beauty in death, yoonmin

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La beauté.

 
La beauté était une chose qu'il en était venu à haïr. La beauté, ou l'hypocrisie masquée d'un parfum superficiel. La simple évocation de la chose durcissait les traits de Yoongi ; quand il entendait que les joues roses, la peau pâle et les lèvres rouges de son amant étaient belles. Il n'y en avait pas un qui était passé sans le complimenter dans sa souffrance, le regardant faire un essai de sourire dans ses draps blancs, qu'il agrippait de ses doigts osseux et bleues de ses veines battantes.

Est-ce qu'ils le faisaient par sympathie ? Par pitié ? Ironiquement ?, par dédain ? Le pire était que Yoongi pensait que non. Ils ne le complimentaient pas par impuissance mais réellement car ils trouvaient belle la mort qui se dessinait sur son visage. Et Yoongi les détestait, tous autant qu'ils étaient, qui disaient que Jimin ressemblait à une poupée. Yoongi trouvait qu'il ressemblait à un pantin. Un pantin de la mort.

Et en tenant sa main dans les couloirs, Yoongi se détestait aussi. Parce que lui aussi trouvait Jimin beau. Malgré qu'il sente la mort, et les médicaments.

-On va où hyung ?

-On ira où tu voudras. Yoongi vit le sourire de Jimin illuminer son visage, alors qu'il listait les dizaines d'endroits où il voulait aller. Et puis finalement il arrêta.

-Et si on allait juste chez toi ?

Quand la porte de l'appartement de Yoongi s'ouvrit, Jimin se laissa penser que cet endroit, aussi simple soit-il, lui avait énormément manqué. Tout le temps qu'il avait passé à l'hôpital lui avait appris à chérir les petites choses. Comme la main ferme de Yoongi dans la sienne, et son parfum, qui sentait bon la rosée au printemps.

Quand Jimin l'avait vu pour la première fois, il avait tout de suite su qu'il ne voudrait plus jamais personne d'autre. Ses cheveux noirs, son air de chat grincheux, et son sourire rayonnant avaient piqué la curiosité du brun. Et ils avaient commencé à sortir ensemble, à la fin de l'université, insouciants.

Puis les visites de Jimin à l'hôpital s'étaient multipliées. Visites qui se transformaient en arrêts, puis en séjours. Mais il continuait à dire à Yoongi qu'il y avait toujours eu des problèmes de santé dans sa famille, et qu'il ne devait pas s'inquiéter. Même quand il y passait des semaines. Finalement des mois.

Les médecins disaient qu'ils ne savaient pas ce que Jimin avait. Sa santé ne cessait de se dégrader, il toussait, avec des caillots de sang. Et Yoongi passait ses nuits à son chevet, à l'hôpital.

Aujourd'hui, ils avaient eu une permission spéciale. Jimin semblait se sentir mieux, alors les docteurs l'avaient laissé sortir, une main dans celle de Yoongi. Pour la première fois depuis des semaines, il avait regoûté à des sensations qu'il ne pensait pas lui manquer un jour, comme les herbes sèches de la pelouse sous ses pieds, ou l'odeur que le soleil leur donnait.

Sauf qu'il avait une petite idée de combien de temps il lui restait à sentir cela, mais il ne pouvait pas le dire à Yoongi. Surtout pas à lui.

Alors quand Jimin ouvrit la porte de sa chambre, un peu mal rangée, et qu'il n'avait pas vu depuis au moins un mois et demi, il s'assit sur le lit en silence pendant de longues minutes ; contemplant l'obscurité offerte par les rideaux fermés. Il faisait encore jour dehors, alors Yoongi et lui se regardaient, muets mais déjà trop bruyants.

-Ça m'avait manqué d'être assis là... Lui sourit Jimin. Yoongi lui répondit aussi avec un petit sourire soulignant ses cernes, toujours debout dans l'encadrement de la porte, l'ongle du pouce à moitié rongé. Pourquoi tu restes là...? Viens. C'est chez toi quand même. Le sourire de Jimin encouragea Yoongi à venir s'asseoir à côté de lui. Pourtant, le plus âgé continuait de voir une forme de stress tourmenter son amour. Yoongi le regardait, inquiet, alors Jimin posa tout simplement ses lèvres rouges sur les siennes.

Mine de rien, ils avaient perdu l'habitude de s'embrasser. Yoongi sentit son cœur battre pendant une minute, au moins, avant d'entendre le bruit de Jimin défaisant la large chemise blanche qu'il portait.

-...Qu'est-ce que tu fais ? Lui demanda Yoongi en prenant son visage en coupe. Il observait avec inquiétude les clavicules proéminentes de son amant.

-Ça fait longtemps. J'en ai envie. Lui demandait Jimin, ses grands yeux bruns sondant son visage en attente de signes qui répondraient à son interrogation.

-...Mais...tu es sûr que tu auras la force...de faire ça ? Tu as assez d'énergie...? Et les médicaments, ils-... Jimin posa sa main sur sa joue. Son visage était si doux, ses yeux si aimants, que Yoongi ne chercha pas à continuer.

-Tu ne peux pas me blesser Yoongi...Je veux te sentir au moins une dernière fois.

-Ne dis pas ça. Yoongi passa sa main dans les cheveux de son ange à la peau froide, le tirant contre lui sur son lit froissé.

Les côtes apparentes de Jimin auraient découragé son petit-ami s'il ne sentait pas qu'il n'aurait plus l'occasion de le tenir ainsi entre ses mains avant longtemps.

Alors il en profitait. Il profitait de pouvoir encore tracer la courbe du bas du dos du brun, de pouvoir embrasser son torse et joindre leurs lèvres ; tant qu'il le pouvait.
Yoongi avait étendu le corps de Jimin sur le lit pour limiter ses mouvements, et le brun le regardait tendrement, avec des yeux qui tentaient de lui faire comprendre qu'il n'était pas en porcelaine ; malgré ce que les gens laissaient paraître ces-derniers temps.

Quand les bras de Jimin s'étaient enroulés derrière la nuque de Yoongi, il en avait profité pour mieux détailler son corps. Ses hanches qui se soulevaient fragilement, comme les derniers soupirs qui quittaient sa gorge sans permission. Et même s'il s'en voulait d'avoir mis son corps à l'épreuve, Yoongi n'avait pu résister à la beauté de ce qu'il fuyait depuis tant de mois, à la beauté de la plus cruelle des destinations.

Alors Yoongi se coucha jusqu'à côté de Jimin, le voyant ouvrir les lèvres difficilement.

-Tu n'es pas obligé de dire quoi que ce soit... Jimin lui sourit.

-Tu sais, je suis content que tu aies eu toutes mes premières fois. Jimin caressait son visage, noyé dans ses yeux. Je suis content que ce soit toi avec moi, là, maintenant, et personne d'autre.

-Moi aussi.

Celle qui les regardait par la fenêtre, faux à la main depuis qu'ils étaient là, les laissait dormir un peu, pour la première fois depuis longtemps. Sa poupée aux lèvres rouges se voyait rajouter du temps. Juste un peu, juste assez pour profiter encore de l'herbe sous ses pieds.

Juste un peu.

𝐭𝐢𝐭𝐚𝐧𝐢𝐜, receuilOù les histoires vivent. Découvrez maintenant