Chapitre 1 : Nate

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       L'expression « se lever du pied gauche » avait été faite pour moi, j'en étais persuadé. Les quelques mètres séparant mon lit de ma salle de bain étaient définitivement plus dangereux que les repas de la cantine datant de plusieurs jours. Après avoir trébuché sur le sac de cours laissé la veille par ma petite sœur, j'avais réussi à me cogner l'arrière du crâne au mur adjacent. Tout ce bruit et cette peine simplement dans l'espoir d'arriver à l'heure au lycée.

      Au moins, ce réveil mouvementé m'avait appris plusieurs choses.

      Fait numéro un : je ne devais plus laisser ma sœur approcher de ma chambre.

      Fait numéro deux : les téléphones ne rebondissaient pas très bien sur le parquet.

      Fait numéro trois : j'allais sûrement devoir changer de téléphone.

      Après avoir passé le portail d'entrée, je vis une tête aux cheveux bruns entourée de deux filles. Sachant d'ores et déjà de qui il s'agissait, j'entrepris une percée au milieu du petit amas d'élèves dans la cour, replaçant la bretelle de mon sac à dos sur mon épaule. Encore des filles que je n'avais jamais vues. C'était bien son genre. Je soupirai lorsque cette pensée traversa mon esprit puis je me raclai légèrement la gorge, dans une tentative d'obtenir une place, aussi étroite fusse-t-elle. La fille qui me bloquait le passage semblait prête à hurler sur le premier venu. Ce garçon attirait les personnes étranges. Autant dire que le malaise était à son comble. Je ne les comprenais pas. Elle se tourna vivement, les lèvres entrouvertes avant de finalement lâcher un hoquet de surprise.

      — Je suis désolée, je ne savais pas que c'était toi.

      — C'est pas grave.

      Je lui jetai un simple regard avant de hausser les sourcils, pris de lassitude, puis me tournai. Je devais avouer que le coup d'œil que je lui avais lancé n'était pas très agréable, mais je n'y prêtais pas attention, contrairement à elle qui se renfrogna et bafouilla des mots inintelligibles. Je l'avais mise mal à l'aise. Elle attrapa le bras de son amie afin de libérer un espace près de la source de ce brouhaha. Le bruit avait nettement diminué, le garçon étant davantage intéressé par mon arrivée que par ses presque groupies. Aucune d'entre elles ne souhaitait réellement rester à ses côtés alors que je m'y trouvais également. De toute façon, tout redeviendrait calme dans quelques jours. C'était souvent comme ça lorsqu'il séchait les cours pendant un temps.

      Je réduisis la distance qui nous séparait avant de frapper dans sa main. Son air nonchalant du haut de son - petit - mètre soixante-huit ne l'avait pas quitté. Il leva la tête pour s'adresser à moi :

      — Nate, ça fait un bail.

      Il avait accompagné sa phrase d'un doux sourire charmeur dévoilant ses dents blanches, sa marque de fabrique.

      Les filles qui le dévoraient encore du regard quittèrent rapidement les lieux en voyant que Ryan ne leur portait plus aucune attention. Il me fascinait autant qu'il m'exaspérait, et il le savait.

      — Ta grippe a duré plus longtemps que prévu, surtout pour une fin d'été.

      — Ouais, elle a duré à peu près trois saisons.

      Un sourire apparut sur mes lèvres.

      — Est-ce qu'elle valait le coup, au moins ?

      — Plus que toutes les heures de maths. Je crois que t'aurais aimé avoir la même.

Moi + Moi + VousOù les histoires vivent. Découvrez maintenant