Poker Face.

Chapitre deux.

Il est quatre heure trente du matin et nous sommes tous regroupés autour de cette table de Trente et Quarante de la salle Europe. Le cuisinier du restaurant Mosaïk - deux salles plus loin - nous a ramené les restes de ses tapas de la soirée. On grignote tout en racontant nos meilleurs clients, comme ceux qui nous ont bien rempli les poches de pourboire pour qu'on essaye de les faire gagner même si on ne le fait pas et qu'on fini par prétexter que "c'était qu'un jeu de hasard" ou encore ceux comme celui que j'ai eu, qui font tout une histoire parce qu'ils ont perdu leurs mise complète, par leurs propre faute.

Gregory fume tout en préparant le jeu de Trente et Quarante, c'est similaire au Black jack, ça se joue sur 52 cartes. Il pose la rangée des noirs et la rangée des rouges et c'est en fonction des valeurs des cartes posées sur ces rangées que les joueurs gagnent en misant sur la "rangée gagnante", en gros. C'est vraiment un jeu de hasard et ça nous occupe bien quand on pari nos quelques tapas.

Jean-Paul est en retrait comme toujours. Il relit ses notes. C'est un bourreau du travail, j'ai l'impression qu'il ne vit que pour ça alors qu'en dehors de cette grande bâtisse il pourrait rejoindre sa femme et sa fille de six ans. Mais non, il préfère relire et répéter tout bas les phrases de présentation de chaque salles pour les connaitre sur le bout des doigts. Alors, qu'entre nous, ces phrases sont clairement inutiles.

Ne serait-ce que la "devise" du lieu, d'accord. Mais cette phrase là toute l'équipe la sait et même quelques clients fidèles à force de l'entendre sur les lèvres de tout le monde : « Le Casino de Monte-Carlo est aux jeux ce qu'une maison de Haute Couture est à la mode : l'élégance y évolue sans cesse pour suivre l'air du temps, mélangeant des machines de haute technologie et des jeux traditionnels. »

- Quoi qu'on puisse dire, la Princesse elle a peut-être un balais dans le cul, mais ça m'empêcherait pas de le remplacer par ma bite ! Crache Greg suivi d'un rire rauque.

C'est dingue comme ce mec est irrespectueux, mais le pire ce sont les autres qui le suivent dans un fou rire général. Michael me frappe gentiment l'épaule en voyant mon air déconfite, ce n'est pas comme-ci je ne savais pas qu'ils faisaient le même genre de vanne salace sur ma sœur quand elle venait me chercher de temps en temps pour me dépanner. Alors je reste de marbre et je ne les écoute que d'une oreille distraite raconter leurs péripéties en compagnie de LA mademoiselle de Monaco. La pauvre, elle est partie de ce casino sans se rendre compte que le trois quart du personnel n'en avait que pour son cul et sa belle gueule.

JP tente sa chance lors du dernier jeu et il gagne. Il a l'air tellement heureux de cette victoire alors qu'il n'a rien gagné vu que les tapas ont été raflé en intégralité depuis un moment, maintenant. Même si ce gars est vieux jeu, un peu trop strict sur les bords et mal fringué hors du boulot, il a l'air d'être en sucre, au fond.

Je rentre aux alentours de six heures du matin, des cernes qui pourraient tomber au sol tellement elles dégoulinent sous mes paupières. Et c'est comme ça trois à six soirs par semaine. 

*

On est vendredi soir et ce sont mes dernières heures de la semaine. Je réajuste mon veston brillant, mon pantalon mal coupé et peaufine mon sourire. J'occupe la salle des Amériques ; trois caisses de change, huit tables de Black Jack et deux de roulettes américaines. Michael et Justine me rejoignent donc pour occuper quelques tables ainsi d'autres personnes que je ne côtoie pas ; soit parce qu'elle ne sont pas intéressantes, soit parce qu'elles occupent habituellement des salles qui abritent des personnes trop importantes pour que j'y mette les pieds.

Il risque d'y avoir énormément de clients même si bien souvent les personnes qui viennent dans ce Casino se réfugient dans la salle Blanche : là où il y a toute les machines automatiques et où t'as besoin de faire aucun effort à part mettre tes jetons dans la feinte pour et actionner le levier...