi ? Je passe plus de temps à penser au temps qui passe qu'à en profiter. Il défile devant mes yeux, mais je reste figée à l'observer, sans réagir. Et ce matin, cette observation chronophage me protégera encore. C'est la dernière fois cette année que je vais pouvoir observer ce chef d'œuvre de la nature qu'est le levé de soleil sur la mer.
Contrairement au film, ce n'est pas le soir, mais le matin. Tôt. Beaucoup plus tôt que d'habitude pour moi. Il est 5h45 du matin, et je me lève pour me rendre à la plage, comme tous les ans. Un pull pour me tenir chaud, un short large, une paire d'écouteurs, et je sors de la maison familiale, silencieuse à cette heure-ci. La marche me paraît longue, mais la plage m'attend, le calme m'attend. Sur le sable froid, seul le clapotis de l'eau perturbe ce silence apaisant. Le vide. Personne pour perturber ce calme qui m'entoure.
Je marche encore le long de ce petit fleuve, qui mène à l'étang à côté de la maison où dort ma famille à l'heure actuelle. En direction de cette plage inconnue, je croise plusieurs personnes, et les salue poliment. Quelques-unes me répondent de la même façon, mais la plupart l'ont l'air d'avoir passé une mauvaise nuit. Visiblement, la politesse ne les côtoie pas. Un père de famille fait une petite balade matinale avec sa femme et leur fille, d'environ 15 ans. Cette dernière a l'air épuisée, mais suit les pas de ses parents sans râler. Un vieil homme râle de la présence d'excréments sur le chemin tracé dans les herbes. J'ai beau regarder le sol, je ne vois pas de déchets animales traîner sur le passage. C'est au tour d'un enfant de marcher vers moi. Ses yeux rougis ne me montrent que de la douleur et des peines. Il doit avoir 10 ans, peut-être 11, et marche la tête baissée vers ses pieds. Je le croise de temps en temps, mais il n'a jamais l'air heureux.
J'arrive sur le chemin qui mène à la plage, et prend une grande inspiration. Mon application météo me disait hier soir que le soleil allait se lever vers 6h17. Ne voulant le rater pour rien au monde, j'accélère ma marche. Au bout de 5min de marche rapide, la plage s'étend devant moi. L'eau frappe délicatement les grains de sable, créant une douce mélodie. Le vent frais matinal frôle mon visage, m'offrant quelques frissons. Personne pour me déranger.
Seule avec la mer.
Je sais ne pas être la seule à vouloir être seule de cette façon. Quelques fois, quand je viens sur cette plage silencieuse et calme le matin, je crois d'autres personnes marchant sans le moindre accompagnant avec eux. Cette sensation de liberté. Pas de pression. Et surtout, se sentir hors du temps. Observer le soleil se lever, sans compter les minutes. Dès que les premiers rayons font leur apparition, le temps semble s'arrêter, comme éblouit par la beauté de cet instant.
6h10. Cet instant magique arrive. Je ne peux pas me permettre d'attendre que cet astre majestueux ait fini son ascension. Je descend alors la colline de sable froid, et marche en direction de l'eau. Une fois installée au sol, de légers frissons reprennent leur parcours sur mes bras. Cette appréhension. Suis-je venue pour rien ? Le levé du soleil sera-t-il aussi beau que celui d'hier ? Vais-je encore être émerveillée ? A l'heure actuelle, ma plus grande peur est de me lasser un jour de ce spectacle. A force d'observer cet instant, je pourrais très bien ne plus vouloir venir, pensant que j'en ai vu assez. Mais non. Cette visite matinale est devenue ma drogue. Chaque année, je viens ici pour faire briller mes yeux, me rappeler cette joie enfantine que je cherche dans mon quotidien. A chaque levé du soleil, une larme de bonheur et de réconfort dévale la pente de ma joue, venant humidifier un peu plus le sable qui m'entoure. Ces larmes ne coulent pas pendant la journée, alors elles trouvent refuge ici, devant cette ascension.
Les écouteurs encore en place, Nostalgic night vibrant toujours dans mes oreilles, je me laisse porter par ce moment en me permettant de fredonner la mélodie. Malgré cette chanson qui passe dans mes écouteurs, je perçois un bruit à côté de moi, mais n'y prêtre pas attention, jusqu'à ce qu'une main sur mon épaule vienne interrompre mes pensées. Je me tourne vers la personne à côté de moi, et croise le regard d'un homme d'une vingtaine d'années, qui me sourit. Par politesse, je lui rend son sourire, et observe à nouveau le rivage. Le soleil commence à apparaitre à l'horizon. C'est maintenant.
- Vous allez bien ? me demande l'homme à côté de moi après m'avoir enlevé un de mes écouteurs.
Oui, merci.
Je répond calmement, mais ne veux pas qu'il continue de me parler. Je replace l'écouteur qu'il m'a enlevé, mais l'entend me faire une remarque.
- Ce n'est pas très poli d'avoir ses écouteurs sur les oreilles quand vous parlez à quelqu'un.
- Mais moi je ne vous parle pas. je lui répond toujours sans le regarder
Il semble surpris de ma réponse, et ricane en retirant à nouveau mon écouteur.
- Vous étiez seule, je me suis permis de vous accompagner. C'est mieux que de déprimer dans son coin, non ? me demande-t-il avec un large sourire aux lèvres.
- Non, j'aime être seule, surtout pour le levé du soleil.
Le soleil se montre à l'horizon, faisant ressortir mes couleurs préférées. Le bleu et le orange. Le ciel, et les reflets du soleil dans l'eau. Cette harmonie des couleurs, cette complémentarité. Cette douceur. En cet instant présent, tout est parfait. Tout, sauf la présence de cet homme, qui semble être apparu pour gâcher cette perfection.
- Personne n'aime être seul. Je viens juste vous tenir compagnie. Au fait, je peux vous tutoyer ?
'Je ne suis pas personne, je ne veux pas que vous me teniez compagnie, et non, je ne veux pas que l'on se tutoie.' Je lui répond plus sèchement.
Cet homme à l'air d'avoir un don pour m'énerver. Je replace pour la troisième fois mon écouteur, et observe la mer. Il est 6h28. Le soleil s'est déjà levé, et mon moment préféré arrive enfin.
- On dirait que vous m'en voulez, alors que je me montrais simplement gentil et que je voulais vous aider à trouver de la compagnie. Pourquoi vous refusez que je vous parle ?
Je soupire longuement, me demandant si je devrai me lever et aller m'installer plus loin, ou simplement lui expliquer que j'ai BESOIN d'être seule. Mais mon esprit me dit de choisir la deuxième option.
- Écoutez, je n'ai aucune idée de qui vous êtes, ni d'où vous sortez pour venir me voir maintenant, mais j'aimerai observer ce levé de soleil seule. Vraiment seule. Partez.
- Vous êtes vraiment bizarre. Si vous voulez tant que ça être seule, je vais vous laisser. Mais ne venez pas pleurer après parce que personne ne veut de vous. finit-il par me dire en se levant.
Les sourcils froncés et un air bougon sur le visage, il se dirige vers la dune de sable et disparaît de ma vie. Comme s'il n'était venu que pour me déranger dans ma paix éphémère.
Je prend une profonde inspiration, et continue de scruter l'astre se réveillant face à moi. Il doit maintenant être 7h, et le vais devoir rentrer. Cet homme m'a gâché mon moment.
Lorsque je quitte ma maison pour voir ce lever de soleil, c'est pour être seule. Seule avec moi même. Avec mes pensées et ma vraie personnalité. Personne pour m'influer. Le silence vous plonge dans une profonde pensée, dans une observation de soi-même. De nos actes et de notre réflexion. De ces mots que l'ont retient de dire à voix haute, par peur des réactions des autres. L'eau de la mer vient récupérer vos maux, et les évacuent, dans un doux mouvement formé par les légères vagues matinales. Pas de prise de tête avec qui que ce soit. Juste vous, contre vous-même.
Le seul moyen de vérifier mes dires est de tenter l'aventure.
Prêts ?
VOUS LISEZ
ժׁׅ݊ꫀׁׅܻꫀׁׅܻ℘ tׁׅhׁׅ֮ᨵׁׅυׁׅᧁׁhׁׅ֮tׁׅ꯱ׁׅ֒
Short StoryJuste quelques petites histoires :) Chapitres assez courts (entre 1 000 et 2 500 mots) Sur des sujets qui me touchent, qui me semblent importants