"Aujourd'hui, plus qu'hier, je chéris les souvenirs de mon enfance. Ces moments emplis de nostalgie dont les effluves sucrées me parviennent encore. Les longues soirées de chants et de rire parmis la troupe autour d'un feu, nos courses folles dans les champs fleuris du vieil Ernasse en compagnie de Liliette, Simen et Markoul. La splendeur de la vue du port d'Enmasseï tout en haut des mâts, nos représentations au bal de Tuly, la porte ambrée de Kirande. Cette période où le temps défilait aussi vite que peut l'être un faucon en pleine chasse et qui, pourtant, semblait s'être arrêtée.
Plus que tout, je chéris les heures passées avec Gurlok, mon père d'adoption, à écouter ses récits, le voir sur la piste aux étoiles, à apprendre à rouler les badots. Mais aussi et avec autant de passion ceux passer avec Ereïdan, mon mentor. Nos entraînements jusqu'à tard dans la nuit, nos parties de chasse, son rire si communiquant et, étrangement, toutes ces gifles reçues par un amour d'attache dans un port. L'un nous a quitté subitement, rattrapé par les caprices d'un destin ignorant tout de la miséricorde. L'autre a décidé, égoïstement, de marcher seul, tournant le dos à cette famille qu'il avait pourtant juré de chérir plus que tout.
Étrangement je leur en veux du plus profond de mon être et pourtant c'est à ce même endroit que la petite fille qui courait autour du feu, sous leurs rires et encouragements, les pardonne. Est-ce la naïveté enfouie de l'enfance qui provoque ce malaise en moi? Ou tout simplement un raisonnement des plus justes que je me dois d'adopter? Après tout, quand ont-ils pu penser à eux mêmes pendant toutes ces années? Combien de sacrifices ont-ils faits pour nous? N'est-ce pas moi qui suis, après tout, égoïste?
Tant de questions se bousculent dans ma tête. Des raisonnements qui viennent assombrir ses souvenirs qui me sont si chers. Je me dois de trouver des réponses. Peut-être ont-ils besoin de moi alors que je me morfonds, de manière injustifiée, sur mon sort.
La petite fille ne courra plus le monde pieds nus, ses cheveux auburns flottants aux vents. Ratymor et moi avons pris une décision qui, j'en suis certaine, changera notre vie à jamais. Il me tarde de découvrir les paysages de mon enfance d'un œil nouveau. Il me tarde de retrouver mes pères et de les enlacer.
Demain plus qu'hier je chérirai les aventures d'aujourd'hui.
Jagera Evanésseï, 24 jordas de l'an solaire 1524."
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Dragnor: Les amants de la Tour Pourpre
ParanormalLes légendes sont elles réellement ce qu'elles prétendent être? N'a-t-on jamais réécrit la vérité pour la faire paraître plus romantique et héroïque? Au lendemain d'une guerre ayant ravagé le continent de Dragnor, le culte de Sand et Miradeï, fiers...