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Si d'un côté Mélodie ignorait encore ce qu'elle allait faire de sa vie et qu'elle était bien loin de se douter de ce que sa mère préparait pour elle, du côté de l'hémisphère nord, c'était l'effervescence dans une petite banlieue parisienne, plus précisément dans une petite taverne.
Autour de deux petites tables carrées et de plusieurs coupes de chocolat liégeois, Mélanie, Bérengère et Émile, ainsi qu'Olivier et sa maman se trouvaient là, réunis. Comme il faisait une chaleur torride, ils étaient regroupés sur la grande terrasse du restaurant. Malgré l'heure tardive, bien que le soleil était couché, les dernières lueurs du jour tardaient à s'effacer, car c'était l'été et les journées s'allongeaient.
S'ils étaient là, tous gaiement assemblés autour de ces deux dessertes, c'était pour fêter l'obtention du bac. En effet, tout le monde était content, car Émile et Olivier venaient de décrocher leurs baccalauréats. Les deux lycéens s'étaient rendus à leur établissement un peu plus tôt dans l'après-midi accompagnés de leurs mamans et avaient découvert leurs noms affichés sur les listes des heureux reçus. C'était ainsi l'euphorie, et pour fêter ces deux joyeux coups de théâtre, Bérengère s'était proposée de tous les inviter dans la petite brasserie de leur quartier. Après avoir obtenu son concours à l'école d'infirmiers, Émile venait d'avoir son bac scientifique avec mention très bien, avec en prime les félicitations du jury. Son ami Olivier avait également réussi son examen scientifique, mais cependant sans mention particulière ... ce qui bien sûr ne l'empêchait pas d'être quand même très heureux ! L'exultation, la fierté et quelques éclats de rire rythmaient ainsi cette mémorable soirée dans ce chic petit buffet.
Néanmoins, bien que cette atmosphère presque familiale regorgeait de liesse à profusion, un infime voile de tristesse se reflétait sur le visage d'Émile. Le jeune homme qui allait presque avoir dix-huit ans dans quelques mois maintenant, était resté un enfant. En effet, il avait gardé, à son plus grand désarroi, son indétrônable face de bébé, et cela en dépit de son âge, de son alimentation qu'il avait dû enrichir avec l'aide d'une nutritionniste, et aussi malgré le sport qu'il avait intensivement pratiqué avec sa mère. Émile n'avait plus grandi depuis et avait gardé ses petits un mètre soixante-trois. Sa voix était restée la même que quand il avait commencé à muer. Seuls quelques abdos, quelques muscles aux épaules, aux bras et aux jambes avaient fini par se dévoiler grâce au fruit de ses longues heures de travail et d'efforts physiques. Mais sans plus. Pas de moustache ni de barbe, pas le moindre poil sur le torse et sur le visage. Rien. Émile était un jeune homme dans un corps de collégien. En dépit de ses réjouissances, non seulement pour lui mais aussi pour son ami, Émile se sentait très malheureux, surtout quand il regardait Olivier à côté de lui qui était si robuste, si viril... si costaud qu'il pourrait presque le soulever et le porter dans ses bras !
Notre jeune diplômé, bien que se sentant très mal dans sa peau, surtout en présence de son meilleur ami, regorgeait cependant de beauté... une majesté dont il était le seul à ne pas remarquer, une élégance qui grandissait avec lui au fil des années. Son visage de poupin, halé, joliment parsemé de taches de rousseur était illuminé par un sourire doux et charmant, tandis que ses yeux d'un bleu pur étincelaient comme des perles derrière ses lunettes. Ses cheveux d'un blond orangé lisse et splendide étaient toujours taillés comme à l'accoutumé depuis qu'il fréquentait l'école, avec une habituelle raie sur le côté.
