Chapitre 1

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Chapitre 1

– Chérie, ça fait déjà trois fois que le salon m'appelle, pourquoi tu n'es pas au boulot et pourquoi tu ne leur réponds pas au téléphone ? Si tu continues, tu vas te faire virer.

J'essuyai mes larmes avec le bout de la manche de mon pull. Je me fixai dans le miroir, dégoûtée de moi, dégoûtée par ma faiblesse et sa force. Je n'avais envie de rien. J'étais vide. Je ne ressentais plus rien.

— Désolé, maman, dis-leur que je ne me sens pas bien, je ne vais pas y aller. Dis-je d'une petite voix au bout du fil avant de raccrocher.

Je pris mon fond de teint rangé dans le tiroir de ma coiffeuse et l'étalai sur tous mes bleus. Je ne devais pas avoir l'air faible devant les gens. S'ils savent que je le suis, ils en profiteront. Comme lui.

Mes yeux étaient dénués de toute émotion. Je n'avais qu'une envie, mourir. Car c'est le seul moyen de me sortir de cet enfer. Je ne peux plus le supporter. Ce n'est pas une vie. Aucune femme ne devrait avoir vécu ça.

Mais peut-être que je n'ai jamais mérité mieux, moi. Peut-être que je vis tout ça parce que c'est ce que je dois vivre. Peut-être que c'est le destin. Peut-être que tout ça était écrit et que je dois être la femme qui soulage les autres. Pour le soulager lui, quand il en a envie.

Enfin bref, il est enfin parti, et moi, encore une fois, j'ai loupé le boulot. À cause de lui. Car tout est toujours de sa faute. Maintenant, j'ai toute une journée devant moi pour me préparer à être menacée de me faire virer demain et à faire à manger pour monsieur quand lui, a fini de travailler.

C'est très rare qu'il me laisse sortir pour aller travailler. Cela fait déjà trois salons de coiffure que je collectionne depuis même pas un an. Je ne peux même pas m'attacher à des collègues sympas ou à une bonne ambiance au travail, non, je me fais virer dès qu'ils comprennent que je ne suis jamais vraiment malade et qu'à leurs yeux, je n'ai aucune raison de rester chez moi alors que j'ai un travail.

Une fois ma peau parfaitement maquillée, je commence à couper des légumes. Aléatoirement, en espérant au fond de moi que le repas ne sera pas aussi bon que celui auquel il pense toute la journée en travaillant. Alors je coupe des carottes, des tomates, des courgettes, des poivrons. Tout ce qui me passe par la main avant de faire cuire à la poêle.

Étouffe-toi avec ça, connard.

Connor, Connard. Ça se ressemble, non ? Je pense que ses parents ont fait exprès de l'appeler comme ça, ils avaient peut-être déjà deviné que ce serait un gros con. Il aurait dû crever avec eux au lieu de rejeter sa colère sur moi, ce bouffon.

Après avoir préparé un repas qui avait l'air... Appétissant à sa manière, on va dire, je mit une tenue qui paraissait plutôt propre. Toutes les autres avaient des traces blanches ou étaient déchirées. C'était très rare que je porte des vêtements vraiment propres ou sans histoire.

Je pense que je n'ai même plus de vêtements « innocents ». C'est comme ça que j'appelle mes tenues qui n'ont rien subi. Des tenues que je n'ai jamais portées pendant qu'il m'arrivait quelque chose.

Il avait bien pris soin de les salir, toutes autant que les autres. Il m'en achetait des nouvelles parfois, mais c'était pour les tacher après. Ce n'était que de simples habits pour l'exciter et rien d'autre. Même pas pour me faire plaisir. Lui, il pensait que c'était en couchant avec lui que je prenais du plaisir, mais c'était tout l'inverse.

J'avais mal, je lui criais d'arrêter. Pourquoi n'entendait-il pas mes supplications ? Le faisait-il exprès ? Il voulait me voir souffrir ou il voulait me faire plaisir ? Je ne comprendrai décidément jamais ce qui se passe dans la tête de cet homme. Et elle ne comprendra jamais ce que je ressens également.

Release MeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant