La légende du Sous

Chapitre I : La menace

 Nuits et jours, durant sept semaines qu'on crût sept ans, vent et pluie ne cessèrent de s'abattre sur le royaume du Sous, plongeant le pays tout entier dans l'obscurité des nuages noirs. Les paysans étaient restés enfermés chez eux, sous leur toit de chaume, étanche qu'à certains endroits, sans pour autant être à l'abri du froid mordant qui les guettaient, et les faisaient souffrir. Ils priaient en famille avec force que leur Dieu fasse arrêter ce supplice. L'orage qui grondait étouffait sûrement leur supplications car Dieu ne fit rien arrêter du tout. Vents et pluies se déchaînèrent encore sept semaines sans perdre en intensité, ou en cruauté, plongeant le royaume du Sous dans une obscurité plus profonde encore, enfermant le pays dans un gel meurtrier. Mais il y avait bien d'autres mal dans ce pays qu'il fallait craindre au-delà du vent, de la pluie, ou du froid car une ombre menaçante planait sur la tête du roi que l'on nommait Evanouss ainsi que sur ses gens.

Son cheval au galop, il fendait la pluie torrentielle qui s'abattait sur lui comme un million d'aiguilles. Il avait affronté le froid du pays, voyageant depuis des jours sur sa monture, sans jamais faiblir à l'envie ou la fatigue. Il se nommait Grand Guide, mage n'appartenant à aucun étendard, aucun pays et il avait un message à apporter au roi de cette contrée qu'il avait traversé durant quatre nuits. Le sorcier courbait le dos pour se protéger du vent en rafale qui le repoussait, et qui secouait avec force sa belle tunique, dont la blancheur éclatante avait été rendue terne par le climat du pays. Parfois il tentait de regarder en avant pour voir s'il reconnaissait l'endroit, mais les gouttes de pluies frappaient ses yeux avec une telle puissance, qu'elles l'empêchaient de savoir la moindre information. Il ne pouvait que prier pour espérer être sur le bon chemin, et bientôt arriver à sa destination. Le sorcier tenait bien fermement les rênes de son destrier, comme si le mauvais temps pouvait l'emporter à tout moment. Le tonnerre déchirait les cieux, et l'orage grondait, mais le voyageur pouvait compter sur le calme de son cheval, qui jamais ne céda à la panique devant les éléments déchaînés. La capuche relevée sur les cheveux, on ne voyait du visage de l'homme que son nez d'oiseau, et sa grosse barbe qui descendait jusqu'à son torse. Vieillard ou jeune ? Nul ne pouvait le savoir. Déterminer son âge en se basant uniquement sur ses traits physiques semblait être une tâche complexe. Ce qui était sûr néanmoins, c'est que nul homme, qu'il soit âgé ou en bonne santé, n'aurait pu accomplir l'exploit qu'il avait réalisé pour arriver jusqu'ici. Mais quand bien même fort résistant au froid, et insensible aux vices que lui procurait la faim, il ne demeurait pas moins exténué, et fragile au cours du temps. Ainsi fut-il heureux de voir les premières pierres noires du château d'Evanouss qui se découpait au travers la brume que formait la pluie battante, et qui annonçaient alors la fin de son périple. Le voyageur s'arrêta pour observer longuement l'imposant donjon qui fendant le brouillard du haut de ses cent trentes pieds, puis il quitta son cheval, et le mena par sa longe avant de trouver un endroit où il pouvait le laisser durant quelques heures. Après quoi, il partit chercher l'entrée du domaine. L'averse le rendant aveugle, il longea les murs vertigineux de la forteresse, et passa autour des épaisses tours vertigineuses. Il trouva sur un côté du château deux sentinelles, habillées de la tête aux pieds de fer, qui gardaient la grande porte. Il s'en alla les rejoindre, l'expression ferme, montrant qu'il était prêt à tout pour parvenir à ses fins. Arriver devant eux, il dit de sa voix de vieillard, mais imposante. " Je suis Grand Guide, et je suis venu demander audience à ton roi, garde.

- Le roi ne reçoit pas, cria presque le soldat pour se faire entendre du bruit infernal que faisait la pluie, passe ton chemin.

- Je suis mage, et j'ai fais long voyage pour venir jusqu'ici. Le temps presse, je dois voir ton roi.

- Ton voyage a été inutile alors, mage. Le roi ne souhaite reçevoir personne, autre que ses amis les plus proches et ses chefs de guerre.

Voyant qu'il n'obtiendrait ce qu'il voulait, peu importe comment il pouvait décrire l'importance de sa mission, l'homme encapuchonné qui prétendait être un mage, décida de jouer de la ruse.