L'éclosion de la rose

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Le temps, cette unité qui, selon son utilisation, soit s'allonge, soit se rétrécit. Cette continuité de la vie où les événements s'enchaînent sans avenir défini. Là où tout évolue, l'amour, les relations, la créativité, l'imagination. Imagination qui aussi intrigante soit-elle, est infinie. « Infinie ? », se questionna-t-elle, dans sa camionnette, assez fort que sa pensée se métamorphosa en parole.

Dès la création de sa mini-entreprise, la cuisinière en herbe s'était toujours demandé si elle serait capable d'innover des plats bulgares pour en faire des plats revisités, nouveaux. « Mais, l'imagination a-t-elle des limites ? »

Au milieu du vacarme incessant de la circulation urbaine, ses réflexions errèrent dans le côté obscur du savoir. L'imagination. Fréquemment utilisé pour représenter la faculté qu'ont les esprits créatifs. Mais tout le monde en a. Chacun a le don de s'imaginer des objets, des concepts tout aussi loufoques qu'incroyables, peu importe notre niveau de créativité. Créativité qui se forme à partir de l'observation de son environnement, de ce qui est déjà réel. L'art de regarder au-delà des apparences. En essayant, en testant des expériences, en commettant des erreurs, l'imagination apparaît.

Cette interprétation du cycle de la créativité lui rappela le mythe que lui avait raconté Jules. Le souvenir de sa voix fut aussi tendre que la crème chantilly, résultat d'une crème fraîche battue trop fortement avec du sucre. Le pâtissier-traiteur commit dans la panique une magnifique erreur.

« Belle erreur... », lâche Kalina un sourire mélancolique mélangé à un soupir, se remémorant de son vécu avec le cambrioleur de son cœur, tandis qu'elle rejoignit la réalité, perturbée par un conducteur généreux en klaxon.

A ses débuts de cuisinière indépendante, le manque d'argent l'avait mise en difficulté. Elle travaillait sans relâche pour se permettre l'achat d'un véhicule approprié pour ses activités. Le scooter mal en point avait été remplacé par un monstre des routes rose. Elle en était fière, tout comme de son parcours professionnel. Elle a commencé avec des prospectus déposés dans les boîtes aux lettres. Le bouche à oreille récompensait à présent ses efforts.

A bord de sa fourgonnette, elle parcourut la ville. Elle apporta les livraisons aux clients. Heureux de l'efficacité de la jeune femme. Subjugués par la gourmandise de son travail. Grâce à son activité, elle s'est familiarisée avec quelques couples de retraités principalement, qui aimaient son talent. Une rose jaune. Ils lui racontaient leurs plus grandes aventures. Leurs passés. Leurs histoires. Leurs périples. Leur rendre visite permettait à Kalina de décompresser, de ne pas penser à sa situation et d'inviter la joie en elle.

Sa vie sociale se résuma à ses clients et aux commerçants chez qui elle achetait ses produits. Après les livraisons, la cuisinière allait au marché local. Produits bio et discussions fleurissantes l'emmenèrent aux achats du jour. Elle dépensa avec le sourire, charmant les vendeurs et les négociations. Une bonne entente s'encra entre elle et les marchands. Mais dès qu'elle sortit de cet environnement jovial, la rose jaune qui sommeillait en elle s'effaça, remplacée par la nostalgie redondante.

Ses fragments de passé confrontaient la fille qu'elle enfouit sous sa mine rembrunie. L'ancienne Kalina. Son chagrin d'amour a brisé sa personnalité radieuse, créant un bouclier de sucre glace.

Effarée par le tempsconsommé par ses courses, ses jambes se dirigeaient vers sa camionnette plusrapidement que ses yeux s'extirpèrent de son cadran. Ses cheveux bruns s'échappèrentde son visage, effrayés par le vent glacial qui s'impose. D'une main, ses clésde son véhicule sortirent machinalement de sa poche alors qu'elle tenait samarchandise difficilement de l'autre. Ceinture attachée, frein levé, elle arrivadans sa tanière gourmande tout en songeant à la vie onirique qu'elle avait.