Chapitre 1

21 6 0
                                    


Le ciel s'était enflammé de couleurs brûlantes, nimbant la plage de sa lumière chaude en entamant sa descente triomphale vers l'océan. J'avais eu de la difficulté à rester zen en cette journée de canicule accablante. Comme celle-ci tirait à sa fin sans que le thermomètre n'ait semblé bouger d'un seul degré, j'avais décidé d'aller profiter de l'infime brise sur la plage pour faire une courte séance de yoga, histoire de rétablir ma paix intérieure. La porte de la maison de vacances que j'avais louée pour la semaine claqua doucement derrière moi. C'était pour moi une retraite spirituelle, en quelque sorte. Une semaine de solitude, de yoga, de lecture sur la plage, de réflexion personnelle, de méditation. J'avais eu besoin de me ressourcer. À deux jours de mon retour vers la réalité, je pouvais affirmer que j'avais accompli ma mission détente. Sauf peut-être aujourd'hui, où j'avais un peu de mal à garder mon sang-froid avec toute cette chaleur...

Je m'arrêtai à mi-chemin pour contempler le paysage. J'avais toujours été fascinée par cette heure particulière de la journée où la lumière dorée du soleil semblait dominer sur tout. Le sable, les vagues, les nuages, les petites maisons champêtres disséminées sur la rive... Je sortis mon cellulaire et pris un cliché de moi-même avec la plage derrière moi, les reflets brûlants du soleil jouant dans mes yeux verts, sur les petites tâches de rousseur qui picotaient l'arête de mon nez, sur mes cheveux roux relevés en un chignon emmêlé.

En continuant de marcher distraitement vers l'eau, je publiai rapidement la photo sur mon compte Instagram, où je prenais plaisir à documenter les moments saillants de ma semaine d'exil. Ça me donnait une impression de vie sociale mais je devais admettre que le contact social commençait à me manquer. Je croisai une fillette qui rentrait tristement à la maison, la plage complètement déserte à cette heure lui offrant l'espace idéal pour faire voler le cerf-volant coloré qu'elle tenait dans les mains mais le vent n'étant pas du tout au rendez-vous. Mes pieds nus s'enfonçaient dans le sable chaud à chaque pas. Lorsque mes orteils rencontrèrent le bord d'une vague tiède juste avant qu'elle ne se retire, je choisis que c'était l'endroit idéal pour commencer ma salutation au soleil. Je remis mon cellulaire dans la poche de mon petit sac à bandoulière, que je laissai tomber un peu plus loin sur le sable sec. À part la température extrême d'aujourd'hui, j'étais plutôt reconnaissante d'avoir eu du beau temps pendant ma semaine de vacances. J'enchaînai les mouvements pour saluer l'astre flamboyant avant de poursuivre avec la position du guerrier. Forte. J'étais plus forte que la canicule. Zen. Loin de tout, j'étais imperméable aux angoisses du quotidien. Invincible. À mon retour, je ne laisserais plus jamais personne me marcher sur les pieds.

Je m'efforçai de me concentrer sur la brise à peine perceptible qui caressait mon visage, sur le sable humide sous mes pieds, sur les vagues un peu plus fraîches que l'air ambiant qui venaient me chatouiller les orteils à intervalles plus ou moins régulières. Je posai les mains de part et d'autre de mon pied, avant que celui ne rejoigne le pied arrière, puis soulevai les fesses dans les airs pour prendre la position du chien inversé. Les yeux fermés, je faisais de mon mieux pour ignorer la chaleur qui faisait déjà perler la sueur sur mon front. Je devais faire le vide dans mon esprit. J'y parvenais presque mais quelque chose de dur ne cessait de cogner doucement au bout de mes doigts à chaque fois qu'une vague venait lécher le sable jusqu'à moi. Je finis par interrompre ma concentration pour constater que c'était un petit coquillage blanc en forme de spirale, avec des petites pointes tout autour. Je le repoussai d'un geste impatient avant d'entamer la transition jusqu'à la position de la déesse, les mains jointes devant moi et les yeux clos, pour inspirer lentement et tenter de maintenir ma paix intérieure.

Le son régulier de pas sur le sable humide me fit ouvrir les yeux. Une joggeuse arrivait sur ma droite, courant pieds nus sur le passage étroit qui était régulièrement caressé par les vagues, sans doute pour tenter de se rafraîchir un peu elle aussi. L'eau monta au moment-même où l'étrangère passait devant moi. Elle poussa alors un cri et s'arrêta de courir, attrapant son pied à deux mains. Elle sautillait sur place en poussant des jurons alors que la vague se retirait, découvrant le petit coquillage pointu luisant avec culpabilité dans les rayons du soleil. Je me redressai d'un coup.

Vous avez atteint le dernier des chapitres publiés.

⏰ Dernière mise à jour : Feb 20 ⏰

Ajoutez cette histoire à votre Bibliothèque pour être informé des nouveaux chapitres !

Yoga ChaudOù les histoires vivent. Découvrez maintenant