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Il pleut.
L'obscurité règne.
Je tremblote légèrement.
Il est vingt et une heures, et l'arrêt de bus est exempt de toute animation. Il n'y a que deux jeunes hommes, une femme, moi-même et mes pensées tapageuses.
Je ne prête guère attention à ce vacarme silencieux que sont les bruits urbains ; mon regard demeure enraciné sur mes bottes noires usées. La tête penchée vers l'avant, je ressens.
Les larmes des nuages désormais ternis.
Depuis ma mémoire la plus lointaine, j'ai toujours chéri les temps pluvieux. De mon plus jeune âge à mes vingt et un ans. Peut-être cette adulation pour ces pleurs célestes me vient-elle de ce rêve d'enfant d'être libre comme un nuage.
Ô combien j'en rêve encore.
D'être aussi beau, aussi puissant et aussi courageux qu'un nuage qui n'éprouve nulle honte à verser ses sanglots d'en haut.
Les gouttelettes sont mon reflet. Elles sont mes compagnes fidèles.
Elles partagent mes souvenirs douloureux.
— Pourquoi pleures-tu pour si peu, bon sang !
Sa main s'empara d'un vase qu'il lança avec toute sa rage enfouie contre ma hanche dénudée.
Mille et un éclats implosèrent, ceux du vase brisé et ceux de mon cœur réduit en miettes. Ce chaos se mêlait à mon sang et à mes cris.
— J-Je suis dé-
— Tais-toi, putain !
Du sang, de la sueur et des larmes souillaient le sol que je croyais à jamais imprégné de souvenirs joyeux.
Mais pas seulement, elles me touchent, m'apportant tous ces picotements légers sur mon épiderme.
Je tendis alors le revers de ma main vers le haut.
Ses mains glissèrent sous le tissu de soie qui enveloppait ma peau. Ses doigts agiles dénouaient le nœud papillon de ma robe de chambre tandis que je capturais doucement ses poignets.
— Pas aujourd'hui, s-s'il te plaît, murmurais-je.
Ses ongles griffèrent mes veines jusqu'à mon avant-bras avant qu'il ne pose son nez contre ma mâchoire.
— Allons, mon chéri... Je prendrai soin de toi.
Elles ne m'ont oncques menti. Elles ne mentiraient tout simplement jamais.
