Suite 3 : Un nouveau chemin.

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Nobles, marchands et paysans, tous avaient assisté à la scène, mais personne n'osait croire ce qui se déroulait sous leurs yeux. Comment pouvait-on concevoir que cet enfant miséreux était en réalité la progéniture de Sa Majesté, et que le souverain était justement à sa recherche ?

La foule ébahie ne put qu'observer le petit garçon, autrefois traité de tous les noms, se faire escorter par le général Gatgar en personne. Celui-ci grimpa à l'intérieur du carrosse d'une grande enjambée, suivi de la femme qui l'accompagnait. Sa Majesté Claude fut le premier à reprendre la route sur son cheval, éclairant la voie de ses soldats qui le suivi aussitôt. Une fois l'escorte de Sa Majesté hors de vue, l'animation reprit de plus belle.

"C'est incroyable, je n'arrive pas à croire mes yeux."

chuchotèrent les habitants entre eux.

"Vous l'avez vu aussi ? Le jeune garçon à la chevelure coton. Si j'avais su, je lui aurais laissé acheter mes poissons de lune."

"Pareil pour moi." Renchérit l'autre.

Les discussions animées se multiplièrent, mêlant étonnement et réflexions sur cet événement inattendu qui venait de se dérouler. C'est alors que sorti de l'ombre un curieux personnage portant un masque en forme de bec, posté silencieusement. Il disparut aussitôt de la scène, échappant à la foule ayant à peine remarqué sa présence.

* * *

En chemin, la chaleur avait commencé à faiblir. Les rayons du soleil parvenaient de moins en moins à percer cette épaisse couche d'herbe verdoyante à mesure que les chevaux s'enfonçaient dans les bois. La période de grande sécheresse à toujours été un phénomène naturel présent sur l'étendue du territoire de Rouge-Joyaux. Comme toutes les autres saisons, cette bouffée de chaleur annonçait l'arrivée des pluies de sel qui ne duraient que quelques jours mais qui lorsqu'elles se mettaient à fondre, plongeait la ville dans un état d'hibernation. Les pluies de sel faisaient renaître la terre, les champs, les fleurs ainsi que tout les êtres vivants.

Les chevaux durent tout de même ralentir en raison de l'état de la route qui soulevait un nuage de poussière à l'intérieur de la charette, ce qui devrait être inconfortable pour sa jeune Altesse à l'intérieur. Les cavaliers n'eurent d'autres alternatives que de modérer leur allure, tandis que d'autres gardes, épuisés, cherchaient du réconfort près des arbres secs bordant le chemin, offrant leur ombre maigre pour un peu de répit face au soleil. Contrairement aux chevaliers qui semblaient ne pas être affectés par la longue traversée sous le soleil d'aplomb, rien d'étonnant de la part de la garde rapprochée de l'empereur. Leur posture révélait une discipline rigide, ainsi que la manière dont ils tenaient les rênes et ajustaient leur selle montrait l'expertise qu'ils possédaient. Leurs regards déterminés balayaient les alentours, toujours en alerte, prêts à répondre au moindre signe de danger. Ces hommes et femmes d'élite étaient façonnés par des entraînements plus intensifs qu'un simple coup de soleil. Ils formaient une muraille vivante autour de la puissance impériale, prêts à défendre l'honneur de Rouge-Joyaux.
Pendant ce temps, le prince Noah, accoudé du côté de la fenêtre du calèche, observait le paysage défiler sous ses yeux, son esprit ailleurs : "Cela fait un moment maintenant que nous avons quitté les montagnes du dragon de feu..." songea intérieurement le jeune garçon en observant par-dessus la fenêtre, les plaines disparaître lentement à l'horizon. À vrai dire, tout s'était passé si vite qu'il avait à peine eu le temps de réaliser. Dans son esprit, il revoyait encore l'Empereur brandir son épée à une vitesse fulgurante droit devant lui. À ce moment précis, s'il n'avait pas su faire preuve de sang-froid, il aurait sûrement perdu son œil gauche ou fini exécuté. Inconsciemment, il serra les poings absorbé par les réflexions concernant les événements récents et l'attitude de cet homme, les questions tourbillonnaient dans son esprit, cherchant des réponses à l'énigme de sa présence aux côtés de sa majesté après huit années d'absence. Il fronça les sourcils d'un air grave tout en s'adressant à sa nourrice :

- Cet homme, sa majesté. Loin du fait que je sois son fils. Pourquoi m'a-t-il emmené, exactement ?

Car malgré son jeune âge, Noah n'était pas dupe. Son instinct lui disait que cet homme avait bien plus en tête que de perdre son temps à la poursuite d'un quelconque fils illégitime. Le simple fait de repenser à son regard glacial le terrifiait. Non, il n'avait rien d'humain. Conclu Noah à l'expression grave sur son visage, lorsqu'une une voix dans la cariol, interrompit ses réflexions.

- Ne vous enfaite pas. Sa majesté ne nous fera aucun mal.

cherchant à apaiser les inquiétudes, elle répondit avec assurance. Tandis qu'un sourire bienveillant se dessina sur son visage, tentant de lui apporter un peu de réconfort.

Elle le savait aussi, Noah avait toujours été un garçon très mature pour son âge. C'était un garçon intelligent qui saurait se débrouiller pour sortir de n'importe quelle situation compromettante. Cela dit, il serait dommage qu'il grandisse trop vite. Après tout, il n'était encore qu'un enfant. Il devait apprendre à vivre avec insouciance, à rire et pleurer en savourant les petits plaisirs de la vie. Chose qu'elle n'avait pas pû lui offrir jusque-là en raison de leurs conditions difficiles. Peut-être que ce nouveau tournant lui permettrait de profiter et de voir la vie autrement.

- Nourrice, je n'ai pas pu vous offrir le peigne que je voulais. Est-ce que vous m'en voulez ?

Interrogea Noah en frottent ses mains contre la manche de ses vêtements, plutôt anxieux.

- vous êtes vraiment un gentil garçon. Fit-elle tendrement.

-Mais j'ai déjà tout ce qu'il me faut. Votre présence me rassure ainsi que vous savoir en bonne santé est ce qui me rend la plus heureuse au monde.

À ce mots touchant, Noah fit une moue boudeuse sentent ses joues se réchauffer.

- Pourquoi faut-il que vous disiez ce genre de choses pour m'embêter.

Sa réaction fit éclater de rire sa nourrice, trouvant qu'il était beaucoup trop mignon en faisant cette tête.

- C'est la vérité, mon cher Noah. Mais je devrais maintenant vous appeler" Votre Altesse", lui fit observer la jeune femme.

Mais cette remarque lui fit l'effet d'un un pincement au cœur. Leur monde venait à l'instant de se séparé par des titres et des attentes, et bien que cela ait toujours été ainsi, cette prise de conscience le toucha profondément.

- De plus, vous n'aurez plus à travailler aussi durement pour un enfant de votre âge. Désormais, j'aimerais que vous ne pensiez qu'à votre bonheur.

Mais Noah demeura silencieux, puis s'adossa à son siège lorsqu'une brise fraîche lui souffla au visage. Le vent avait commencé à se rafraîchir et il ferma les yeux quelques instants, pensant que cela ne durerait pas longtemps avant de se laisser emporter dans un sommeil profond. Après s'être tant surmené, son corps épuisé avait besoin de repos, et dans cet instant, il succomba à la fatigue, laissant derrière lui les préoccupations et les questionnements, au moins pour un temps.

«Il s'est endormi», pensa-t-elle, observant doucement le visage paisible du jeune prince.

Un sourire bienveillant flotta sur ses lèvres alors qu'elle laissait sa tête reposer sur son épaule. Dans le calme du carrosse, bercés par le mouvement régulier du véhicule et la douce brise qui s'engouffrait par les fenêtres entrebâillées, ils plongèrent tous deux dans un repos bien mérité.

Bourgeon à la belle chevelure d'or. Où les histoires vivent. Découvrez maintenant