Chapitre 2

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Suite à la journée de la veille, je n'avais plus trop envie de sortir. Les images me revenaient sans cesse dans ma tête, encore et encore, sans jamais s'arrêter. Je commençais à me rendre compte que je venais de faire une chose horrible. Ma mère me traitait tout le temps de monstre, et je me dis à ce moment-là que si elle venait à l'apprendre, elle dirait à tout le monde qu'elle avait raison et les autres auraient peur de moi. C'est pour cela que j'ai décidé de ne rien dire ; personne ne devait le savoir, pas même mon grand-père.

Pendant les jours suivants, j'ai essayé de paraître le plus naturelle possible. J'allais dans la forêt mettre des fleurs sur la tombe de mes louves et ensuite je criais le nom de Demone, mais il ne répondait jamais. J'ai commencé à me dire que tout cela était de sa faute, que je n'aurais jamais dû lui faire confiance.

"Pourquoi je lui ai montré cet endroit ?" commençais-je à me demander. "Mais ce n'est pas de ma faute, il avait l'air si gentil. Avait-il une raison pour faire ce geste ? Est-ce que sa famille était en danger et devait-il le faire ? Je ne saurais probablement jamais la réponse. Tout cela est passé, je ne peux pas retourner dans le passé."

Après avoir passé la journée à penser, à pleurer et à crier un nom d'une personne qui ne reviendrait jamais, je rentrai chez moi en faisant mine de rien, avec ce grand sourire. J'avais envie de hurler que je n'en pouvais plus, que je regrettais de les avoir tués, mais qu'ils avaient commencé avant. Je voulais tellement me libérer, mais je ne pouvais pas. Je savais que si je le disais, tout le monde disparaîtrait. Si on le découvrait, je serais définitivement un monstre. Je me demandais pourquoi je devais vivre cela ? Pourquoi à moi ? Pourquoi devais-je autant souffrir ? Qu'avais-je fait pour mériter cela ? Est-ce que les autres enfants vivaient la même chose ou était-ce juste les démons ? Tant de questions, mais aucune réponse. Âgée d'à peine un an et devant vivre le pire des tourments, je commençais à me demander si le monde n'aurait pas été mieux sans ma naissance.

Les jours passèrent et un mois s'était écoulé. Je ne pouvais toujours rien dire ; cela devenait de plus en plus compliqué de garder le silence. À un moment, je me dis que je pouvais toujours raconter l'histoire de mes louves à Nouna. C'était la dame qui s'occupait de tout le monde, étant la personne la plus âgée ; elle comprendrait peut-être. Nouna était une belle personne, tant à l'extérieur qu'à l'intérieur. Toutes les personnes de la maison, elle les avait recueillies, malgré qu'ils étaient des voyous. Avec ses longs cheveux roux et sa grande force, les gens avaient peur d'elle, mais c'était une personne adorable. J'attendis que tout le monde parte chercher du bois pour être seule avec elle et pouvoir lui parler. On marchait tout en ramassant du bois.

"Nouna," dis-je soudainement, "dis-moi, il se passe quoi après que quelqu'un ne respire plus ?"

Les yeux de Nouna s'écarquillèrent. Elle posa son sac par terre, s'assit à côté en me faisant signe de venir m'asseoir avec elle. Je me posai juste à côté d'elle et lui répétai ma question. Sa main vint se poser sur ma tête ; avec un sourire chaleureux et apaisant, elle me caressa la tête.

"Que s'est-il passé pour que tu me poses cette question ?" me demanda-t-elle toujours avec ce sourire.

Je restai longtemps plongée dans son regard. J'étais tellement obnubilée par le simple fait d'avoir l'amour de ma mère que je n'avais pas vu que d'autres personnes m'aimaient réellement. Je commençai à lui expliquer ma rencontre avec mes louves jusqu'au jour où je les ai retrouvées dans une mare de sang dans la grotte. Plus je continuais mon récit, plus les larmes montaient à mes yeux. Toutes les scènes de cette nuit-là tournaient en rond dans ma tête. Je regardai Noona dans les yeux, me demandant si je devais continuer. M'aimerait-elle toujours après ça ? Des larmes de plus en plus grosses coulaient de mes yeux ; j'avais de moins en moins de mal à respirer, mon corps tremblait, je me mis en boule en criant que je voulais que cela s'arrête. Je ne sentais plus rien autour de moi ; j'étais dans le néant. J'entendais Noona m'appeler, mais c'était comme si elle était loin, très loin. Je commençai à répéter en boucle que je ne voulais pas tout ça, que tout cela est à se méprendre, que je ne suis pas un monstre.

L'enfant MauditOù les histoires vivent. Découvrez maintenant