lettre 2

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Je n'avais pas prévu de t'écrire aussi tôt. Avant que tu figures ici, j'avais une liste très longue de personnes auxquelles écrire. Mais la vie est faite de petits changements et si je ne t'écris, pas je meurs. E, cette lettre est pour toi. 

Je ne pensais pas qu'une personne qu'on connait à peine puisse autant nous faire mal avec si peu de pouvoir, mais c'est ton cas. Tu es ce genre de personne qui se nourrit de l'attention, qui vit avec le besoin qu'on fasse des montagnes d'un rien et que tout soit un drame cinématographique. Quand je t'ai rencontré, j'ai cru à une forme de signe. Tu m'avais fait découvrir un pan de la fac et aujourd'hui, presque huit mois après, on se retrouvait dans la même promo. Tu es devenu.e mon ami.e avec une facilité déconcertante. Peut-être que c'était par solitude mutuelle. Toujours est-il que tu as commencé à me parler et j'ai fait de même. Tu es la première personne dont j'ai raconté la vie à mon entourage d'ailleurs. Puis, parce que je t'avais toi, je me suis ouvert aux autres et tu ne l'as pas supporté. Je crois que depuis le début tu me voyais comme ton faire-valoir. Un mec pas super intéressant, timide et qui découvre le monde universitaire. Actuellement je cherche encore ce que les autres ont trouvé en moi pour me sortir de ton ombre. Mais il faut croire qu'ils ont vu plus en moi qu'un simple moyen de se faire draguer.

Et puis il y a eu cette soirée chez toi. Celle où ça a vraiment changé, où tu as fait l'erreur fatale de me présenter Julien. Je suppose qu'au début ça partait d'un bon sentiment: tu voulais me prouver qu'il était gentil (et puis, soyons honnête, tu voulais encore un mec à tes pieds). Le problème, c'est que Julien m'a plu et je lui ai plu aussi.  Le problème s'est qu'il n'était pas intéressé par toi. Le problème, c'est  que n'importe qui l'aurait vu. Le problème c'est que tu l'as vu et tu n'as pas aimé que je n'ai pas besoin de toi pour avoir tes miettes.  Le lendemain tu as aussi essayé de "l'avoir" mais certaines personnes voient clair dans ton  jeu et n'ont pas envie d'y jouer. 

Puisque tu n'avais pas le contrôle sur Julien dans ma vie, tu as essayé de me rendre jaloux avec le mec au parapluie. Je t'en ai voulu cette nuit là, j'ai beaucoup pleuré. Pas tant parce qu'il me plaisait mais parce que tu t'es servi.e de moi. Tu m'as utilisé comme un prétexte pour tenter de flirter avec. Je me suis demandé comment on pouvait être aussi égoïste pour faire ce genre de coup à "son ami". Pour ça, j'ai décidé de te pardonner parce que je n'ai pas envie de t'en vouloir pour quelque chose d'aussi futile. 

Là où tu as définitivement tout gâché, c'est les deux semaines qui ont suivi... Celles de ta fameuse pause des réseaux sociaux qui devait durer un mois (le onze novembre est dans deux semaine soit dit en passant. Tu sais, la fameuse date que tu ne dérogerais pas). Tu t'es donc retrouvé.e isolé.e de tout notre groupe d'amis puisqu'on partage tout. Par la même occasion tu t'es également mis.e à bosser davantage à l'association de la fac ce qui fait que nos sorties de groupe se sont faites sans toi. Mais plutôt que blâmer son attitude ou ses choix, tout ça s'est répercuté sur nous et le fait qu'on ne te parlait plus. Soit. On a mis en place des choses pour toi mais la dynamique sans toi a une vague de bienveillance et d'amour que tu arrives à polluer seulement par ta présence. Tout le monde a progressivement compris quelle sorte de personne tu étais: un vampire; tu prends toute l'énergie des autres, tu prends la place dans son entièreté, tu parles de toi comme un disque rayé qui tournerait en boucle. Assez drôle pour une personne "hypersensible et sur empathique".

Le clou du spectacle à mes yeux, celui où j'ai cru que j'allais sincèrement exploser et te dire toutes les horreurs qui me passaient par la tête, c'était la soirée de mercredi. J'avais invité Alphonse, c'était très important pour moi et j'appréhendais notamment parce que tu étais là.      Eh bien ça n'a pas manqué. Tu m'as posé un lapin, seul, une heure avant la soirée, à quarante minutes à pieds du lieu, trois sacs à ma charge. Là encore, c'est julien qui m'a sauvé la mise. Alors quand on l'a invité et que tu as vu qu'on s'amusait tous mieux quand  on s'éloignait de toi, c'était insupportable, pas vrai?

J'étais tellement fâché, tellement blessé, j'aurais voulu fondre en larmes et crier. Tu as passé toute la soirée à ramener la moindre chose à toi. Tu es d'ailleurs lae seul.e qui n'a rien apporté ni à manger ni à boire mais qui s'est bien servi.e notamment en alcool et en une substance un peu moins légale. Mais ça n'était pas suffisant alors tu as décrété qu'il fallait nous faire réagir (en mal) quant à notre relation à moi et Julien. Le plan c'était de nous prendre chacun notre tour pour nous parler. Parler de choses que tu ne connais pas comme l'amour, c'est un truc que t'aime faire ça. Ne parlons pas non plus du stalking sur ton ex toute la soirée ni même des moments où tu boudais parce qu'on ne te vouait pas un culte. Tu as aussi beaucoup apprécier faire croire que tu avais contribué au cadeau de mèches roses. Te plaindre toute la soirée aussi ça devait être amusant. Bref, quand tu es parti, plus tôt, c'est là qu'on s'est tous mis à respirer. 

Avec toi chaque jour est une crise, une scène sur laquelle nous devons prendre des rôles et c'est ça qui me fatigue et que je ne te pardonne pas. C'est ce besoin constant d'être plus, de briller plus fort, de voler l'amour et l'attention des autres pour tes petits problèmes d'égo. Tu vampirises tout, tu prends toute la joie et tu l'arraches à ceux qui t'entoure. Et je ne sais pas si j'arriverai à te pardonner pour le fait que tu m'ais utilisé consciemment.

Le problème n'est pas toujours les autres E, parfois il s'agit aussi de se regarder dans un miroir pour autre chose que mettre trois tonnes de gloss et cinq couches de fard à paupière.

Je te souhaite de changer en bien.

-Cha

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