Chapitre 1 · Allan, où es-tu ?

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Au sein de cet espace dédié à l'attente, une atmosphère vide et étrange pèse sur cet homme d'affaires au costume coloré ; sur ce jeune junkie au pantalon trop large ; sur ce quinquagénaire mystérieux au chapeau noir ; sur cette femme maigre ayant un tic à l'œil gauche ; sur cette dame âgée accompagnée d'un chihuahua posé sur ses genoux ; enfin, sur cette quarantenaire aux cheveux châtains, qui se fait appeler par un agent de police depuis son bureau :

« C'est à vous, mademoiselle !»

Elle se dirige jusqu'à l'officier et exclame d'une voix frêle :

« Bonjour monsieur, je souhaiterais signaler une disparition.
- Bien. Pourrais-je avoir plus de détail ? Est-ce un humain ou un animal de compagnie ?
- Un humain. Mon fils. Mon fils a disparu.
- De quand date sa dernière apparition ?
- Il y a une heure. Il était là, à la maison, il venait pour manger. D'un seul coup, je l'ai entendu tomber dans les escaliers. Alors, je m'y suis rivé pour savoir s'il allait bien, mais une fois sur place : rien...
- Quel âge a-t-il ?
- Seize ans.
- D'accord. Des choses se passent mal à la maison parfois ?
- Non ! Absolument pas. Enfin, si. Peu être.
- Et pourrais-je savoir de quoi il s'agit ?
- C'est son père.
- Il est mort ?! Il vous bat ?! Pauvre garçon. Et pauvre vous aussi d'ailleurs. Mes condoléances.
- Qu'est-ce qui vous fait dire ça ? Non, ne tirez pas de conclusions hâtives, il est à l'hôpital. Enfin ce n'est tout de même pas négligeable ni réjouissant non plus.
- Oui je vois. Écoutez madame, ce qu'on va faire, c'est que je vais déjà prendre votre nom. Ensuite, pour ce genre de cas, les ados ça revient souvent avant les vingt-quatre heures, alors patientez, tout va bien se passer.
Votre nom s'il vous plaît.
- Je m'appelle Jenkins. Holly Jenkins.
- D'accord alors écoutez madame Bond. Ce qu'on va faire c'est que si vous n'avez pas de nouvelles de votre cher...
- ...Allan.
- Voilà, donc si vous n'avez pas de nouvelles de lui d'ici-là, revenez demain. D'ailleurs, vous êtes sûre qu'il n'ait pas fugué vers l'hôpital ?»

Holly, d'habitude discrète, se met à hausser la voix et ne passe pas inaperçue :

« Monsieur je crois que vous ne comprenez pas ! Il ne s'agit en aucun cas d'une fugue, il était là, puis il est tombé-
- Madame Jenkins, s'il vous plaît, il y a du monde qui attend, rétorque l'officier en lui coupant la parole, d'un air ennuyé, mais ferme. »

C'est avec le regard vide qu'Holly pousse la porte du commissariat. Elle n'avait jamais connu cette sensation de manque provenant de son fils unique. Alors, elle pleure. Ce sont les larmes d'une mère perdue qui suivent le long de ses joues rosées par le froid d'hiver.

Ce que voit Allan est ce qui semble être un parking à étages. Abandonné. Sans démarcation blanche visible au sol. Sans issue apparente. De nouveau, des néons sont présents afin d'éclairer les lieux. Mais heureusement, cette fois-ci, ils sont calmes, contrairement aux assourdissants de l'endroit précédent.
Donc, ici, le silence règne totalement, sans aucune exception.

Tout ce dont il est question pour combler l'ennui est d'explorer les lieux et de penser. Allan marche et décide de partir d'où il se situe, qui semble être le point le plus inférieur, jusqu'au point le plus haut, et de juger quel endroit sera le mieux pour passer ses moments dans ce parking.

Au bout de plusieurs minutes de déambulation dans ces vastes pièces bétonnées, rien ne sort du lot. Cet étage se ressemble en tout point et n'est doté d'aucun élément en particulier. Avant de décider de monter d'un étage, un papier posé à terre au loin attire l'attention d'Allan. Il s'y dirige d'un pas pressé, le ramasse, et remarque qu'un court texte y est apparent. Il est inscrit : «Left, right, left, right, B, A». Il est également accompagné d'une signature : «Austin». Il se demande alors qu'est-ce que cela doit bien pouvoir dire. Il reste tout de même stupéfait : ce bout de papier insignifiant est le signe que d'autres personnes sont présentes en ces lieux, ce qui dispose Allan dans un réconfort tel que lui parvient l'envie d'embrasser ce morceau si fort que sa cage thoracique se briserait. Action qu'il juge étrange avec du recul et ne l'exécute donc pas. Après tout, quel moindre indice lui prouverait le fait de ne pas être en train de participer à une émission de téléréalité dans laquelle il demeure être la victime ? Comment savoir si l'adolescent n'est pas le pantin, la poupée, le jouet d'organisateurs ignobles ? Il l'ignore. Mais il décide tout de même de rester à l'affût d'une moindre caméra, quitte à paraître aliéné aux yeux de lui-même.

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⏰ Dernière mise à jour : Jun 04 ⏰

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