Chapitre 9 - Marlon

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— C'est quoi cette odeur immonde?, hurle Nick en entrant dans l'appartement.

Je me marre en observant sa réaction.

— Jasmin, tu n'aimes pas?

— Mec, je te jure que .... Oh non, tu es allé la voir, s'énerve t il en prenant la bougie en main.

— De quoi tu parles?, je feins en rangeant la vaisselle qui traîne dans le cuisine.

— Esmée's Candle! Tu me prends pour un con?!

Oups... je grimace, j'aurais peut être dû enlever l'étiquette sur le pot...

— C'est bon, je suis juste passé devant sa boutique et .... bon ok, je suis allé la voir, c'est pas si grave, je m'énerve en voyant son regard noir.  

— Et alors?

— Alors rien, j'ai acheté une bougie, j'ai contemplé son ventre qui grossit et je me suis barré, c'est tout!

— Vraiment?!

— Oui, vraiment! 


Dans les semaines suivantes, Nick a cessé de me faire des réflexions après la 4ème bougie. Il se contente de regarder le nouveau parfum que j'ai ramené avant de continuer sa vie. Il ne peut s'empêcher une petite pique de temps en temps du genre "pour quelqu'un qui a besoin de thunes, je te trouve très dépensier en objet de déco ridicule". Il n'a pas tout à fait tord mais je m'en fous. 

Je rends visite à Esmée tous les deux jours en moyenne à la boutique. Elle sourit un peu plus à chaque fois et adore me raconter les aléas de sa grossesse. J'ai même eue droit à une vidéo de sa dernière échographie. Entendre les battements du cœur de son bébé était aussi perturbant que réjouissant.

Nick s'inquiète pour moi, pour elle. Mais je n'ai fait aucune promesse et je ne lui fais rien miroiter. Pour elle, je suis toujours l'escorte gestionnaire de portefeuille et c'est tant mieux. Je n'ai pas l'intention de lui dire d'où je viens ni ce que je fais réellement. Elle me mettrait à la porte dans la seconde et j'ai besoin de la voir. Je sais qu'un jour ou l'autre, je devrai cesser ce petit jeu ridicule, soit parce qu'elle découvrira la vérité, soit parce qu'elle trouvera un homme capable d'élever son enfant sans entacher son image. En attendant, je fais ce que j'ai toujours fait. Je ne m'occupe pas de ce que les autres pensent et fais ce qui me plaît. 

Au milieu de la nuit, je suis réveillé par les vibrations de mon téléphone. Je laisse passer le premier appel et réponds furieux au deuxième qui ne me laisse pas l'occasion de me rendormir.

— Quoi?!, j'aboie sans prendre la peine de regarder qui m'appelle.

— Marlon? couine une voix tremblotante.

— C'est qui?

— Esmée ... Je ... il y a du sang partout, je crois que je suis en train de le perdre, pleurniche t elle. 

— Pourquoi t'appelles pas ton mec?, je marmonne encore à moitié endormi.

Je n'ai aucune idée de ce dont elle me parle, qu'est ce qu'elle a bien pu perdre avec du sang au milieu de la nuit?

— Tu es con ou tu le fais exprès?

— Oh putain, je jure en me relevant brusquement.

Ca y est j'ai enfin compris ce qu'il se passe. Pour ma défense il est 3h du matin et je ne suis pas expert en bébé ou en grossesse alors j'ai droit à quelques secondes pour émerger, non? Merde, il faut que je rattrape ma bourde.

— Désolé Esmée, je dormais, j'ai pas compris. Envois moi ton adresse, je me mets en route tout de suite.

Je raccroche et enfile les premières fringues que je trouve. Je manque de m'étaler par terre en voulant enfiler mon pantalon trop rapidement et me cogne contre le mur. Je croise Nick dans le couloir qui m'interroge mais je n'ai pas le temps de lui expliquer.

— Je t'écris tout à l'heure, je crie depuis l'entrée. 

En quelques minutes, je suis devant chez elle. Je monte les marches 4 à 4 jusqu'au troisième étage et ouvre sa porte sans frapper. Elle sursaute en me voyant pénétrer son appartement et je cours vers elle. Assise sur son canapé, elle tremble de la tête aux pieds et son visage est ravagé par les larmes. 

— Viens, je t'emmène à l'hôpital, je lui dis en l'aidant à se lever. 

Ses jambes supportent à peine son poids tant elle est paniquée. J'enserre sa taille et la porte plus que je ne la soutiens. Dans la voiture, elle ne parle pas et continue à pleurer en silence. Je roule aussi vite que possible jusqu'aux urgences. Là bas, l'équipe médicale débordée vient lui poser une simple question.

— Combien de semaines?

— 13 semaines d'aménorrhées.

Pendant la demi heure suivante on ne revoit personne. Les équipes nous passent devant sans prendre en considération son mal être ni même l'examiner. Esmée finit par s'endormir contre mon épaule, épuisée par les événements. C'est au bout d'une heure d'attente que je pète un plomb. Je cale sa tête avec ma veste contre le dossier et saute sur un médecin qui passe dans le couloir. 

— Ca fait une heure qu'on attend et personne n'a daigné la regarder. Elle est en train de perdre son bébé et tout le monde s'en fout, je m'emporte.

Il me redemande à combien de semaines de grossesse elle en est et il ne trouve rien de mieux à répondre que :

— On ne peut rien faire à ce stade, on l'examinera quand on aura le temps, on a d'autres urg...

Mon poing agrippe son col et mon visage se rapproche dangereusement du sien. il blêmit en comprenant que je ne suis pas d'humeur.

— Vous n'en savez rien du tout, je crache. Personne ne la vue, personne ne l'a examiné. Alors ne venez pas me dire que vous ne pouvez rien faire sous prétexte qu'il n'est pas viable à ce stade.

— Marlon, arrête. 

 Sa voix n'est qu'un murmure et je relâche le médecin sans ménagement, les mâchoires crispées.

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