OKE

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1.1

"Bien. Tout comme je ne suis pas en mesure de vous affirmer ce qui me motive à écrire, alors n'espérez pas non plus qu'en lisant ces lignes, j'ai en tête quoi vous raconter. Peut-être devrais-je commencer par me présenter ? Mmm... ah, j'y réfléchis. Pas que cela me déplaise, non, loin de là. Juste que je me demande, parmi les milliards de lecteurs (passionnés de ma majestueuse personne) qui baveront avidement ces pages, combien seront dignes de détenir tant d'informations cruciales sur ma personne ? En même temps, en y pensant, il est tout à fait normal que le monde sache qui je suis, enfin, et que je m'occupe de ma propre biographie tant que je suis encore en vie, n'est-ce pas ?

Je suis né, enfin, j'ai été expulsé de mon vaisseau un 14 février. Celui de l'année 1998 précisément. À la grande et totale ignorance de l'humanité qui jusqu'à lors (pour ne pas dire jusqu'à maintenant) ne s'était nullement rendu compte qu'après A. Einstein, le génie s'était matérialisé sous forme humaine dans un petit village perdu quelque part dans l'Afrique de l'Ouest. Et oui, je suis noir. Sexy, n'est-ce pas ? Et vous me demanderez en quoi cela est sexy d'être noir, et je vous répondrai qu'en vrai, il n'en est peut-être absolument rien, mais du moment où j'en ai décidé ainsi, l'humanité... non, l'univers entier doit s'y conformer. Voilà ! Donc, à ma naissance, la logique bancale des humains imposait qu'on me tague le prénom Valentin (brrr). Ma génitrice, qui était censée avoir atteint la ménopause depuis l'ère préhistorique, s'était retrouvée enceinte. Du coup, j'ai été condamné à porter ce second prénom Gabriel (plus chic que le premier). J'étais le 4e et dernier né (Dieu merci). En y réfléchissant maintenant, l'idée d'avoir à m'occuper d'un benjamin après moi, au vu des calvaires qu'enduraient mes aînés face à moi et pour moi... non merci, j'aurais préféré la guillotine. Au pire, je l'aurais abattu par "accident" (version officielle offerte aux médias). Je suis né avec bon nombre de talents rares qui me distinguaient des autres humains, dont celui de me faire passer à merveille pour un surdoué capricieux (imitant mon frère Michael-B). Ce qu'évidemment je n'étais pas. Surdoué capricieux, certes, taré capricieux ? Ah non. Nous y reviendrons plus tard. En 2003, l'année de mes 5 ans, nous avons aménagé (selon moi) à Auckland (Nouvelle-Zélande). Ce n'est que bien plus tard (0,4 milliseconde après avoir mis les pieds dans l'appartement) que j'ai compris que ce n'était pas un déménagement qui avait été effectué, mais juste un retour au bercail. Et jusqu'à aujourd'hui, aucune envie ne m'est venue de savoir pourquoi 5 ans de mon existence se sont déroulés en Afrique de l'Ouest. Pas que cela ne m'intéressait pas, non ! Juste que par instinct je sentais qu'il ne fallait pas fouiller cette partie de ma vie dans l'espoir de déterrer quoi que ce soit. Ah oui, j'oubliais de mentionner, le retour à Auckland s'est effectué sans ma mère. Et le départ de cette ville la première fois avait été causé par la disparition de mon géniteur. Donc, pour résumer, je n'ai pas connu mon géniteur (tragique ? Mais non), et j'ai une très vague image vivante de ma mère. Il m'arrive très fréquemment de prendre 5 à 6 heures par an pour analyser attentivement et avidement leur portrait dans l'espoir de me remémorer quoi que ce soit. Et depuis environ 10 ans que je me livre à cet exercice puéril (d'après Raphaël-P), soit après 60 heures d'analyse, ainsi l'équivalent de 2 jours et demi, je n'ai pu conclure que :
1) Moi et Michael sommes les portraits crachés du paternel. Urielle et Raphaël, ceux de la mère.
2) La madre et le padre ont entre eux une certaine air de ressemblance. Très vague, mais certains traits de leur visage semblent être identiques et peuvent ne pas être remarqués que par des aveugles... en bref, la quasi-totalité des humains.
3) Plus ces détails de ressemblance entre mes géniteurs captivaient mon attention, plus je jurais que leurs portraits n'étaient pas des photographies authentiques. Comme si leurs images respectives avaient été retouchées.
4) Plus l'analyse de ma famille m'absorbait, plus les heures qui suivaient dans la journée, j'étais sujet à des sensations de déjà vu. - Cette bibliothécaire qui hurle... non, beugle, de lui rapporter un livre emprunté, chose que j'aurais juré déjà avoir faite.
- Ce véhicule, une jeep Grand Cherokee noire, conduit en sens interdit, immatriculé ******, qui m'éclabousse (sa mèeeere à celui-là), événement que j'aurais juré pourtant avoir anticipé en évitant instinctivement cette avenue.
- Cette vieille sans verre (allez savoir pourquoi), promenant son caniche qui se met à l'aise sur la roue arrière de la jeep qui s'est garée près de la bibliothèque. Avec l'ado qui la conduisait entrant dans la bibliothèque, je ne sais pour quoi faire. - Miss Johannes Kepler qui traverse la rue (en marchant ou en sautillant ? En tout cas, drôle de démarche) pour se serrer à moi, simulant un flirt, et son ex, une autre espèce d'ado, William Jack (fils à papa d'un Lord Wilfried Jack... je ne sais plus), qui nous observe d'un œil plus noir que mes cafés matinaux derrière son journal, assis au café-bar juste en face de la bibliothèque avec ses deux majordomes (l'un aurait suffi).
- Mlle Johannes Kepler avec son accent d'anglaise de la haute bourgeoisie qui remarque la tache d'éclaboussure sur mon pantalon et s'exclame :

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⏰ Dernière mise à jour : Nov 12, 2023 ⏰

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