VÉRITÉS DÉTOURNÉS

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La nuit s'était fait remplacer par le jour. Allongé sur le dos, mes yeux restèrent clos. Mon bras, replié sur mon visage, me protégeait des faibles rayons du soleil qui se frayaient un chemin entre les mailles du rideau tricoté par les mains habiles de Tomas. La couverture était abaissée, ne recouvrant que mes jambes.

Tomas, contrairement à moi, avait le sommeil lourd. Il dormait paisiblement à mes côtés, vêtu d'un caleçon et d'un t-shirt m'appartenant. Ma conscience m'avait poussé à le rejoindre dans sa chambre après l'avoir entendu hurler pendant la nuit. Sa peur du noir avait, une fois de plus, réveillé ses démons. Mais maintenant, j'étais soulagé de constater qu'il avait pu tomber dans les bras de Morphée, ses boucles désordonnées tombant sur son visage d'ange, sa bouche pulpeuse entrouverte.

Étrangement, j'aimais le voir endormi, loin des tracas qu'il pouvait avoir au quotidien. Était-ce normal que mon meilleur ami puisse me procurer tous ces sentiments ? Sûrement pas.

Je repensais à ces moments passés ensemble, quand tout semblait si simple. Quand nous étions juste deux gamins qui se comprenaient sans parler. Mais les choses avaient changé.

On n'était plus ces gamins.

Soudain, une musique familière brisa le silence. C'était la nôtre, celle de notre petit groupe de trois. Tomas l'utilisait comme réveille-matin. Un sourire amusé étira mes lèvres alors qu'il bougea légèrement, ses paupières papillonnèrent. Une expression de confusion s'empara de son visage alors qu'il se redressait un peu, son regard errant dans la pièce avant de finalement se poser sur moi. Pendant un instant, tout sembla s'arrêter. Pas un mot, juste un échange silencieux.

— C'est aujourd'hui, la rentrée ? murmura-t-il d'une voix rauque et ensommeillée, l'air hébété.

J'acquiesçai doucement, repoussant les mèches blondes désordonnées qui obscurcissaient sa vue. Je me mordillai distraitement la lèvre inférieure, mais avant que je ne puisse répondre, il éclata soudain de rire. Un rire franc, chaleureux et terriblement contagieux.

— Quoi ? Qu'est-ce qui te fait rire ? demandai-je en fronçant les sourcils.

Il se contenta de continuer, ignorant mes questions répétées.

Agacé d'être pris pour un imbécile, je cédai à une impulsion soudaine et attrapai la couverture, la tirant brusquement pour l'enrouler autour de moi. Tomas poussa un cri d'effroi, à la fois outré et hilarant, son ton légèrement aigu trahissant son indignation.

— Ta gueule ! lança-t-il, son visage rougi par la vexation.

Ce fut plus fort que moi : je riais à mon tour, incapable de me retenir face à sa réaction. Toujours piqué, il se redressa, pestant et insultant mes ancêtres sur plusieurs générations tout en fouillant dans sa garde-robe pour attraper un t-shirt et un pantalon.

— Va te rhabiller, espèce d'hétéro sexy, railla-t-il en me lançant un regard faussement provocateur.

Cette pique me prit par surprise, mais je ne laissai rien paraître. Je me levai, prêt à m'éloigner, mais une idée traversa mon esprit. Alors qu'il tournait le dos, occupé à trier ses vêtements — une collection remplie à 90 % de mes affaires empruntées —, je m'approchai silencieusement.

Sans prévenir, je posai ma main sur ses fesses et les caressai doucement, un sourire malicieux se dessinant sur mes lèvres. J'essayai de ne pas éclater de rire, me mordant la lèvre pour rester sérieux.

Il voulait bander, il bandera, citant mon propre "génie philosophique".

— Alors... Je suis sexy ? murmurais-je d'une voix moqueuse et suave.

Tomas se retourna vivement, les sourcils froncés, mais je me contentai de lui adresser un clin d'œil avant de me rendre dans ma propre chambre.

Je l'entendis rire au loin.

Une fois devant mon placard, j'attrapai les premiers vêtements qui me tombèrent sous la main et m'habillai.

En descendant les escaliers, pour rejoindre Tomas et Sandra, ma tante, je sentis une angoisse grandir dans ma poitrine. Un malaise inexplicable s'insinuait en moi, et même mes mains étaient, d'un coup, moites. Sauf que deux voix me coupaient.

— Sandra, je ne veux surtout pas briser ce que tu as construit avec Gaèl, mais je ne peux pas reprendre contact avec mes parents. C'est leur problème. Ce sont eux qui ont décidé de me mettre à la rue. Tout ce qu'ils veulent, c'est bien paraître. Dès qu'ils auront obtenu ce qu'ils veulent, je serai de nouveau jeté.

— Je sais, mon cœur, commença ma tante, sa voix douce mais ferme. Elle marqua une pause avant de continuer. Et je ne veux surtout pas t'obliger à faire des choses que tu ne veux pas faire. Mais pendant que tu te cloîtres dans ton silence, tes parents viennent pourrir ma boîte mail, et je peux t'assurer qu'elle en à marre d'accueillir des messages larmoyants. Je suis sûr que tu comprends ce que je veux dire par là, mon chéri.

Tomas ne répondit pas tout de suite.

— Ouais, ok, je vais leur envoyer un message, juste pour toi.

Je restai là, dans l'ombre des escaliers, absorbant chaque mot. Après de courtes minutes qui me semblèrent n'être qu'un claquement de doigts tant mes pensées fusaient dans tous les sens, je redressai la tête en sentant une présence. Mes yeux se posèrent sur Tomas, qui se tenait juste devant moi. Son visage était détendu, preuve qu'il ne devait pas se douter que j'avais tout entendu. Pourtant, de mon côté, une chose était claire : je ne connaissais pas Tomas aussi bien que je le croyais.

— Ça va, Gaël, tu es tout blême, dit mon meilleur ami lorsque nos regards se croisa

— Ouais, ne t'inquiète pas, répondis-je. C'est sûrement la rentrée qui me stresse.

Je lui offris un faux sourire et passai mon bras autour de ses épaules, le guidant vers la cuisine.

Lavie n'est qu'un putain de mensonge, Sunshine. Et chaque parole qu'on prononce,chaque silence qu'on garde, fait grandir ce monde

𝐒𝐔𝐍𝐒𝐇𝐈𝐍𝐄-histoire GayOù les histoires vivent. Découvrez maintenant