Chapitre 3

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Alors que Rachel descendait les escaliers dans le but de rejoindre son aînée dans le salon, une valise à la main, son humeur maussade ne fit qu'empirer davantage. Assis sur le canapé, à côté de Taylor, Lucas tenait fermement les mains de la chanteuse au creux des siennes. De toutes les scènes possibles, celle-ci rentrait dans celles que Rachel ne voulait pas voir en se réveillant le matin. Un puissant sentiment de dégoût s'empara de ses tripes. Elle se racla la gorge, signalant ainsi sa présence aux deux tourtereaux. L'instant suivant, Taylor se séparait de son petit-ami en mettant un peu de distance entre leurs deux corps.

Elle n'avait jamais aimé se montrer démonstrative en public. Il y avait là quelque chose qui la gênait, sans qu'elle ne sache pour autant mettre le doigt sur quoi. Nombreux avaient été ses petits-amis à lui avoir fait le reproche. Parfois, Taylor se disait même que c'était peut-être la raison pour laquelle elle ne savait pas les garder auprès d'elle. Il fallait dire que toutes ses relations amoureuses avaient mal finies jusqu'ici.

- Hey, salut Rachel. Tu vas bien ?

Lucas tentait, encore une fois, d'être gentil et chaleureux. Mais ces mots lui semblaient vides de sens depuis qu'elle l'avait entendu se plaindre de sa présence, la veille. Les traits de l'adolescente se tirèrent et elle croisa les bras en s'appuyant contre le chambranle de la porte, sa valise posée à ses pieds.

- On va enterrer ma famille demain, comment veux-tu que je me sente ?

Le ton glacial de Rachel fit froid dans le dos de Lucas. Taylor, qui n'avait pas lâché Rachel des yeux, reporta son regard sur ses pieds, peinée. Bien sûr que la jeune fille se sentait mal. C'était aussi son cas. Au plus l'enterrement approchait et au plus Taylor sentait son moral en prendre un coup. La chanteuse avait l'impression de lutter contre des flots déchaînés, tentant ainsi d'éviter de justesse la noyade. Elle n'avait aucun mal à imaginer sa cadette ressentir la même chose.

- On y va ? demanda cette dernière à son attention.

Taylor soupira. Elle reporta son regard sur l'adolescente avec une pointe de culpabilité.

- Oui allons-y. Lucas nous accompagne.

Rachel, qui avait esquissé un mouvement pour saisir sa valise, s'arrêta net. Elle soutint le regard de la chanteuse en espérant qu'il ne s'agissait que d'une blague de mauvais goût, mais elle comprit vite que ça ne l'était pas. Poussant un long soupir, elle saisit finalement sa valise, ravalant les mots acerbes qui s'apprêtaient à quitter son gosier. Comment Taylor pouvait-elle lui imposer ce voyage avec Lucas ? Il n'avait même jamais rencontré la famille Grant auparavant.

Rachel ne comprenait pas pourquoi sa sœur l'aimait à ce point. Il ne méritait pas cet amour. Elle en était persuadée. Mais elle se rendait compte à quel point l'amour rendait aveugle rien qu'en regardant Taylor.

Rachel resta muette dès lors qu'ils eurent quitté la villa. Confortablement installée dans le jet privé de son aînée, elle regardait défiler les nuages à travers le hublot à sa gauche. Le jeune couple avait pris place face à elle, et l'adolescente devait se faire violence pour ne pas les épier. Même si les voir roucouler la dégoûtait, elle n'en était pourtant pas moins curieuse. Ses écouteurs profondément enfoncés dans ses oreilles, elle n'entendait rien d'autre que la musique provenant de son téléphone portable. Rachel aimait particulièrement ce jeu qui consistait à lire sur les lèvres de ses interlocuteurs. Et à force de le pratiquer, elle devenait assez bonne pour distinguer les mots couramment utilisés dans sa langue natale.

Un signe de main devant ses yeux attira son attention. Lucas s'était penché au-dessus de la petite table qui les séparait, et semblait vouloir lui dire quelque chose. Alors, dans un petit soupir, Rachel retira l'un de ses écouteurs pour entendre distinctement le jeune homme. Il était visiblement bien décidé à la faire parler. Si Rachel n'aimait pas cette insistance, elle devait bien avouer que la ténacité était une qualité qu'elle appréciait, malgré tout. Quand bien même il lui paraissait d'une hypocrisie digne d'un acteur Hollywoodien.

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