27 | Jour J

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« - Ça fait combien de temps ?

- De quoi ?

- Qu'elle est enceinte ? »

Luck et moi sommes dans la cuisine. Éthan, Éden et Estelle sont dans le salon en train de discuter. Le repas a été sympa, convivial, mais je vois bien qu'Estelle n'est pas en forme. Elle ne se maquille plus, ne s'apprête plus, sourit à peine.

« - Huits mois, le jour J approche à grands pas ! Et sinon pourquoi cette question ? Tu devrais le savoir.

- Pour être sûre. »

Son gros ventre n'arrange rien, et quand je parle de gros je veux dire ÉNORME. J'en ai vu des femmes enceintes, mais là ça me semble vraiment gros pour un seul petit être à l'intérieur...

« - Certes ils veulent tous les trois garder la surprise du sexe, mais je pense que les médecins leurs auraient dit si c'était des jumeaux. »

Comme d'habitude, Luck arrive à lire facilement dans mes pensées. Cependant, cette fois-ci, je ne peux me résoudre à lui donner raison.
Mais je n'ai pas la force de m'embarquer dans cette discussion encore une fois, ce qui me préoccupe le plus, c'est l'état d'Estelle.

« - T'aimerais pas passer l'après-midi avec tes amis ? Ça fait longtemps que vous ne vous êtes pas retrouvés entre hommes.

- T'essaies de me dégager de ma propre maison ?

- J'ai besoin de parler seule à seule avec Estelle, sans eux.

- C'était une blague ne t'inquiète pas. Je t'aime tu sais ?

- Oui je sais ! »

Il m'embrasse tout en souriant puis me laisse finir de débarrasser la table et faire la vaisselle pour aller proposer à Éden et Éthan une sortie au bowling.

Vu le ventre de ton amie, c'était pas très futé comme idée, enfin t'as compris : bowling, boule, ventre...

Oui ma conscience j'ai bien compris ! Et j'espère moi aussi que ça ne l'a pas encore rappelé la grosseur de son ventre. Mais je pense que c'est surtout le fait de ne pas pouvoir se joindre à eux qui va la déprimer davantage.

Une fois partis, je m'installe à côté d'elle et lui demande comment ça se passe à la maison, si tout va bien.

Elle me répond simplement que ses deux compagnons sont adorables, qu'ils s'occupent bien d'elle et sont très protecteurs et aux petits soins. Ils ne la laissent pas faire la moindre tâche domestique ce qui parfois l'énerve.

« - T'aimerais qu'on aille faire les boutiques ? Ça fait longtemps.

- Non mais tu m'as vu ?! C'est hors de question, je ne pourrai rien porter, ou rien de très joli... Je suis condamnée maintenant.

- Arrête...

- Mais regarde-moi ! Je dors pas, je pleure sans arrêt, je m'énerve pour tout et rien. Et physiquement je ne ressemble plus à rien... J'ai d'énormes cernes, les cheveux gras, des poils que je n'ai plus la force d'épiler et des vêtements moches mais qui sont les seuls dans lesquels je rentre. Je ne peux même plus me déplacer, ce ventre gigantesque me gène dans chaque mouvement, même pour me retourner dans mon lit ! Je suis fatiguée, mais fatiguée... J'en peux plus Félicie, tellement que j'ai l'impression de ne pas être une bonne mère... J'en viens même parfois à penser que je regrette, tu te rends compte ?! Je suis horrible... Physiquement et mentalement, je ne vaux plus rien...

- Estelle ! Tu es EN-CEIN-TE ! Avoir un ventre énorme c'est NORMAL, être paumée c'est NORMAL, que tes émotions se transforment en montagnes russes c'est NOR-MAL. Tout est encore nouveau pour toi. Mais je t'interdis de te traîter de mauvaise mère, de personne horrible, car c'est faux ! Tu es forte et tu seras une excellente maman, j'en suis persuadée. Et ne t'inquiètes pas pour ton apparence, petit à petit tu retrouveras la force de te faire toute belle, je t'aiderai volontiers, nos sorties shopping me manquent beaucoup... Enfin, le plus important, c'est qu'à mes yeux, et à leurs yeux à eux, tu restes tout aussi merveilleuse et magnifique, je t'assure.

(Re)prends-moi !Où les histoires vivent. Découvrez maintenant