Jour Quatre

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Le soir, couleur cendre et corbeau,
Verse au ravin qui s’extasie
Sa solennelle poésie
Et son fantastique si beau.

- M. Rollinat.

Huit heures du soir. Si je ne me dépêche pas, je vais encore arriver en retard au boulot. Après un sandwich rapide, je vais dans le couloir pour enfiler un manteau. En passant les manches, soudain, quelque chose attire mon attention.

Je baisse les yeux sur la porte. Dans la fente du courrier, j'aperçois une feuille. Et mon rythme cardiaque panique lorsque je reconnais le même type de papier que le message de la veille. Prudent, je fais quelques pas vers la porte. Au seuil, je me penche pour ramasser la lettre. Je la déplie, fébrile, afin de lire ces quelques mots :

« Je le connais par cœur.
Peut-être moins que sa mère et son père.
Mais bientôt, je serai la numéro un.
Il m'a parlé.
Il a retrouvé mon téléphone, il m'a dit que mon chat était mignon.
Je sais qu'il ressent la même chose pour moi.
On est tellement amoureux.
Aujourd'hui, c'est notre anniversaire de quatre jours. »

Je froisse le message, les larmes aux yeux. Et le jette par terre.

Je suis à bout.

*

Le cou recouvert d'une écharpe épaisse, j'arrive avec hâte à ma voiture sur le parking. J'ouvre la portière si violemment que le givre craquelle dangereusement sur la surface. Je m'installe, referme la porte, tourne la clé. Mais le moteur ne s'enclenche pas.

La colère me gagne. Je n'ai vraiment pas besoin de commencer la journée comme ça. Je tourne la clé, encore et encore, mais rien n'y fait. J'abandonne, reposant mon front sur le volant. Il n'y a rien à faire.

- Je dois prendre le bus.

*

Le transport en commun est entièrement vide. Je me demande pourquoi. Assis sur un siège du milieu, le temps me semble infini durant ce trajet. Je remue sans cesse, regardant derrière moi de temps en temps. Comme si, à tout moment, la silhouette de la psychopathe pouvait se dessiner dans un coin du véhicule.

Le bus s'arrête ; une femme monte, elle porte une capuche. Mon sang ne fait qu'un tour. Elle passe sa carte et je découvre son visage.

Ce n'est pas elle. Juste une inconnue. Elle s'assoit vers l'avant. Pourquoi garde-t-elle sa capuche ? Pourquoi mon esprit est-il aussi obsédé par cela ?

Je remonte mes genoux sur le siège pour reprendre mon souffle qui s'accélère. Je n'ai jamais eu peur des inconnus, encore moins des transports en commun. Je travaille dans un café. Je vois des nouvelles têtes chaque jour.

Alors, pourquoi ? Pourquoi mon souffle est aussi irrégulier ? L'inconnue, assise à l'avant, tourne sa tête vers moi. Je ne saurai décrire son expression. Mais j'ai la sensation désagréable qu'elle me juge. Arrêtez de me fixer... Arrêtez... Quand est-ce que ce trajet se finira ? Quand est-ce que cet enfer se finira ?

Quand est-ce que j'arrêterai d'être si faible ?

𝗧𝗵𝗲 𝗖𝗹𝗼𝘀𝗶𝗻𝗴 𝗦𝗵𝗶𝗳𝘁Où les histoires vivent. Découvrez maintenant