𝐗𝐕

62 15 161
                                    

Je marche dans l’obscurité d’une noirceur d’encre, sous les arbres ébauchant des silhouettes difformes et abominables. Le vent glacé de la nuit agite mes cheveux semblant les entraîner dans une danse effrénée. Soudain, un cri résonne. Le genre de cri qu’il est difficile d’oublier, lorsqu’en fermant les yeux il revient hanter les esprits. Un cri glaçant, paralysant. Puis de nouvelles silhouettes refont surface. Le visage déformé par l’horreur absolue, les yeux vides et une expression terrifiante gravée dans leurs traits. Pourtant je ne les reconnais que trop bien.

La fille du 7, les tributs du 6, ceux du 1, Arya, Thor.

Ils me toisent avec une haine vivace, glaçante. Leurs cris résonnent toujours, ces cris que j’ai entendu avant qu’ils ne succombent.

Puis leurs visages changent.

La tête de la fille du 7 se détache de son cou.

La fille du 6 s’enflamme devant moi.

Une plaie se forme sur l’abdomen du garçon du 6.

La fille du 1 se met à cracher du sang.

Je revis inlassablement les scènes de leur mort, sur un arrière-plan de cris, de supplications et de désir de vengeance. C’est à cause de moi, tout est à cause de moi. Je revis ces scènes comme punition, abomination de mes crimes.










J’ouvre les yeux péniblement, paralysée par le froid. Je n’ai plus aucun souvenir de mon cauchemar, mais je le devine à mes tremblements. Le vent résonne contre les paroisses fines de l’igloo, soufflant dans l’opacité de la nuit. Je me desserre de Lartius et me redresse avec difficulté.

— Bien dormi ? me demande mon allié.

— Ouais… je marmonne d’une petite voix. Ça fait combien de temps ?

— Presque dix heures, mais ne te fie pas à dehors, il fait toujours nuit dans la zone hivernale.

— Désolée, rien ne s’est passé pendant mon sommeil ? je demande en redoutant presque la réponse.

— Ils ont annoncé un nouveau concept, un festin ou je ne sais plus comment ils ont appelé ça, déclare-t-il d’une voix grave.

— Et en quoi ça consiste ?

— Une sorte de deuxième bain de sang, ils vont remplir à nouveau la corne d’abondance de nourriture et d’armes. Je pense que c’est pour ça qu'on a pas eu beaucoup de sponsors dernièrement, ils voulaient tout miser sur cette nouveauté. Si les tributs manquent de nourriture ils n’auront qu’à aller au festin, ça va nous obliger à combattre et c'est ce que veut le Capitole je suppose.

— Lartius, dis moi que tu ne comptes pas y aller, je demande d’une voix tremblante.

— On a pas vraiment d’autres solutions… Ils ont dit qu’il n’y aurait plus de sponsors jusqu'à la fin des jeux.

— Quoi ? Mais on n’en a eu qu’un !

— Ah bon ? Il ne t’en ont pas envoyé avant ? On en a reçu deux avec Arya et Thor.

— Peu importe, si on y va on va se faire tuer ! Regarde notre état, tu peux à peine te déplacer et moi avec mon bras cassé je suis incapable de combattre.

— Je sais… à mon avis il faudrait que l’un de nous reste caché à proximité et que l’autre y aille. Si jamais il y a un problème celui d’entre nous caché pourra venir aider l’autre.

— C’est risqué… je murmure en baissant les yeux.

— Mais si on reste ici on mourra de faim.

Il se rapproche de moi et me chuchote à l’oreille presque imperceptiblement.

𝐇𝐮𝐧𝐠𝐞𝐫 𝐆𝐚𝐦𝐞𝐬. édition 25 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant