et souviens-toi que je t'attends

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(où, Thomas trouve enfin le courage de rester à la surface)

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"Je t'en veux. Un peu", est la première chose que Thomas entend lorsqu'il décroche

“Juste un peu?”, il réussit à sortir faiblement. La voix de Damien au bout du fil ayant immobilisé tout son corps au point qu'une simple phrase est un calvaire.

“Juste assez. J’aurais aimé être au courant.”

Ça fait des semaines qu'ils ne se sont pas vus, Thomas le ressent fort dans le creux de son abdomen. Il a passé des heures le regard vide sur l'écran noir de son téléphone, attendant sans y croire un signe de vie quelconque de la part de l'autre, tout en se maudissant pour espérer si fort. Lorsque le téléphone s'était illuminé du nom de Damien, Thomas a bien cru que son cœur s'arrêtait. Il n'a réussi à attraper le téléphone qu'au bout d'une éternité, la peur l'empêchant de bouger.

"Je sais. Pardon", il articule mal, sa mâchoire plongée dans du coton.

"J'arrive dans cinq minutes."

Abruptement, le silence lui revient aux oreilles. Sa bouche s'ouvre et se ferme à plusieurs reprises avant qu'il ne saisisse les mots de Damien. Putain de merde.

Un simple coup d'œil à son appartement suffit à lui prouver que rien ne peut être sauvé en moins de cinq minutes. Il souffle, comme si tout le poids du monde s'abattait sur ses épaules, et se résigne à attendre.

Un instant passe où seule la respiration et l'anticipation tremblante se font entendre dans la pièce. Thomas fait tressauter sa jambe sans même y penser. Il est adossé contre le mur qui sépare l'entrée du salon, il ne sait pas vraiment comment réagir face aux phrases de l'autre, et il appréhende le moment fatidique où leurs yeux devront inévitablement se rencontrer.

Il entend Damien arriver sur le palier trop vite, trop lentement. Machinalement il se redresse, sans vraiment savoir à quoi s'attendre.

Il ouvre la porte sur Damien, regard indéchiffrable qui se pose sur lui un moment trop long avant de rentrer dans le corridor. Son épaule frôle celle de Thomas qui frissonne et le suit sans un mot.

Damien se positionne devant la fenêtre, il ne regarde plus Thomas, qui reste planté dans l'embrasure de la porte se balançant d'un pied sur l'autre comme s'il n'était pas chez lui, que du coin de l'œil.

Le malaise de la pièce est étouffant. Thomas sent un rire nerveux monter sa cage thoracique pour se coincer dans sa gorge et former une boule de honte et de remords si grande qu'il ne se sent plus respirer.

"J'aurais aimé être au courant", Damien répète lentement.

"Je sais", Thomas souffle encore, désolé, "Comment est-ce que j'aurais pu te le dire ?"

"Mais j'en ai aucune idée, Thomas, putain. C'est pas mon problème, j'aurais juste voulu savoir plus tôt."

Et la revoilà, la putain de boule de honte qui fait son chemin, agrippant avec des ongles acérés la gorge de Thomas, si profondément qu’il ne pense pas pouvoir la déloger avant un bon moment.

Les mots de Damien sont fatigués, sans aucune colère et pourtant avec juste assez de ressenti pour que sa voix porte. Thomas se braque, essaie tant bien que mal de déloger sa trachée de ce sentiment encombrant. L’autre semble le remarquer et soupire avant de fermer les yeux.

“T’sais quoi ? Oublie ça pour l’instant ; c’est pas pour ça que j’suis venu”, sa tête frappe contre la vitre, il a toujours les yeux fermement clos, comme si la vision même de l’appartement de Thomas pouvait lui faire du mal.

tous les regards, tous les regards de tous les yeuxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant