chapitre 2: Nicholas

3 1 0
                                    

Je dévisage tranquillement la fille face à moi, m’appuyant sur une des tables mises à disposition pour un buffet. La fête tourne à son plein, tous autour de nous boivent et dansent en rythme avec la musique qui vibre dans mon corps. Finalement, c’est à peine si l’accident a perturbé leurs esprits embrumés. Je dois moi-même être à mon cinquième verre.

Vraiment, je commençais à apprécier cette soirée organisée par James, à l’insu de ses parents. Comme toujours. Il y avait de l’alcool, de la musique et j’avais même eu quelques bonnes compagnies. Bien sûr, rien qui ne vaille celle de James et Úlfur. Mais je ne cracherai jamais sur la présence d’une fille — ou d’un garçon — à mes côtés, même si c’est pour les jeter dans le pot aux roses.

En fait, cette soirée était vraiment parfaite. Avant qu’un de ces abrutis trop éméchés pour distinguer leurs vers de leurs pieds, percute… Ah, c’est quoi son nom à cette fille déjà ?

Peu importe, en fait. Elle semble si singulière dans cette soirée… je suis quasiment sûr qu’elle n’y a pas sa place. Ça se sent… et se retrouver avec un verre de Mojito renversé sur sa robe ne doit pas aider. Et puis, j’ai parfaitement vu la scène, le gars n’y était pas allé de main morte.

N’entendant pas de réponse à ma question, je me redresse et m’approche un peu plus. Soudain, la musique pulsant dans mes oreilles ne me paraît plus aussi agréable. Elle est même agressive, alors que je lutte contre l’alcool pour rester concentré.

— Est-ce que tout va bien ?Je répète, ma voix couvrant le fond sonore.

— Absolument, c'est tellement l’éclate ! Je suis sûre que ça se voit à des kilomètres à la ronde…Qu’est ce qu’on s’amuse…Ah ah…Ah.

Je ne peux retenir un sourire amusé face à la réponse, rempli d’une certaine ironie qu’il m’est facile de sentir… du moins, de mon point de vue. Je vois bien qu’elle ne s’amuse pas, tandis qu’elle cherche à m’en convaincre.

— Je m'amuse tellement que je vais…Heu…Continuer à faire la fête genre, loin. 

— Oh attends, tu es sûre que ça va ? Je l'interpelle, avant qu’elle ne s’en aille. Tu as tout, sauf l’air de t’amuser, si tu veux mon avis.

— No shit, Sherlock.

Elle penche légèrement la tête d’un air blasé, ses yeux perçant jugeant sans s’en cacher la stupidité de ma phrase. OK, je ne sais pas ce que je lui ai fait à elle, mais ça doit être du lourd.

— D’accord !

Je lève les mains en signe de reddition.

— Écoute, fais ce que tu veux, ce ne sont pas mes oignons, de toute façon. J’essayais juste d’être sympa.

— A…Attends! Pardon, c'est pas ta faute.

— Ouais, peut-être, mais apparemment t'as pas vraiment envie qu’on te dérange, alors je vais…

Je cherche un instant du regard mon frère et sourit en trouvant sa tignasse emmêlée, indéniablement reconnaissable.

— Retrouver James.

Je commence à m’éloigner, quand je sens une poigne agripper la manche de ma veste. Sans même y réfléchir, je me retourne et tire dessus, me dégageant, avant de fusiller la fille du regard.

— Quoi ?

— Je…Pardon, tu… Tu veux bien rester? S’il te plaît. 

Je soupire et roule des yeux. Un coup A, un coup Z… putain, que les gens peuvent être compliqués parfois. Sans vraiment m’en rendre compte, j’acquiesce et me détends légèrement. L’instant d’après, j’ai un whisky dans les mains et pour être tout à fait honnête, je ne sais même pas où je l’ai chopé, celui-là.

Elle me présente sa main d’un air solennel.

— Álfur Breihnan.

Je fronce légèrement les sourcils et décide finalement de me prêter au jeu en donnant un baise-main. 

— Enchanté, Álfur. Nicholas Star. Nico, pour les intimes. Je déclare, lui offrant un de mes plus beaux sourires.

— Je suis au courant.

Son visage, déjà aussi rouge qu’une tomate en plein mois de juillet, prend quelques teintes de plus, ce qui me surprend assez. Comment est-ce possible, vraiment ? Je lève un sourcil inquisiteur, mon petit sourire que je sais parfaitement charmeur ne quittant pas mes lèvres.

— Il faut dire que tu es connu, dans le coin. Arrête de sourire comme un crétin à la fin !

Son agacement me fait éclater de rire. Peut-être que dit d’une personne qui n’aurait pas huit teintes au-dessus du rouge habituel, cela m’aurait touché. Mais il est très clair que je lui fais de l’effet — comme à tout le monde — et cela l’énerve… Ce qui, inévitablement, lui fait perdre toute crédibilité.

— Toutes mes excuses à votre altesse, je ne savais pas qu’il était interdit de sourire à une fête.

— Si tu veux garder le privilège de pouvoir te reproduire, me cherche pas trop.

— Oooouuuh, j’ai si peur…

Elle fronce les sourcils et soupire avant de marmonner.

— Pourquoi je choisis toujours les plus teubés franchement ?

— Qui se ressemble s’assemble… Je fredonne en levant les yeux vers le plafond des Clay.

Je me retiens tout de même de lui faire une remarque sur le fait que beaucoup d’hommes sont teubés… c’est le principe d’avoir un organe reproducteur dit “masculin”... Oui, bon, d’accord, ça ne veut pas tout à fait dire ça, mais on peut jouer sur les mots, non ?

— Ouaaaah, quelle répartie… C'est celui qui dit qui l’est ? Vraiment ?

— Ah, parce que tu parlais de moi ? Je réplique, feignant l'innocence.

Elle regarde le contenu de son verre, du moins ce qu’il en reste avant de me fixer à nouveau, une lueur de défi se matérialise dans ses prunelles. Je la regarde, puis observe à mon tour le contenu de son verre. Oh non… Non, ça non.

— Vas-y, ose… le mien est rempli.

Elle jauge du regard ma boisson et soupire.

— Ok, tu gagnes cette bataille là.

— Tu me vois ravis de l’apprendre, très cher. Je souffle, reprenant mon petit sourire charmeur.

Je l’aime bien, cette fille, finalement. Elle change un peu de toutes celles qui me collent aux fesses depuis qu’elles ont appris que j’étais libre comme l’air… moi, ou ce qui les intéresse. Elle a au moins le mérite de ne pas glousser comme une dinde.

Virgin Mojito et orage de printempsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant