Mère

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Après huit ans, la douleur reste intacte. Ce vide que tu as laissé derrière toi devient de plus en plus insupportable. J'étouffe ma douleur, refoulant mes émotions.

« Je suis là pour toi », si tu savais comme ses cinq mots m'oppressent, l'impression d'être incomprise.
Je fui la réalité pour me raccrocher à cette image d'une mère toujours présente. C'est ce que tout le
monde défini comme le déni, celui de ton décès.
J'agis mal par peur de blesser mes proches, une phrase ironique lorsque je l'écris. Je le cache, mais j'ai peur, peur d'affronter la réalité, celle qui je le sais me ferait souffrir.
J'ai de nouveau besoin d'écrire ce que je ressens, cela n'était pas arrivée depuis des années. Peut-être ai-je débloqué cette part d'humanité qu'il me restait ? Ou peut-être que c'est seulement un tout qui fait de moi une bombe à retardement.
Comment leurs dire qu'au fond de moi je souffre ? Cette image de femme forte que je reflète m'aide à aller de l'avant, pourquoi aujourd'hui je ressens le besoin de t'écrire ses mots ?
Cette carapace ne semble plus me protégée suffisamment comme elle le faisait si bien ses dernières années.

Mère, ta présence me manque, j'ai besoin de t'avoir à mes côtés, de tes conseils, d'entendre le son de ta voix, de ton rire, de t'entendre me sermonner lorsque cela est nécessaire. J'ai l'impression d'étouffer, d'échouer, de mal faire tout ce que tu as pu m'apprendre.
Pourquoi la douleur ne s'arrête-t-elle pas ? Combien d'années encore devrais-je endurer ce mal de ton absence ? Devoir faire semblant d'être heureuse pour ne pas recueillir cette commisération de toutes ses personnes m'entourant.

Je fais de mon mieux pour garder la tête haute, afin de ne pas montrer mes faiblesses comme tu me l'as toujours dit.
J'avais décidé d'enterrer toutes ses émotions qui me submerger à ton décès, pardonnes-moi de ne pas te pleurer, si tu savais comme j'en ai honte.
Je suis en colère, contre cette vie qui m'a été offerte, pourquoi un enfant devrait-il grandir sans sa figure maternelle ? Comment dois-je faire pour apprendre tout ce qu'il me reste à savoir ?
J'entends souvent les personnes me qualifiée de femme forte, mais mère, je n'ose pas leurs dire que ce n'est pas le cas, je n'ose pas leurs dire que je me force à l'être, par peur de les décevoir.
En ce moment, je ne sais pas si je suis affligée, méprisable, en colère ou même indifférente.
Je repousse toutes ses personnes qui souhaitent m'aider à aller de l'avant, mais ils sont incapables de comprendre ce que je vis, ce que je ressens. De temps en temps, j'ai l'impression que mon monde s'écroule autour de moi sans savoir comment l'expliquer. Parfois, je n'ai aucune émotion et quelques secondes plus tard elles me submergent. Je ne comprends pas ce qu'il m'arrive.

Je me force à ne pas y penser, jouant constamment avec ma santé physique et mentale. Je ne vis plus, je me force à continuer pour les plus jeunes. Personnes ne l'ai à épaulés lorsque tu es partie, je suis la seule figure maternelle qui doit les amener à avancer. Cela doit être une des seules raisons qui me poussent à continuer, voir ce sourire sur leurs visages.
Derrière tout cela, je m'oublie. Lorsque je suis seule et que la nuit tombe, ton visage hante mes pensées me créant des crises d'angoisses et des insomnies.
On me demande de dire ce que je ressens, de dire ce que je pense, mais je suis dans l'incapacité de le faire, ne le sachant pas moi-même. Ce que je sais avec certitude, c'est que j'aimerais dire « je vais bien » et le penser sincèrement. Cela fait tellement longtemps que j'en ai oublié la saveur.
J'ai des moments de joies parfois, mais ils sont de trop courtes durées, la réalité me rattrape
précipitamment. J'ai l'impression de te déshonorer, je ne me sens pas légitime d'être heureuse alors que tu n'es plus là. Comment est-ce que je pourrais retrouver une vie normale après tout. J'ai aujourd'hui beaucoup trop souffert pour espérer un peu de bonté.
Je suis devenue mère à mon tour, mais je me sens incapable de lui apportait tout ce dont elle a besoin, ignorant ce sentiment.
Une part de moi est partie en même temps que toi mère, cette partie s'est éteinte il y a huit ans. Je pensais qu'en enterrant mes émotions la peine serait moins grande.
Tout ce que cela m'a apporté c'est de l'indifférence des actions et propos d'autrui. Mais pour toi, cela n'a pas eu l'effet attendu.
Tu sais, parfois, j'ai l'impression de ne pas vivre comme tout le monde, je me sens souvent disparate et malheureusement, cela me peine.

Dans ma souffrance Où les histoires vivent. Découvrez maintenant