De l'Autre Côté

Chapitre 4

            L'odeur du pétrichor et du sang régnait dans toute la forêt. Et au beau milieu de tout cela, se trouvait deux armées dont la rancœur avait pris le dessus sur la raison. Se blessant, se tuant sans réel but, tout simplement car « c'est ce que font nos ancêtres depuis des lustres ». Sur ce champ de bataille se trouvait aussi deux chefs dont le cœur avait pris le dessus sur la haine. Leurs soldats bien trop aveuglés par la colère se défoulaient sur le camp adverse jusqu'à ce que mort s'en suive. Il ne restait qu'une dizaine de cœur rancunier sur cette terre trempée par la pluie, et par le sang s'échappant des vieux corps transpercer par une arme de métal. Et au bout de quelques minutes de bruit métalleux s'entrechoquant, plus rien ne parvenait aux oreilles des deux héritiers. Alors, constatant que tous leurs guerriers avaient péri, le premier lâcha son épée, et s'effondra au sol. Sûrement de tristesse, ou simplement car il se sentait enfin soulager. Soulager que cette guerre sans fin ne se finisse, jusqu'à ce que leur camp ne recréé une armée bien plus résistante et nombreuse. Le deuxième resta debout, l'arme à la main, pourtant, il n'avait aucune envie de s'en servir. Une larme discrète mélanger à la pluie s'échappa de sa paupière. Combien de fois en avait-il rêvé ? Bien trop à son goût.

-Toshinori. Commença l'homme à terre. Pourquoi ne me tues tu pas maintenant ?

L'autre à cette question, s'écarquilla.

-Car je ne peux pas.

Il ne pouvait pas, il ne le voulait pas. Même avec toute la bonne volonté du monde, il ne pouvait pas enlever la vie de cet homme. Son cœur ne le voulait pas.

-C'est impossible pour moi de te tuer. Je ne le supporterai pas. Tu es un Homme, tout comme moi. Pourquoi devrais-je te tuer ? Parce que nous sommes censés être ennemis ? Tout cela n'a aucun sens. Vous n'êtes en aucun cas les démons de l'histoire, nous sommes pareils. Tu le sais tout autant que moi, avant même que nous entrions sur ce champ de bataille.

Ledit Toshinori lâcha son épée, lui tendit une main et l'invita à le rejoindre à la même hauteur. Cependant, l'action faite, il ne la lâcha pas pour autant.

-Shigaraki, tous nos soldats sont morts, plus personne ne pourra nous succéder. Arrêtons de nous cacher, et mettons fin à cette guerre.

-Arrêtons de nous cacher ? Tu le sais tout autant que moi que c'est tout bonnement impossible. Même si nos deux peuples vivaient en paix, jamais nous ne pourrons vivre normalement. A peine nous nous dévoilerons que nous finirons comme tous ces cadavres. Brûlés jusqu'à ce qu'il ne reste de nous que des cendres.

Le silence de la nuit enveloppait leur confession intime. Toujours les mains liées, Shigaraki posa sa tête sur l'épaule de son soi-disant ennemi, l'autre enfouit son nez dans le cou de l'autre.

-Je ne peux pas te perdre...

-Je sais...

Un léger sanglot parcouru ses lèvres, et leur étreinte se resserra.

-Je t'aime tant...

-Je t'aime aussi...

Ce fameux secret dont nul ne connaissait l'existence était celui-ci. Les deux grands chefs des deux tribus ne pouvaient se tuer pour une seule et unique raison.

Ils s'aimaient.

Durant leur jeunesse, avant même qu'ils ne soient aptes à entrer sur ce champ de bataille mortel, ils s'étaient rencontrés au beau milieu de la nuit, loin des corps sans vie et du sang enveloppant la moitié de la forêt. Aucun d'eux ne s'attendait à trouver l'autre, et pourtant, à peine leurs regards s'étaient croisés, qu'une ribambelle de sentiments, si différents les uns que les autres les envouta. Alors, durant des années, ils se voyaient en secret. Même après la mort de leur prédécesseur, ils ne pouvaient s'empêcher de faire une escapade nocturne pour se retrouver dans un moment intime, loin de leur village respectif.

Tout dans un silence mort, les deux amants s'embrassèrent. Les larmes salées se mélangeant avec leurs baisés, la tête embrumée par leur amour, ils n'entendirent pas les pas arrivés dans leur direction. Bien trop naïfs et imprudents, c'est ainsi que leur amour fut découvert. A peine eurent-ils le temps de se détacher l'un de l'autre, qu'ils comprirent leur erreur. Les villageois de chaque tribu constatant la mort de tous leurs soldats, ainsi qu'au beau milieu de tous ces cadavres, leurs valeureux chefs se touchant comme deux amants. Alors, sans réfléchir, ce fut le clan le plus rapide qui attaqua en premier leur ennemi. Poussant jusqu'à même leur propre chef pour attraper celui qu'ils considéraient comme « le démon de l'histoire ». L'autre clan, lui, ligota l'autre. Les deux chefs, étaient pris par leur propre tribu, au milieu de la haine des villageois s'accusant l'un l'autre de tout ce désastre. Dans un dernier regard, sans un mot, ils s'échangèrent leurs derniers mots silencieux. Ce fut Shigaraki qui se fit exécuter en premier, la tête coupée d'une seule traite, sans qu'il ne s'en rende compte, devant son Amour. A cet instant, Toshinori sentit son cœur se brisé. Un cri de douleur s'échappa de sa gorge suppliant que tout ceci d'arrête, essayant de se convaincre que tout ceci n'était qu'un mauvais rêve. Soudain, il sentit quelque chose lui perforé le poumon gauche. Une lame glacée s'enfonçant peu à peu dans sa chair jusqu'à ce que celle-ci atteigne l'autre côté de son corps. Puis d'un coup vif, celle-ci se retira, le laissant se vider de son sang, et observer sa tribu repartir vers le village avec la tête de son Bien-aimé en haut d'une fourche. C'est ainsi qu'il mourut seul, sans avoir pu dire un dernier au revoir à la personne qu'il aimait plus que tout au monde.

Après avoir découvert les deux chefs, chaque tribu se mit d'accord pour ne parler à personne de ce qu'il s'était réellement passé. C'est ainsi que ce qu'il se passa cette nuit-là disparu des mémoires. Le mur fut construit, et chaque clan raconta que les deux chefs s'étaient entre-tués, et que lorsque les villageois débarquèrent sur le champ de bataille, ils avaient trouvé le chef Shigaraki décapité, ainsi que le chef Toshinori transpercer au poumon gauche, près du cœur.

⁛ ⁛ ⁛ ⁛ ⁛ ⁛ ⁛ ⁛ ⁛ ⁛ ⁛ ⁛ ⁛ ⁛ ⁛

Voici la triste histoire des deux anciens chefs... 

J'espère que ce chapitre vous aura plu ! 

Zoubi zoubi !!