Chapitre 1

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  Athènes, 140 avant J.-C. :

  Une silhouette encapuchonnée avançait rapidement et le plus discrètement possible dans les rues peu éclairées d'Athènes.  Elle slalomait dans les ruelles pour éviter de croiser les gardes romains, accomplissant leur habituelle ronde nocturne.

Moins elle serait vue, et mieux elle se porterait, elle le savait très bien. Alors elle évitait les lieux éclairés, jusqu'à arriver à sa destination : une petite taverne peu connue, dans un coin reculé et sale, que les romains évitaient dès qu'ils le pouvaient.

  Elle toqua doucement à la porte en jetant un regard inquiet aux alentours. Dès que la porte s'ouvrit, elle se faufila à l'intérieur, retirant dans le même temps la capuche qui cachait son visage légèrement ridé sous ses ombres.

Elle se trouvait maintenant dans une pièce caractéristique d'une taverne, bien qu'un peu miteuse : des tables qui commençait à prendre la poussière, des chaises, un comptoir, des bouteilles... Tout semblait ne pas avoir servi depuis un moment.

  En face de la femme, se trouvait un homme, qui semblait, comme elle, se trouver dans la force de l'âge. Un âge respectable considérant les conditions de vie de ces temps anciens.

  - "Je ne suis pas en retard, j'espère ? demanda-t-elle avec un petit sourire à celui qui lui avait ouvert la porte.

  - Pas du tout, entre donc ! Il ne manque plus que notre doyen, et nous serons au complet !" lui répondit affablement l'homme alors qu'il s'avançait vers un escalier menant au sous-sol, un peu plus loin dans la pièce.

  Elle le suivit, et ils descendirent dans une pièce éclairée par des bougies où attendaient un groupe de gens, pas assez pour être appelés une foule, mais un certain nombre tout de même.

  Ils se glissèrent tous deux dans le cercle laissé par ce groupe en son centre. Dans ce cercle, étaient présents des hommes et femmes, comme eux d'un âge plus ou moins avancé.

  Un léger brouhaha recouvrait la pièce, venant des spectateurs. Dans le cercle, au contraire, il y régnait un silence impeccable, contrastant avec le reste de la salle. Aucun ne parlait, restait parfaitement immobile...

  Des statues attendant leur signal pour s'éveiller.

  Signal qui survint bientôt sous l'apparence d'un vieil homme, semblant défier la mort. Dans ces anciens temps, résister jusque plus de 50 ans forçait le respect, et cet homme-ci semblait en avoir le double. Il se plaça au centre du cercle, puis claqua deux fois dans ses mains, réclamant le silence.

  Silence qui se fit ensuite, au fur et à mesure que tout l'attention se reportait sur les vieillards debout bien droits au centre.

  Le doyen prit alors la parole, d'une voix  qu'on sentait marquée par le temps, mais claire et audible.

  - "Bienvenue à tous et toutes à cette énième assemblée des Passeurs d'Histoire avec un grand H. Vous êtes ici ce soir pour entendre l'histoire d'un homme qui a marqué le monde et les dieux par son intelligence et son inventivité : Dédaleus.

  Une autre femme du cercle prit ensuite la parole, fluidement, comme si cela avait été préparé à l'avance (ce qui était d'ailleurs sûrement le cas).

  - "Dédaleus a connu une vie longue et pleine de péripéties. Mais son plus grand exploit restera dans les mémoires comme le Labyrinthe qui abrita le Minotaure, enfant maudit de Pasiphaé et d'un taureau blanc."

  Un homme prit ensuite la parole alors que la femme se taisait, selon un schéma bien rôdé et répété pour être parfait.

  - "Pourtant on ignore souvent les parties moins connues de son histoire, comme la fois où il tua son neveu ou celle où il poussa trois princesses à tuer un roi. Mais ce soir, vous allez tout entendre, et tout savoir de ce génie mythique."

  La petite dizaine de personnes âgées se relayèrent alors pour relater ainsi l'histoire de Dédaleus, plus connu maintenant sous le nom de Dédale. De sa naissance jusque sa supposée mort après sa disparition, à la suite de la mort de Minos.

 Dès que le dernier conteur referma la bouche après avoir clôturé cette histoire, le silence qui régnait se fit soudain entendre. Et puis, dans la mécanique bien huilée qui guidait cette soirée, tous les spectateurs se mirent à discuter. Chacun se tourna vers son voisin pour exposer son point de vue et débattre sur le génie qu'avait été Dédale.

 Le doyen de l'assemblée reprit une dernière fois la parole, souhaitant une bonne soirée à toutes les personnes présentes, les remercier d'être venues, et surtout de leur demander de parler de l'assemblée des Passeurs d'Histoire autour d'eux.

 Ceci fait, tous les grecs quittèrent un à un la salle, laissant les conteurs.teuses échanger sur cette énième soirée qu'ils venaient d'animer.

 Personne ne sembla remarquer le fait que le plus âgé des hommes présents se dirige silencieusement vers une salle annexe, sans échanger un mot avec personne. Cela faisait partie de leur quotidien : à la fin de chacune des présentations, il disparaissait un moment dans cette salle, durant parfois un quart d'heure, parfois plusieurs heures durant. Il en ressortait toujours un air satisfait collé au visage.

 Personne n'osait le suivre, car il n'invitait personne. D'un commun accord, ils n'en parlaient même pas. C'était un mystère qu'ils ne résoudraient sûrement jamais, mais ils n'y prêtaient qu'une petite attention.

 D'autant que l'homme en lui-même les effrayait... De quelle sorcellerie usait-il pour réussir l'exploit de vivre encore après toutes ces années ? Avait-il les faveurs d'Hadès ? Ou bien de Thanatos ? Beaucoup de mystères flottaient autour de cet homme, dont on connaissait à peine le nom : Perdix.

 Un soir, après qu'ils aient conté l'histoire de Tantale, le vieux Perdix disparut une fois encore dans la même salle, mais ne sembla pas remarquer le fait qu'il en ait mal fermé la porte.

 Mais ce détail ne passa pas inaperçu aux yeux d'une des femmes du groupe : Citimene. Celle-ci était la dernière encore présente dans la taverne, et elle ne pouvait s'empêcher si on lui en voudrait tant si elle jetait un œil à ce que laissait entrevoir la fente laissée par l'entrebâillement de la porte.

 Après quelques minutes d'hésitation, n'y tenant plus, elle s'approcha furtivement de la porte et s'efforça d'apercevoir ce qui se passait à l'intérieur.

 Ce qu'elle y vit la laissa perplexe : le vieil homme était assis à même le sol devant un objet qu'elle ne saurait identifier.

 Il était composé de deux parties, une émettant une étrange lumière, bien différente de celle produite par les bougies auxquelles elle était habituée, et la deuxième recouvertes de bouts d'une matière qu'elle ne saurait décrire sur lesquelles étaient écrites... L'alphabet ? Oui c'était bien l'alphabet grec qu'elle voyait écrit sur ces pièces sur lesquelles Perdix tapait frénétiquement.

 Il marmonnait tout en martelant son étrange objet et elle crut percevoir les mots "dieux" et "Tantale".

 Plus intriguée que jamais, elle se força à reculer pour éviter d'être surprise.

 Quel était donc cet étrange objet, et pourquoi Perdix le cachait-il aux yeux des autres ? Que faisait-il lorsqu'il tapait ainsi sur ces petites lettres ? Et d'où venait la lumière qui éclairait la première partie de l'objet ?

 Tant de mystères auxquels elle n'avait aucune réponses...

 Tant de mystères qui venaient s'ajouter à la longue liste qui entouraient le vieil homme...




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