Chapitre 1

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Le froid était rude.

Le sol était dur et le froid mordant grignotait la peau. Le sang se figeait et le cœur se durcissait jusqu'à complètement s'arrêter de battre.

La pluie acide faisait trembler les pauvres corps dehors qui se dépêchaient de rentrer ou de trouver un endroit pour se mettre à l'abri.
Pourtant, au milieu d'un jardin, le sol gelé par une vague de froid inédit pour le pays, un corps se trouvait là. Petit, deux ailes dont une allongée et l'autre brisée.

Le corps avait dû chuter d'une bonne hauteur et rebondir sur plusieurs mètres jusqu'à se mobiliser sur le sol dur et froid et humide. Le silence envahissait l'endroit comme si le lieu n'appartenait pas à cette vie ni à ce monde. La pluie tombait sur ce petit corps frigorifié, inerte, du sang coulant autour de lui comme une aura maudite et rouge.

Mais, dans ce froid mordant, un petit garçon sortit de sa maison où il était seul.
Il découvrit la créature congelée et blessée, inconsciente sur le sol.
Il s'en approcha doucement, ne sachant si ça vivait encore ou pas. Les ailes attirèrent son attention, mais il n'eut pas le temps de trop admirer la créature, il remarqua vite que ce n'était qu'un enfant, comme lui.

Du bout de l'index, il le touche et sentit une force chaude le parcourir.

- He ? l'appela-t-il d'abord doucement puis avec un peu plus de voix. He ?!

Il le vit frissonner.
Il était en vie ! Rassuré, le garçon s'approcha un peu plus et regarda les blessures du garçon pour savoir par où il pouvait le prendre pour le ramener chez lui et le soigner.

Il prit quelques minutes avant de se décider à le prendre comme un bébé, face contre lui, évitant le plus possible ses ailes et son dos. Il le tint par les cuisses et marcha rapidement jusqu'à sa maison et grimpa dans sa chambre pour déposer la petite créature avec délicatesse sur un lit défait.

- Je vais te soigner, déclara le garçon. Mais comment je dois faire ? 

Il regarda partout autour de lui et se mit à courir vers la salle de bain pour trouver des serviettes mais s'arrêta en plein milieu. Et si, il ne récupérait pas la créature pour le plonger dans la baignoire et le soigner comme ça ? Au moins évitera-t-il d'en mettre partout et de se faire engueuler par ses parents qui n'en auront probablement rien à faire... 

De toute façon, il ne risquait pas de les voir avant un moment, donc il avait tout le temps du monde pour s'occuper de ce petit gars tombé de nulle part. Vite, il souleva de nouveau le garçon et le porta jusque dans la salle de bain. Bon, maintenant le problème était de devoir le déshabiller sans lui faire mal... Il n'avait pas le choix, il devait déchirer le beau vêtement gâché par le sang qui coulait des plaies qu'il avait sur le corps.

- Désolé, lui dit-il en tirant sur le tissus pour l'entendre se déchirer terriblement.

Le garçon blessé gémit de froid et de douleur, comme si, le vêtement était sa propre peau qu'on lui arrachait avec violence et amusement. Comprenant qu'il ne pouvait pas s'attaquer à ça sans lui faire du mal, le petit brun soupira, complètement perdu. Qu'est-ce qu'il pouvait bien faire et comment s'y prendre sans blesser encore plus ce dernier ? 

- Je vais te mettre dans la baignoire avec moi et je m'occuperai de ton aile cassée après. Je te tiens, t'en fais pas.

Du moins espérait-il bien le tenir car, même s'il était un être de la nuit, il n'avait pas encore la force d'un adulte pleinement éveillé. Il fit de son mieux pour porter le blessé dans la grande baignoire en céramique blanche qu'ils tâchèrent avec le sang du garçon ailé, puis il fit couler de l'eau.

Le blessé feula de douleur, n'arrivant pas à bouger, le corps trop enfermé dans cette couche de froid qui ne l'avait toujours pas quitté depuis le dehors, l'eau se transformait en un million de petites aiguilles qui le perforaient. Mais son sauveur tourna le mitigeur de façon à faire sortir de l'eau chaude qui le fit gémir de plaisir. Un petit sourire étira la bouche enfantine du brun qui lui caressa la tête.

- C'est bien, bon garçon. Tu sens la chaleur ? Le froid va vite partir et ça nettoiera tes blessures. lui dit-il tout en jouant avec la température pour en obtenir une qui soit acceptable pour quelqu'un en hypothermie.

Pendant une bonne demi-heure, il dû s'atteler à le laver. Jusqu'à ce que le vêtement se soulève de lui-même et n'offre à sa vue de petit garçon un corps détruit par des blessures assez vieilles, mais aussi un tatouage dans le haut du dos qui allait d'une omoplate à une autre. Une phrase qui indiqua alors l'origine du garçon étrange qu'il venait de sauver. Son regard s'écarquilla en comprenant qui il était et ce qu'il avait entre ses mains. 

Ses ailes avaient du mal à battre et celle qui était cassée le faisait attrocement souffrir. Le jeune brun savait que ça allait prendre du temps pour guérir, mais avec certaines techniques et la capacité du garçon endormit, il était sûr de pouvoir réussir à le soigner en un rien de temps. Mais pour cela, il dut enfin retirer le haut de la tunique blanche et dorée qui recouvrait le torse du petit. Une fois les ailes passées et le haut du corps entièrement dénudé, le brun sortit de la baignoire, son fardeau dans les bras et le ramena dans sa chambre. Il l'allongea sur le ventre pour avoir plein accès à ses ailes blanches et souples aux coups puissants. Il en caressa le plumage immaculé qu'il trouva si doux qu'il se demanda si ce n'était pas un rêve. mais très vite il dû se reprendre pour travailler sur celle qui peinait à bouger.

- Ça va faire mal, le prévint-il, ne sachant pas s'il le comprenait ou s'il l'entendait. Trois, deux... un !

La créature se réveilla d'un coup et poussa un cri si puissant qu'il broya les oreilles du brun qui se plaqua les mains dessus pour se protéger. La douleur avait été vive et l'aile battait si rapidement qu'elle continuait de torturer le jeune garçon en pleur, la bouche ouverte. Le brun se précipita sur lui pour le prendre dans ses bras et le garder contre lui, prononçant des mots apaisants jusqu'à ce que, sans aucune autre solution en tête, il se morde le poignet et donne à boire quelques gouttes de son sang au garçon.

Le rouge carmin tomba sur la petite langue qui les lapa avant de tomber dans un sommeil vide presqu'aussi proche que celui des morts.

Une fois calmé, le brun soupira et il attendit un certain temps avant de voir que ce qu'il avait fait avait commencé à transformer l'aile. Les craquements sourds et ignobles des os de cette dernière, raisonnèrent dans la chambre et l'esprit du garçon, créant en lui une vague d'effroie.

Et si ce qu'il venait de faire avait détruit le petit être angélique qui se tenait devant lui ? Car oui, il avait bien compris qu'il venait de sauver un ange et de lui offrir son sang  dans l'unique optique de l'aider à guérir. Et si son geste avait détourné ce dernier ? Et si, après ça, il n'était plus capable de retourner auprès des siens ? Si tel était le cas, il se jura de toujours protéger le petit garçon abandonné et de faire en sorte que, durant l'éternité qui les attendaient, rien d'autre ne lui arrive.

Aucun mal ne lui serait fait, il s'en fit la promesse comme il la murmura à son oreille pour qu'au tréfond de son esprit torturé, ce dernier l'entende et le comprenne.

Mais dans les limbes de son cauchemar, la créature l'entendit, seulement, cette phrase restera un mystère pour lui, jusqu'à son réveil, plusieurs jours plus tard.

[...]

Ce sera, durant une nuit de pluie torrentielle et froide, qu'il décidera de remercier son sauveur hébété.

- Merci, lui dira le garçon en posant sa main sur sa tête comme un signe de bénédiction et de protection. Grâce à toi, je vis encore.
- Je n'ai fait que ce que je devais faire.
- Mais tu es un vampire, l'ennemi de mon espèce.
- Est-ce que tu me vois comme ton ennemi ? demandera le petit brun déçu.

Le petit ange y réfléchira avant de sourire.

- Non. Tu es celui a qui je dois la vie.

Il s'approchera pour baiser son front, avant d'entendre du bruit dans la maison. L'ange s'inclinera avant de disparaître par la fenêtre pour ne jamais plus apparaître devant le brun qui, pourtant, le cherchera pendant près de vingt ans.

Jusqu'à ce qu'un heureux hasard ou une décision imprévue, ne l'amène à retrouver ce petit garçon et ne lui rappelle sa promesse d'enfant.

***

I'm not an Angel but You can Make a Wish [PAUSE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant