Elle. Elle est celle pour qui je ferais tout. Elle est mon soutien, mon bonheur, ma moitié.
Elle.
Thalia. Ma sœur. Ma jumelle.
Elle n'a jamais su pour le traitement que m'offrait Carden et elle a eu le grand frère que j'aurais voulu avoir aussi.
Malgré cela, c'était elle et moi, on ne pouvait être l'une sans l'autre. Je suis l'ainée à six minutes près et j'ai aussi eu droit à une croissance plus rapide.C'est juste après nos six ans qu'elle a disparu sans laisser de traces, enfin presque. Kidnapping, fugue, meurtre, erreur de sa part : nous avons épluché toutes les possibilités.
Carden était devenu fou. Et depuis ce jour, il n'a jamais cessé de s'enfoncer dedans. Maman et papa ont tout fait pour la retrouver, jusqu'à y laisser leur vie. Ils n'ont pas fait exprès, mais une recherche de trop entraîne parfois des conséquences désastreuses. Le camion qui a percuté la voiture de mes parents ne le voulait pas, mais peut-être que l'univers le voulait, lui.
C'est à « l'orphelinat » que j'ai trouvé le livre, dans un coin de la bibliothèque bancale au fond de la salle de jeux. Alors, le dernier cadeau de Thalia avait pris tout son sens. Elle était allée dans la Magnificence. Dans quel but ? Je ne le sais toujours pas à ce jour. Mais depuis ce jour, je savais, et c'est tout ce qui comptait. Même Carden, dont son ancien comportement me hantait alors, ne m'atteignait plus : j'avais une raison de continuer à me battre.
Un problème dont elle ne m'aurait pas parlé ou une curiosité pour l'inconnu, comme l'aurait eu n'importe quel enfant découvrant l'existence d'une multitude de mondes autre que celui dans lequel on vit...
Je me demande si elle a grandi, évoluée, ailleurs. Et si elle était restée une enfant ?
Jusqu'à mes quinze ans, j'étais persuadée que mes parents s'étaient perdus avec elle, qu'ils l'avaient rejoint, mais ce n'est qu'un espoir d'une enfant refusant de faire son deuil. Eux, on avait les corps, et la pierre tombale.Si déjà je sauve ma sœur, afin de me sentir complète à nouveau, je serai comblée. Je ne pense qu'à ça la majorité du temps, chaque jour qui passe depuis ce jour-là.
Dès l'orphelinat, que j'ai personnellement bien vécu, puisque tout le monde était adorable, Carden et moi, on s'est oubliés. Enfin, j'ai essayé et lui a réussi.J'ai tenu avec cette force intérieure qui me pousse encore aujourd'hui à tenter le tout pour le tout dans un univers dans lequel je ne maîtrise rien pour retrouver ma jumelle. Peut-être un espoir enfantin.
Au niveau physique, elle et moi étions similaires sans trop l'être. Des cheveux brun avec des yeux assortis, des corps avec de fortes ossatures et des silhouettes très peu cambrées.
En grandissant, mon ossature a permis l'apparition de larges épaules et d'une taille équivalente. Je fais un mètre soixante. J'ai coupé mes cheveux au niveau des épaules et arrêté l'orthodontie avant la fin de mon traitement, j'ai donc toujours les dents légèrement tordues sur le devant.
Quand j'imagine Thalia à notre âge, à vingt-ans... Je la vois avec un sourire rayonnant accompagné d'une teinture rouge qu'elle aurait imposé à ses cheveux longs et bouclés dès l'adolescence. Elle aurait la même corpulence que moi, mais certainement avec un style sobre et chic. Contrairement à moi qui ai développé une passion pour les robes d'époques, style que je porte au quotidien depuis que j'ai eu mon propre logement à 18 ans.
Comme à chaque fois que je m'autorise à penser à elle, je pars dans tous les sens en plus de me mettre à pleurer. Accessoirement, ça me réveille aussi.
Aimée a le sommeil lourd et elle ne bouge pas dans le lit, je pense que je vais prendre le risque de me lever. Je rêve d'un verre d'eau pour me remettre de ces pensées.
Sur la pointe des pieds, je dépasse les matelas où dorment Lisha et Kavita et arrive tant bien que mal dans mon salon dans lequel mon canapé clic clac est devenu le terrier d'Amris, Kearne et Tristram.
Sans prendre la peine de les regarder, je traverse la pièce pour atteindre la cuisine où... Deux des garçons sont en train de boire du lait.
« 'Lys ? Tu ne dors pas luciole ? »
Amris et ses surnoms à trois heures du matin : remède absolu contre la déprime.
« Non, mauvais rêve. Vous non plus à ce que je vois. »
Ils me regardent tous les deux et je me prends un verre que je remplis au robinet avant de le boire goulûment.
Quand je repose mon verre, je sens une tête prendre lourdement place sur mon épaule. Je n'ai pas besoin de me tourner pour savoir que c'est Kearne.
« Kearne, ta tête est lourde. »
Amris rit derrière nous et lance une petite pique à son ami :
« C'est lui qui est lourd tout court. »
Le concerné grogne en guise de réponse et je décide d'ignorer les battements de mon cœur qui me prennent en traître en réaction directe avec les événements.Pour mettre fin à la conversation, je leur ordonne d'aller au lit.
Miracle de trois heures du matin, ils m'écoutent et on retourne au lit après une brève accolade.
M'autoriser à penser à elle en citant son nom était devenu, dans le secret de mon cœur, mon objectif le plus simple.
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La Magnificence - Tome 1
FantasíaEirlys veut la retrouver. C'est son unique raison de vivre depuis ses sept ans. Pour ce faire, elle doit traverser des épreuves, toutes plus douloureuses les unes que les autres afin d'entrer dans la Magnificence. Tout porte à croire qu'elle ne peut...