Viktor et Hélène

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La nuit tombait sur la ville faiblement éclairée. Les enfants, abattus par leur journée de jeux étaient couchés, et les rues désertées après la tumultueuse agitation des travailleurs impatients de retrouver leur foyer. Le silence régnait dans le froid du crépuscule. 

C'était le signal. Le signal pour Hélène de laisser place à ses sentiments délictueux. Le signal d'arrêter de faire semblant. Elle savait que Viktor l'attendait, comme il l'attendait chaque soir, sur le toit de son immeuble. L'unique lieu où ils pouvaient être invisibles aux yeux du monde. Où rien ni personne ne pouvait révéler leur présence. Où leur amour transcendent pouvait enfin refaire surface. 

Hélène vit Viktor à l'instant où Viktor vit Hélène. Sans un mot, sans une parole, l'un prit l'autre dans ses bras, et ils s'embrassèrent jusqu'à ne plus former qu'une seule et même personne. Ils n'étaient plus Viktor et Hélène, ils étaient l'amour, l'amour pur, celui que nul ne peut briser, celui qui résiste aussi bien aux torrents de la vie qu'aux flammes de l'enfer. 

La hauteur leur procurait une vue imprenable sur l'immensité de la ville. Elle leur donnait l'impression de diriger le monde, tous les deux, à la seule force de leur amour mutuel. Ils savaient que, le lendemain matin, le rêve prendrait fin. Du moins, pour la journée. Ils devraient continuer à faire semblant d'être épris d'un autre et d'en être heureux. Mais, pour l'instant, ils se contentaient de s'aimer. D'un amour aussi impossible qu'absolu. Aussi inaccessible qu'éblouissant. Aussi inconcevable qu'inébranlable. 

C'était ainsi qu'Hélène et Viktor écoulaient leurs nuits. Éblouissants comme le soleil sous la douce pâleur de la lune.

[RECUEIL] Exquis motsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant