Chapitre 2

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- HANJI !

Je me relève haletant, la chemise trempée.

Ma respiration est saccadée.

Je me passe la main sur le visage et remarque alors qu'elle tremble.

Je vais bien. Je vais très bien.

- JE VAIS BIEN !

Hurler ainsi ne me donne pas ce que j'espérais, c'est à dire un soulagement. Mon cri forme un écho dans mon crâne qui percute chacune des parois à m'en donner la nausée.

Le miroir en face de moi semble me faire des reproches et j'ai un teint encore plus cadaverique que d'habitude.

Je m'approche de la glace. Et y découvre des petites marques : des traces de doigts.

Il y a des traces de doigts sur la surface réfléchissante.

Cela ne peut pas être moi.

Cela ne peut être qu'elle...

Hanji.

Pourquoi m'as-tu laissé...?

《 Tu sais Lili, tôt ou tard, toutes les personnes auxquelles on tient meurent. C’est quelque chose que nous ne pouvons tout simplement pas accepter. C'est cette compréhension qui peut nous rendre rendre fou.》

Ah tu aimait ça, avoir raison...

Le miroir tombe au sol dans un fracas de verre.

Je veux que tu n'ais plus jamais raison.

Je voudrais ne jamais t'avoir connu.

C'est de ta faute.

Tout est de ta faute !

Mon poing ensanglanté est secoué de soubresauts. Les morceaux de verres qui y sont plantés ne me font rien ressentir.

Je ne ressent plus rien.

Il n'y a plus de bruit.

Je suis seul.

Je vais bien.

Je rejoint le terrain d'entraînement et passe devant mes coéquipiers sans un signe. J'entends vaguement Mike demander ce qui est arrivé à ma main mais je ne prend pas la peine de répondre et m'élance sur le parcours que je connais par cœur depuis des années. Plus aucune adrénaline ne m'envahit lorsqu'un faux titan fait de bois surgit devant moi. Plus aucune fierté ne brille dans mes yeux lorsque je lui tranche la nuque. La sensation de voler que me procurait l'équipement tridimensionnel n'existe plus. J'ai l'impression d'y être enchaîné.

J'atterris à l'autre bout du parcours à peine essoufflé et plus frustré que jamais. Je vois Erwin approcher à grand pas de ma position, cette fois je ne pourrais pas l'éviter alors je patiente jusqu'à ce qu'il m'ai rejoint.

- Est-ce que tu viendras Levi ?

- J'ai beaucoup de choses à faire.

- Je pense que cela te ferais du bien de...

- Et moi je pense que je sais mieux que toi ce qui est bon pour moi...

Mon ami soupire mais je n'ai aucune pitié pour lui. J'ai décidé de ne pas y assister. Donc je n'irais pas.

- Eh bien... Tu sais où cela se passe si jamais l'envie soudaine de venir te prenait.

- Cela n'arrivera pas.

Le blond repart vers les autres et je les vois me lancer des regards inquiets. Ces regards. Pourquoi faut-il qu'ils me regardent ainsi ?

Ma main se remet a être secoué de soubresauts. Comme ce jour là...

Je retourne dans ma chambre bien décidé à organiser la prochaine expédition en dehors des murs. Je travaille ainsi quelques heures avant de commencer à fatiguer.

De la fatigue ? Non, ce ne sont pas quelques heures de travail qui me fatigueraient, loin de là.

Pourtant je connais cette sensation. Je la connais même un peu trop bien...

Culpabilité. Voici son nom. Le nom de monstre sans visage qui vous écrase la poitrine et vous tord le ventre. Ce démon qui vous fait réfléchir. Qui vous fait trop réfléchir...

La fenêtre claque et le vent hivernal détruit mon travail en l'éparpillant sur le sol. Est-ce à cela que se résume ma vie ? Faire et défaire ? Aimer puis pleurer ? Construire puis reconstruire ?

Suis-je vraiment condamné à subir éternellement cette souffrance ? Isabel... Furlan... Petra... Oluo... Erd... Gunther ... Et maintenant toi ? Hanji...

Il faut que j'y aille.

Maintenant.

Cela devient une évidence.

Je traverse à toute vitesse les couloirs du quartier général du bataillon. Je ne prend même pas la peine de seller mon cheval.

Il faut que j'y soit à temps.

Il le faut.

Le vent semble me traverser et je galope comme si j'étais poursuivis.

Il faut que j'arrive à temps.

En apercevant le portail ouvragé je saute de ma monture et me précipite vers l'ouverture. À peine ai-je poussé le panneau qu'un souffle le fait claquer derrière moi.

Plus de retour en arrière possible.

Je reprend une allure plus calme, et marche rapidement entre les pierres suivant le son de la voix d'Erwin qui se repercute dans cette foule à jamais silencieuse.

Au détour d'une haie apparait un attroupement muet, rassemblé autour d'une seule et même chose : un cercueil.

Son cercueil.

Erwin me sourit mais je ne le vois pas.

Je ne vois que ce bout de bois.

Il est vide.

Je le savais pourtant...

Pourquoi des larmes me montent-elles aux yeux ?

Pourquoi suis-je de nouveau incapable de bouger ?

Pourquoi ai-je l'impression de me retrouver là bas ?

Un mois plus tard... Dans cette clairière... Calme. Trop calme pour ce qu'il venait de s'y passer...

Pourquoi ?

Je vais bienOù les histoires vivent. Découvrez maintenant