Elle était assise à côté d'une fille qui était plus jolie qu'elle.
C'est pourquoi je ne l'ai pas regardée tout de suite.
J'ai tourné la tête vers elle quand son amie l'a présentée elle avait
l'air amer et résigné et j'ai souri un peu
pour me faire pardonner.
Elle a dit son nom, j'ai pas entendu ou écouté j'ai bafouillé le mien et
puis on a changé de conversation parce que au début
des amitiés on ne sait pas trop quoi dire on virevolte
on trébuche,
papillons, d'un thème à l'autre
on se garde sous le coude la possibilité d'approfondir plus tard
les thèmes recousus
ah tu fais quoi toi ?
Ah et tu dors sur le campus ?
ah j'en ai entendu du bien
c'est cool
et c'est décousu et c'est gênant et c'est bien.
Elles rigolaient fort parce qu'elles s'étaient perdues en chemin
et c'est vrai que sur le visage de la fille moins jolie,
je voyais qu'elle était perdue,
et même si je ne lui trouvais rien
de beau,
je trouvais que cet air déboussolé lui allait pas mal.
Enfin j'avais vu de pires accessoires.
Et donc elles rigolaient fort et c'était marrant
parce que l'une faisait beaucoup de bruit
et l'autre pas du tout,
mais comme j'étais occupée à avoir l'air occupé,
je ne savais pas laquelle exactement avait un rire comme du vent
et l'autre comme une tempête.
Elle était assise à côté d'une jolie fille
et j'ai parlé à la jolie fille qui s'appelait
Lucie ou Lola,
quelque chose comme ça, une peu frivole ou dramatique,
un nom qui me faisait penser à des jupes en lin
un éventail avec des plumes fantaisies
et de la poussière sur une vieille croix.
Elles rigolaient et elles se tordaient comme
les mannequins gonflés des aires d'autoroute,
désarticulées poupées fabuleuses,
je percevais leurs ruades du coin de l'oeil
et je souriais de les voir rire
sans comprendre le fil de la conversation,
je ne me souviens plus pourquoi elles riaient maintenant,
ça ne devait pas être bien important.
Enfin les choses commencent et elles ont vite une fin :
le cours commence le rire s'arrête
et je lance un regard en coulisses pour mes deux actrices
qui ont cessé de s'esclaffer théâtralement.
La voisine de Lola me regarde,
regard d'esbrouffe,
la première goutte sonne comme un rire qui s'arrête.

VOUS LISEZ
le ventre de Charybde
Aléatoirequelque chose de tangible en attendant de créer du réel. ça ne s'adresse à personne, cette histoire. C'est comme ranger au fond d'un vieux placard inutilisé quelque chose de trop neuf. Du stockage voilà. " A 17, 26 et 36 ans( et sept mois ), comment...