Destins Croisés

Nuit noire

TW : viol, deuil

Eva

Les lumières bleues m'éblouissent, les sirènes des ambulances me cassent les tympans. Je relève la tête. Quelque chose de chaud coule te long de ma joue. Je tente de relever ma main pour savoir ce que c'est. Lorque je touche mon front c'est un liquide rouge que je récupère sur mes doigt. Je ne panique pas - j'essaie de ne pas paniquer. J'aperçois 3 corps allongés plus loin. J'essaie de faire bouger mon corps endolori. Quand j'arrive à la hauteur de son petit corps je perd mon coeur. Il se brise en mille morceau sur le sol. Dans son sang. Je peux entendre les morceaux se détacher un à un de mon organe vital. Je sais déjà sans voir les deux autres corps sans vie que plus jamais mon palpitant ne fonctionnera comme avant. Je me tourne vers mes parents mais voir leurs visages ensanglantés me donne la nausée. Je m'approche en titubant. Cette image sera gravée et me hantera jusqu'à la fin de ma vie. Est ce que je suis morte aussi ? Est ce que je ne suis qu'un fantôme ? Ma tête tourne. Je lutte pour garder les yeux ouverts. Je n'ai plus de voix, j'ai crié trop fort. Ce ne peut pas être réel. C'est un cauchemars dont je vais me réveiller. Je veux fermer les yeux et me rendormir. Je ne veux pas mourir. Je ne veux pas vivre seule.

Je rouvre mes yeux et essuie la larme qui coule le long de ma joue. Cette nuit est gravée dans ma mémoire. Les visages de ma famille me hantent chaques jours et chaques nuit de ma vie. Il ne se passe pas une minutes sans que je revois leurs visages ensanglanté et détruis par l'accident. La salle d'attente se vide peu à peu. Ça fais maintenant 20 minutes qu'on attend dans un silence pesant. Comme d'habitude nous sommes toutes les trois pour l'échographie de June. Elle est assise entre ma grand-mère et moi. Déjà dans la voiture quand elles sont venues me chercher au manoir il y avait ce silence de mort. Elle en est à son septième mois maintenant. Son ventre commence à se stabiliser niveau volume.

Ma grand-mère s'avance pour me regarder, ouvre la bouche puis la referme. Je ne veux pas aborder le sujet, je ne veux pas que ça soit réel. Je ne veux pas qu'elle me donne de faux espoirs. Je ne veux pas qu'elle me donne ses délais de vie. Je ne veux pas qu'elle meurt, elle aussi. Je veux juste ne plus perdre ce qu'il me reste de famille, qu'on accueille le nouveau-né comme il se doit. Que mon filleul -ou ma filleule- soit heureuse dans une famille en morceau mais une famille quand même. Je veux qu'il -ou elle- grandisse en étant accompagné par son papa et sa maman, par ses grands parents aimant et pas sa super marraine un peu cassée.

Quand le médecin se présente pour la visite de June, nous nous redressons comme un seul homme. Pendant son échographie, il fait un topo sur l'état du bébé et de la maman. Ils sont en plein forme tous les deux, comme à chaque visite jusqu'à maintenant. Tant mieux. Nous n'aurons aucune mauvaise surprise le jour de l'accouchement. La famille sera heureuse de compté un nouveau membre parmi elle. Tout le monde sera comblé de bonheur de voir un petit être dans les bras de ses parents. Je serais fière de le voir grandir.

Pendant que le docteur passe l'échographe sur le ventre de mon amie, je suis adossé au mur à droite du lit et ma grand-mère est au pied du lit de June. Nos regards se sont croisés plus d'une dizaine de fois déjà. Je détourne le mien a chaque fois. Je crois que j'ai peur que son état me saute au yeux alors je ne les pose pas plus d'une seconde sur elle. J'ai peur de remarquer trop vite ce que je n'ai jamais remarqué jusqu'à maintenant. J'ai peur de la vérité.

°°°

Le retour jusqu'à la maison se fait dans un silence pesant. Je préfère regarder les paysage défilé que de prendre le risque de croiser leurs regards dans le rétroviseur. La peur me noue les entrailles. Je sais que la fameuse discussion approche et je ne peux pas m'empêcher de redouter le moment où tout deviendra réel.