DANTE

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— Et tes parents ? Comment vont-ils ?

Mon visage se crispe, elle n'est pas au courant.

— Ma mère n'a pas supporté la mort de mon père. Elle est partie un matin et n'a plus donné de signe de vie depuis.

Ses yeux s'écarquillent, elle ne s'attendait pas à cette réponse.

— Dante, je suis... Je suis désolée. Je ne savais pas. Pourquoi ne me l'as-tu pas dit plus tôt ?

— On venait de se quitter quand c'est arrivé. Je n'allais pas t'infliger mes problèmes. Après, on ne s'est plus parlé. Et hier, je venais de te retrouver, je n'avais pas le coeur à ça.

— C'est pour ça que tu es revenu en Italie ?

Je hoche la tête, souffle un bon coup et me lance.

— Mon père était sur le point de mourir, et ça n'allait pas bien entre nous. Je crois que j'ai manqué de maturité, j'avais du mal à gérer et réaliser ce qu'il m'arrivait. J'ai préféré te quitter en inventant quelque chose, pour que tu m'oublies plus vite. J'étais convaincu que c'était la seule option pour ne pas te faire souffrir. Mais j'ai eu tord.

— Tu as préféré que je te déteste plutôt que de me dire la vérité ?

— Minh, j'étais complètement perdu. Je venais d'échouer mon année en ratant le concours et au même moment ma mère m'appelait pour m'annoncer la triste nouvelle. Tu me bombardais de reproches, tu me sentais distant et on se prenait la tête pour tout et n'importe quoi, je n'en pouvais plus. Avant, j'étais incapable de partager ce que je ressentais, je ne savais pas comment gérer mes émotions, ni comment t'en parler. Alors je me suis renfermer et un rien m'énerver. Je ne voulais pas que tu souffres à cause de moi, je ne voulais plus t'infliger cette douleur. Tu n'avais pas à subir mon sale comportement.

— Quand as-tu appris pour ton père ?

— Quelques jours avant notre séparation. C'était ses derniers instants quand j'y suis allé. Mais je suis arrivé trop tard, je n'ai pas eu la chance de le voir vivant, de lui dire que je l'aime, même si la mort n'arrête pas l'amour.

Elle me fixe, cherchant quoi dire.

— Je suis désolée. Je n'étais pas à tes côtés pendant ce moment douloureux. Je ne savais pas que tu souffrais. Tu ne m'as rien dit.

— Et tu n'as rien remarqué, je sais. Je suis plutôt doué pour cacher ce que je ressens. Il n'y a que mon amour pour toi que je pensais facile à faire transparaître, mais apparemment, je m'y suis mal pris.

— Non, s'il te plaît, non, ne pense pas ça. J'ai mon rôle dans toute cette histoire. J'étais plus jeune, j'avais très peu de confiance en moi. Il fallait sens cesse me rassurer, j'en avais besoin. J'avais un mal-être qui pesait sur mes épaules et même si je suis de nature bavarde, je n'avais pas le courage d'en parler. C'était une période où je ne m'aimais pas, j'avais du mal à concevoir que l'on puisse m'aimer. Nous avions une routine, presque dix ans de couple, nous nous sommes connus très jeunes, j'avais peur qu'en grandissant tout ce confort disparaisse. Avec nos études, on se voyait moins. On communiquait de moins en moins. Je ne me préoccupais que de moi-même, on ne faisait plus d'effort. 

— Un couple, c'est deux. Il y avait autant de doutes de mon côté. L'âge jouait contre nous, on était loin d'être matures. Rien n'est jamais acquis dans la vie. On ne s'est pas accordé la chance qu'on méritait. Tu sais, moi aussi j'avais besoin d'être rassuré. Je me basais sur l'idée : « elle sait que je l'aime, elle sait ce que je ressens pour elle, pas besoin de l'exprimer par des mots, mes actes suffisent ». J'étais loin de la réalité. C'est grâce à toi si aujourd'hui je suis cet homme confiant. Tu m'as appris à m'accepter. Petit, je ne rentrais pas dans la catégorie des plus beaux et des plus minces. Notre rupture m'a fait comprendre que je me reposais trop sur ce que j'avais. Et ce n'était pas une bonne chose. J'ai changé, car au fond de moi, j'avais cet espoir de te retrouver et je voulais te rendre fière, que tu puisses voir mon évolution, qui je suis devenu.

— Tu sais très bien que l'apparence ne fait pas tout. Je suis tombée amoureuse de ta personnalité, de ta façon de me parler, de ta manière de me traiter. C'est vrai qu'aujourd'hui je parle à un homme, pas à l'adolescent que j'ai connu, ni l'enfant avec lequel j'ai grandi.

— En fait, ce qui nous a manqué, qui a joué contre nous c'est d'avoir négligé l'importance de discuter. On aurait dû se parler davantage, quand on sentait que tout partait en vrille au lieu de s'ignorer comme on l'a fait.

— Je n'en avais pas la force. J'étais à bout.

— Je comprends, moi aussi.

Ses yeux s'accrochent aux miens. Je lutte pour retenir mes larmes. On avait besoin de cette discussion. Maintenant, le plus dur est passé, du moins je l'espère. Elle ouvre les bras, attendant que je réagisse. Sans plus attendre, je la serre de toutes mes forces. Son contact, son odeur, sa proximité m'ont tant manqué. Mon coeur bat de plus en plus vite. Des bouffées de chaleur m'envahissent.

Sa présence me provoque un afflux d'émotions et je me sens bien.

Nous profitons du moment quelques instants. Elle renifle dans mon cou et un rire se fait entendre.

En se reculant, — Je vais retourner dans ma chambre. On se retrouve plus tard ? Ça te convient ?

J'acquiesce. Elle essuie ses larmes et m'offre un sourire. Nous nous levons du banc. Je l'ai emmené dans un petit coin tranquille, près de l'hôtel. Petit, j'y allais souvent avec mes parents. Nous y sommes depuis de nombreuses heures. Il est vrai que rentrer est une bonne idée, je dois avouer que je commence à avoir faim. Je tente :

— On dîne ensemble ?

— 19h ?

— Va pour 19h. Je passerai commande et te rejoindrai.

— Parfait, à ce soir.

Sa silhouette disparaît de mon champ de vision. Je reste seul quelques secondes, mettant de l'ordre dans mes idées.



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My trip for love ✈️Où les histoires vivent. Découvrez maintenant