Entre ombres et lumières

Chapitre 2

Dans dix minutes, le réveil sonnera et je n'ai presque pas dormi. Je fixe le plafond depuis des heures, pensant à quel point ma vie a changé. Il y a seulement deux semaines, j'avais encore mon frère et un toit au-dessus de ma tête. J'étais plus ou moins stable dans ma vie. J'arrivais à mettre un masque pour cacher ma tristesse. Je m'étais forgé une carapace, parvenant à ne plus rien laisser m'atteindre.

Quand je croisais mes parents, je les ignorais, et quand j'allais au lycée, je jouais un rôle. Je traînais avec des gens odieux, ne respectant rien, harcelant beaucoup de gens. Et je les suivais, car je ne voulais pas revivre ce que j'avais vécu dans mon ancienne ville, il y a un an...
Je voulais vivre ma dernière année de terminale sans me faire manger par les autres. Puis j'enlevais mon masque, une fois dans ma chambre ou avec mon frère. Je libérais mes émotions, enfin le peu que j'avais. Et j'arrivais à vivre ainsi car je me disais que dans quelques mois, c'était fini.

Je crois que je n'ai toujours pas réalisé que je suis loin de cette vie d'avant. Et que rien ne sera plus jamais comme il y a deux semaines.

Je regarde l'heure et je me rends compte que j'ai oublié d'allumer mon réveil. Jessica est censée arriver dans dix minutes et je ne suis toujours pas prête. Mes affaires sont éparpillées sur la table basse et mon sac de couchage est encore sur ce fauteuil. J'ai aussi laissé ma commande de pizza sur le bar que j'ai oublié de ranger hier soir, alors il faut que je me dépêche avant qu'elle ne remarque où je dors. Je me mets en action, et en moins de dix minutes, tout est rangé. Heureusement, car j'entends la porte sonner, ce qui signifie qu'elle est arrivée.

Ma vie est un vrai fardeau je n'ai pas de logement et je vis, ou plutôt je squatte, dans le bar où je travaille. Quand je suis venue la semaine dernière pour savoir s'ils embauchaient, j'ai commencé le lendemain et j'ai plutôt apprécié.

Ça pourra payer les réparations de la voiture. Mais je n'ai toujours pas assez d'argent pour trouver un logement. Jessica, elle ne sait pas, parce que je savais très bien qu'autrement elle aurait voulu m'aider. Je n'ai pas envie de m'immiscer dans la vie des gens.

Quand elle me repère derrière le bar en train de laver des verres, un sourire éclaire son visage, et je lui souris en retour.

- Salut, j'arrive dans deux minutes !! Dit-elle . Elle pose ses affaires derrière le comptoir et s'en va dans l'arrière-bar. En attendant, je nettoie les verres sales d'hier soir que je n'ai pas lavés car j'étais trop épuisée.

- Ne t'inquiète pas.

Elle et moi, on se connaît depuis une semaine et demi maintenant, et je m'entends vraiment bien avec elle. On a un bon feeling même si j'ai encore du mal à accorder ma confiance. Mais elle le comprend, elle me pose pas de question trop personnel pour ne pas me braquer et cela montre vraiment qu'elle est quelqu'un de bien. Ça fait plus d'un an et demi que je n'ai pas eu de vrais amis, et c'est vraiment étrange. Je me pose plein de questions.

Est-ce qu'elle m'apprécie vraiment ?

Peut-être qu'elle a de la peine pour moi et c'est pour cela qu'elle est gentille ?

Quand elle revient, elle tient quelque chose dans sa main, et lorsque je regarde l'objet, mon cœur commence à battre très vite. J'aperçois ma trousse de toilette que j'ai sûrement oubliée de ramasser ce matin.

- Oriana, pourquoi c'était dans les toilettes ? me demande-t-elle en levant la pochette en l'air.

Je lui réponds en bégayant et en hésitant :

- Oh ça, ce matin, j'étais en retard, donc j'ai dû me préparer ici. J'espère qu'elle me croit, mais en tout cas, elle en a l'air, car elle va à ses occupations comme tous les matins depuis que je suis arrivée.