Partie 5 - Tayga

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Un mal de tête affreux s'est emparé de moi, j'ai les yeux clos et le reste de mon corps est immobile. Ma bouche est pleine de... de sable ? J'ouvre les yeux, paniquée. Je suis allongée sur le ventre, sur un plage de sable fin. Autour de moi, des centaines d'adolescentes endormies. Enfin la plupart, car certaines d'entres elles commencent à se relever et je m'empresse de les imiter. 

Une main en visière, j'observe les alentours qui me paraissent vaguement familiers.
Nous sommes sur une île, mais pas n'importe laquelle : l'île du Jeu. Elle a même un nom si mes souvenirs sont bons mais, sur l'instant, je ne m'en souviens pas et puis peu importe, cela n'a plus d'importance à présent.

J'essaie juste de me remplir la tête avec des questions futiles pour m'empêcher de penser aux vraies conséquences de ma participation à ce jeu et de ma venue ici.

Une mer bleu turquoise nous entoure, le typique cliché de l'île paradisiaque, juste pour en mettre plein la vue aux téléspectateurs.

Je finis par remarquer une jeune fille à la tignasse brune et au teint légèrement hâlé, allongée près de moi et qui n'a pas l'air de vouloir se réveiller. Je me demande si je devrais l'aider, toutes les autres filles sont déjà debout mais un coin de mon cerveau me dit que si elle ne se relève pas, ça me fera une conccurente en moins.

Malgré cette sinistre pensée, mon côté humain prend le dessus et je m'accroupi auprès d'elle. Elle ne bouge pas d'un cil.

Je déplace délicatement ma main quelques centimètres au dessus de sa bouche et je sens un faible  souffle d'air caresser ma paume.

- Fais lui du bouche-à-bouche tant que tu y es, ricane une voix derrière mon dos. On est pas ici pour s'entraider, si elle doit crever dès le début du Jeu, qu'elle crève, ça en fait une de moins.

Je me retourne, intriguée par la violence de ces propos - malgré que je l'ai également pensé, je ne l'aurais jamais exprimé à voix haute - et je me retrouve nez-à-nez avec une fille digne de paraître sur la couverture d'un e-book de mode.
Cheveux noir de jais, yeux gris étincelant, bouche pulpseuse. On croirait voir une parodie de cette poupée du XXIème sièce : Barnie, Barlie ou un truc dans le genre.

- Enchantée, moi c'est Kass, se présente la nouvelle arrivante d'un ton glacial.

Je ne réponds rien et la fixe d'un air mauvais. Elle se remet à rire comme si je n'étais qu'elle pauvre idiote et tourne les talons.
Au dernier instant elle fait un demi-tour sur elle même et lance :
- Tu ne m'as pas l'air très douée pour savoir avec qui il faut s'allier, tu viens de perdre une grande opportunité, souviens-en toi.

Je lève les yeux au ciel avec un soupir méprisant puis je repose mon regard sur la fille endormie.
Je crains pendant quelques minutes qu'elle ne se réveille jamais et je me surprends à mordiller ma lèvre inférieure avec une angoisse démesurée du fait qu'elle n'est pour moi qu'une inconnue.
Mais bientôt, ses paupières se soulèvent et j'ai un mouvement de recul. Elle a des yeux asymétriques : l'un est bleu, l'autre marron. Sa tête se soulève brusquement, comme par reflexe et elle jette un regard paniqué autour d'elle.

- Où suis-je ? halète-t-elle en tremblant. QUI ÊTES VOUS ?

Il me semble qu'elle est en pleine crise d'angoisse, je jette un coup d'oeil autour de nous : les filles ont commencé à se rassembler près de la végétation. Il faut qu'on se dépêche de les rejoindre avant de passer pour des traîtres.

- Hé, du calme, dis moi ton nom ? moi c'est... Freckles, et toi ?

J'ai hésité, j'ai failli lui révéler mon vrai prénom. Une étourderie de ce genre et j'étais éliminée. Je suis en train de me traiter intérieurement de gourde lorsqu'elle me répond d'une voix peu assurée.

- As...Asym ?
- Enchantée, maintenant suis moi.

Je lui tends ma main pour l'aider à se relever et elle la saisit avec plus de force que j'aurais pensé.

- Mesdemoiselles, veuillez écoutez.

La voix robotisée - féminine évidement -  sort de nulle part et de partout à la fois. Toutes les candidates regardent autour d'elles, désorientées et échangent des regards entre elles, nous connaissons évidement par coeur les paroles qui vont suivre.

- Bienvenue à la 6ème Saison de G i r l z, ce jeu indispensable pour la survie de notre humanité. Je vais vous rappeler les règles du Jeu.

Asym me jette un regard inquiet, elle ne me semble pas tout à fait remise de sa crise d'angoisse de tout à l'heure.

- Règle 01 : Ne révèler à personne votre véritable identité. Votre passé...
-... appartient au passé, terminons-nous en choeur.

Je remarque que Asym n'a pas ouvert la bouche. Se pourrait-il qu'elle ne connaisse pas Les Règles ?

- Règle 02 : Ne pas tuer ni blesser une Sélectionnée. Nous comptons sur La Société - et sur Elle seule - pour déterminer celle qui aura le mérite d'en faire partie.

Mon ventre se serre. Et si le public ne m'appréçiait pas ?
J'en suis consciente, le Vote hebdomadaire des téléspectateurs est la chose la plus importante du Jeu. C'est seulement lui qui classe les Sélectionnées - mise à part les Tests évidement.
Chaque membre de La Société vote pour la candidate qu'il préfère et chaque fin de semaine, les 100 dernières du Classement sont éliminées. Ce qui implique de savoir s'imposer dès le départ, parmi les 500 Sélectionnées.

- Règle 03 : Aucun acte sexuel n'aura lieu avec Le Garçon, ni avec personne d'autre.

À cette règle s'ensuivent des rires faussement gênés. Le Garçon est l'un des habituels Tests du Jeu.
Je redoute un peu cette épreuve mais j'ai l'avantage d'avoir un frère alors que la majorité des adolescentes ici présentes n'ont jamais été très proches d'individus masculins et sont très perturbées en leur présence.

La Voix continue de réciter Les Règles, plus ou moins importantes mais je n'écoute plus que d'une oreille.
Asym, elle, reste très attentive au moindre mot prononcé.

Quand la voix finit son énonciation, je me tourne vers ma camarade aux yeux vairons et l'interroge :

- Tu ne connais pas Les Règles ?
- Je...je ne me souviens pas de tout, c'est assez flou dans ma tête. C'est pas pareil pour toi ?
- Non, tu as du avoir le droit à un traitement de faveur.
- J'aurais préféré me souvenir, murmure-t-elle tandis qu'une larme d'écoule de son joli oeil bleu.

La voir pleurer me met mal à l'aise.

- Ne t'inquiètes pas, c'est sans doute pour te tester, tu recouvreras sûrement la mémoire dans les prochains jours.
- Si je suis toujours là, me rapelle-t-elle d'une voix soudainement plus forte tout en essuyant ses larmes d'une main.
- Qu'est ce que tu racontes ? Les gens vont t'ad-

- Temps restant avant le Test numéro un, me coupe la voix métallique. Cinq secondes, quatre secondes, trois secondes, deux secondes, une seconde... Lancement du Test.

G i r l z (INACHEVÉE)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant