Chapitre 1

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Yoongi roula sur son matelas, encore tremblant. Il n'y arriverait pas, il... non, impossible, il n'y arriverait plus. Sa couette le dissimulait jusqu'au front, il gardait les paupières closes.

Il n'y arriverait pas.

Pour la cinquième fois ce matin-là, il appuya sur le bouton à droite de son smartphone, et son cocon de couvertures s'illumina alors que l'heure apparaissait. Dix heures trente-cinq. Dans vingt-cinq minutes, il devait se trouver à l'autre bout de la ville pour une conférence de presse des suites de l'incident advenu la veille, mais la seule idée de quitter son lit le terrifiait.

Trois appels manqués de son agence, et douze de ses proches.

Sans surprise, il entendit qu'on frappa à sa porte peu après. Il glapit en se recroquevillant davantage sous les draps, et il resta silencieux. Un nouvel appel entrant de son manager apparut sur son écran, il se décida à décrocher.

« Yoongi ! Yoongi, tu m'entends ?

— Joon, je... je suis désolé, balbutia-t-il.

— J'ai cru que t'avais fait une connerie, souffla son ami de qui la voix tremblait tant qu'elle bouleversa Yoongi.

— Tu sais bien que non, je ferais jamais ça.

— Je pensais aussi que t'abandonnerais jamais un concert en plein milieu d'une performance. »

Son ton ne témoignait d'aucun reproche, mais le rappeur sentit qu'il l'avait déçu malgré tout – ou du moins il le présumait. Namjoon pourtant s'était toujours montré si patient envers lui...

« Je pensais aussi, mais... c'était juste trop, j'en pouvais plus, je suis épuisé. Je peux pas...

— On a annulé la conférence de presse y a dix minutes, l'informa Namjoon.

— Je suis tellement désolé, tu sais à quel point j'aime ce métier...

— T'en fais pas, ta santé avant tout, comme d'habitude. Mais pense à tes fans. Tu leur dois au moins un mot, un post Twitter, n'importe quoi.

— Je sais, mais j'y arrive pas. Tu peux pas l'écrire pour moi, comme d'habitude ?

— J'espérais que tu voudrais leur parler à cœur ouvert.

— Tu voudrais que je leur dise quoi ? Que je leur avoue que leur rappeur favori souffre d'anxiété, de restes d'agoraphobie de son adolescence ? Tu voudrais que je leur dise que le mec qu'ils considèrent comme un pilier qu'on ne peut pas briser n'est rien de plus qu'une brindille depuis longtemps en morceaux ? Ils vont me haïr, me mépriser... Je veux garder le masque que j'ai toujours porté, je peux pas l'enlever...

— T'es vraiment sûr de toi ?

— Certain.

— On peut prétexter un surmenage – c'est pas faux, d'ailleurs. Ta cheville est encore fragile depuis ton opération, c'était y a quoi... quelques mois ? J'ai bien vu qu'elle avait l'air de te tirer un peu depuis une semaine. C'était ta dernière date et tu t'es barré juste avant la dernière chanson, alors tes fans t'en voudront moins que si t'étais parti au début du concert.

— Et... ensuite ?

— Ensuite t'arrêtes tout pour un mois, tu prends des vacances.

— Hein ? T-Tu me proposes... des vacances ?

— Eh ouais, tes premières vacances en quatre ans, ça te ferait pas du bien ?

— Si, oui, bien sûr, mais... t'es sûr que c'est possible ?

— J'en ai discuté avec tout le monde, et ils ont accepté ça. On attendait la fin de ton concert pour te l'annoncer, mais... ça a été compliqué, disons. »

Le garçon de l'île [Yoonjin]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant