Les Suppliciés de l'Ombre 1. L'ennemie impalpable

Chapitre 1

Livre 1

« Dans la noirceur de la nuit,

Elle se glisse et prend la vie.

De toute essence elle se nourrit,

Jusqu'à ce que la source soit tarie.

Insatiable, impalpable, inarrêtable,

Son aura est implacable.

Elle sème le mal et la terreur,

Jusqu'à ce que toute âme se meurt.

Prenez garde à l'Ombre noire,

Qui annihilera tout espoir,

Car il se peut bien qu'un soir,

Elle traverse votre miroir. »

Il est sept heure trente lorsque je passe les portes du commissariat de Duneach. Emmitouflée dans mon trench beige, mon bonnet vissé sur la tête, je souffle de soulagement en voyant que le lieutenant Murphy est toujours là. Dès qu'il m'aperçoit, il baisse la tête et tente un demi-tour vers son bureau qui ne m'échappe pas.

— Bonjour Lieutenant ! lancé-je, guillerette. Je vous ai apporté un café !

Murphy soupire en remontant ses lunettes qui avait glissé sur le bout de son nez et il lisse sa moustache noire. C'est avec une évidente mauvaise humeur qu'il vient à ma rencontre et qu'il saisit le gobelet à son attention.

— Vous êtes pire que la gale Lisa, que faites-vous ici ?

— C'est Lysis. J'ai reçu un SMS du maire, il parait qu'un nouveau corps a été retrouvé !

Le lieutenant marmonne quelque chose à propos dudit maire et du malin plaisir que celui-ci prend à lui rendre la vie impossible, avant d'attraper un dossier sur le comptoir de l'entrée et de se diriger vers sa voiture.

Je le suis à grandes enjambées, mes bottines à boucles argentées cliquetant à chacun de mes pas. Malgré les nombreux soupirs d'agacement de Murphy, je m'assois sur le siège passager et entreprends d'ouvrir le dossier confidentiel.

En tant que détective privé, le maire m'avait autorisée à prendre part à l'enquête sur « Les fondus », comme les appelle Murphy. En même temps, je lui avais rendu un sacré service il y a quelques années, il me devait bien ça.

Les photos du dossier auraient fait tourner de l'œil à l'estomac le plus accroché. Comme pour chaque meurtre lié à cette affaire, la victime était retrouvée baignant dans un fluide noirâtre et poisseux, tout liquide semblant avoir été retiré de son corps. Elle avait l'aspect d'une momie desséchée, recroquevillée sur elle-même.

Les meurtres de ce genre se multiplient ces derniers temps et la police tourne en rond. Aucun indice, aucune piste, rien de rien. C'est comme si le coupable n'était qu'un fantôme. En tout cas, il n'a rien d'humain, c'est certain. Mais ça je ne peux pas en parler au lieutenant. Déjà il ne me croirait jamais, ensuite, je n'y suis pas autorisée. Cela mettrait de nombreuses espèces en danger. Dont la mienne.

Je renfonce davantage mon bonnet sur ma tête pour camoufler mes oreilles pointues et me tourne vers Murphy qui scrute la route derrière les essuie-glaces balayant la bruine matinale.