Chapitre 5

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Colby Collins et moi nous étions quittés comme nous nous étions rencontrés: subitement et de façon tout à fait... frappante. Je ne pouvais m'empêcher de rire en y repensant. Je faisais d'ailleurs mon maximum pour ne pas y repenser. J'avais bien mis au moins trente minutes à m'arrêter de rire et de pleurer en même temps. Heureusement, il n'avait pas vraiment l'air du genre susceptible. 

En même temps, qu'on me comprenne bien: quelle est la probabilité pour qu'un fille se fracasse sur vous et qu'une mouette en fasse de même en l'espace de... dix minutes? Si je n'avais pas été présente, j'aurais juré que ce genre de scènes ne se déroulent que dans les films humoristiques bien lourds. N'empêche que la mouette avait bel et bien raté son coup et n'avait pas pu éviter le sportif numéro 1 du lycée. Immédiatement, je m'étais sentie moins quiche de lui être tombé dessus. Le truc moins drôle, c'est que la mouette lui avait certainement causé une commotion cérébrale ou quelque chose dans ce genre. Il s'était affalé par terre, la mouette sur les genoux. Ils étaient aussi sonnés l'un que l'autre en y repensant. Remis du choc, il avait commencé à dire des choses bizarres avant de se lever et de s'en aller comme s'il venait de voir un fantôme.

Je renversai mes céréales en formes de mini cookies dans le bol en gré que j'avais disposé sur la table aux côtés d'un grand verre de jus d'orange. Au risque de décevoir les partisans du lait avant ou après les céréales: pas de lait pour moi. Heather aimait bien dire un truc comme "T'as hacké le game". Au moins, je ne perdais pas de temps en questions existentielles qui divisent la planète.

Alors que je savourais mes cookies, mes pensées vagabondaient de Colby à son frère, à la relation complexe qui peut unir des personnes proches, à Scott qui boudait toujours Heather, à... l'église. Je réprimai un frisson en lâchant ma cuillère comme si cette dernière venait de me mordre.

Je baissai les yeux sur mon portable, aucunes nouvelles en dehors d'un message d'Helena indiquant que mon père et elle prévoyaient un weekend shopping à Portland. Je lui répondis un "pas intéressée" et forçai un trait de bonne humeur avec un smiley et un "merci, amusez-vous bien".

Ils prenaient rarement du temps hors de la boutique. Ces derniers temps Helena essayait de lever le pied et de traîner mon père avec elle un peu partout, même si ce dernier refusait catégoriquement d'aller plus loin que Portland si je n'étais pas de la partie. Helena acceptait de bonne grâce, ou du moins elle n'avait jamais fait savoir le contraire en ma présence.

Je me résolus à prendre une douche après trois bols de céréales. J'aurais pu me nourrir de mini cookies sans une once de remords.

En dévisageant mon reflet dans le miroir de la salle de bain mon regard fut attiré par la mine affreuse que me donnait ce genre de soirée. Heather avait vraiment une influence douteuse sur ma personne. Mon regard fut attiré par une rougeur dans mon cou, ou plutôt une griffure qui s'étirait du creux de mon cou vers la nuque.

Les images de mon rêve me revinrent en mémoire aussi violemment qu'un boomerang. J'avais dû me débattre comme une folle et croire que la main me saisissait alors que ce n'étaient que mes ongles. Je pris une grande goulée d'air en me rendant compte que j'avais oublié de respirer. Oui, ce sont des choses qui arrivent. Pas de jugement ok?

Une bonne douche chaude et tout irait pour le mieux. Je pianotai sur mon téléphone "Un café crème?". Heather me répondit dans la seconde "Je pensais justement à ça! Le temps d'avaler mon bagel et je suis à toi".

J'optai pour un short en jean et un débardeur rose vif. La couleur n'était pas extraordinaire, mais le décolleté prodigieux me pardonnait pour ce choix.

Heather se présenta à la porte, comme si elle savait que mon père ne serait pas là. A moins que l'absence de la voiture ne lui ait mis la puce à l'oreille.

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