Chapitre 1

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15H00, Lostriver au Nevada

- Madame Murphy ce n'est plus possible. Votre fille dépasse les bornes.

- Je sais que c'est impardonnable mais ma fille sera se racheter comme il faut.

- Comme les quatre dernières fois ?

Voilà que ma mère se fait sermonner pour la cinquième fois de l'année. Et prochainement, ce sera moi, en sortant de ce bureau. C'est encore une nouvelle pulsion que je n'ai pu contenir, pourtant je fais tout pour ne pas faire face à ce sentiment de plaisir qui me terrifie. Mais en éclatant le nez de John, mon prof d'art, j'ai ressenti ce frisson qui me tourmente tant. Je n'ai pas envie de dire « je me sens différente », mais je ne pas le nier, c'est le cas. Je ressens du plaisir dans la douleur des autres. Je n'aurais voulu jamais ressentir ce besoin de chercher le plaisir dans la souffrance, mais c'est comme une addiction. Je ne peux pas m'en passer. Je fais tout pour contenir cette part de moi, mais je ne pourrais pas la cacher éternellement, la preuve, je suis là avec ma mère dans le bureau du proviseur.

Nous pouvons essayer de revenir dans mon enfance pour comprendre d'où vient cette envie, mais ce n'est pas très pertinent. La première fois que j'ai ressenti ce besoin, c'est lorsque j'étais au collège. Une fille de ma classe s'était moquée de moi et m'avait jeté le contenu de mon assiette de cantine en plein visage. Je n'étais pas une élève bagarreuse ou violente, mais à ce moment-là je n'avais qu'une seule envie, la détruire. Alors j'ai tout simplement pris mon plateau en main et je l'ai éclaté une vingtaine de fois sur le visage de cette fille. La scène était tellement violente que certains élèves ont vomi leurs repas. Ce sont trois dames de cantine qui m'ont arrêté par peur que je tue cette fille. Je l'avais tellement frappé que, je pense, même ses parents ont eu du mal à la reconnaître. Mais le plus important dans cet événement, c'est ce que j'ai ressenti pendant que je l'ai frappée.

Des frissons, une explosion émotionnelle, une pure extase digne d'un orgasme et ça m'a terrifié. J'étais jeune, je n'avais pas encore compris que ça allait être le début d'un enfer émotionnel. Par la suite tout a empiré, j'avais envie de ressentir ce plaisir encore une fois et plus encore sans jamais être rassasiée.

Face à mon excès de violence, mes parents m'ont emmené voir un psychiatre. Je n'ai pas dit grand-chose sur ce que je ressentais parce que j'avais honte, alors on m'a tout simplement diagnostiqué TEI, trouble explosif intermittent. On m'a depuis prescrit des médicaments pour gérer mes émotions et éviter cet « excès d'impulsivité ». Mais en fait, je ne suis pas impulsif, du moins très peu par rapport aux personnes ayant vraiment ce trouble. Je ne peux rien dire, car je ne veux pas parler de ce que je vis, alors j'accepte les médicaments en espérant que cela agisse sur ce que je ressens réellement. Même si je n'ai aucune idée de ce que c'est.

D'ailleurs, on peut constater que les médicaments marchent super bien, étant donné que je connais plus le bureau du proviseur que ceux de mes profs.

- Nous pouvons trouver un arrangement, n'est-ce pas monsieur le proviseur ? Je suis sûre que votre femme ne sera pas ravie de savoir où vous mettez votre argent tous les week-ends ?

- Vous me menacez, Madame Murphy ?

Oui, ma mère te menace et tu vas forcément craquer pour ne pas briser ton mariage. Elle est bien plus forte que toi à ce jeu. Et je la remercie pour ça, même si un petit pot de vin, aurait été plus rapide.

- Voyez-le comme un avertissement. N'oubliez pas qui je suis.

- Bien, je crois qu'on va arrêter cette conversation ici. Ça passe pour cette fois-ci encore, mais il n'y aura pas de prochaine fois.

Délicieuse RoseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant