Chapitre 2

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Gabriel s'arrêta et esquissa un mouvement circulaire de son bras, englobant ainsi sa ville ; Caltricia. Vue du haut de la colline, elle étincelait de mille feux chaleureux. Les étoiles avaient parsemé la ville d'une mince couche de leur poussière lumineuse. Le faible éclairage blafard de la lune ne refroidissait pas cette atmosphère envoûtante, accroissant au contraire son élégance mystérieuse. Une élégance qui m'ensorcelait et me séduisait. Je désirais m'en approcher à tout prix.

Caltricia procurait en moi un apaisement bienvenu, que je n'avais pas ressenti depuis très longtemps. Elle instaurait dans mon corps l'impression de me trouver au bon endroit, au bon moment.

— Je suis subjuguée, chuchotai-je, me sentant obligée de baisser le ton devant le charme émanant de la ville.

— Telle est souvent la première pensée des visiteurs de Caltricia, sourit Gabriel. Si tu l'apprécies, Celtida risque de te plaire également. Surtout en ce moment, à l'approche de la Célébration d'Hélios. La fête nationale d'Atalia, ajouta-t-il devant mon haussement de sourcils, manifestant ma curiosité grandissante.

Mon affection pour l'Histoire et tout ce qui y avait attrait refaisait surface malgré les circonstances dramatiques. Comment pourrais-je ne pas m'intéresser à une culture dont j'ignorais tout ?

— Pourquoi est-ce la fête nationale ?

— Le vingt-deux février, dans quatre jours, les Ataliens célébreront la mort du roi Modraï Norisey. Cette année, notre peuple sera libéré de son joug depuis soixante-dix ans exactement. Ce jour férié se nomme ainsi puisque Hélios représente le soleil, et lorsque ce roi décéda, les fleurs de la joie germèrent de nouveau dans notre royaume. Ici, le soleil est la principale métaphore du bonheur.

Plusieurs constats s'imposèrent à mon esprit. En premier lieu, je n'avais pas changé de jour ou de mois à mon arrivée. Ensuite, des points communs reliaient nos civilisations, comme la signification de « Hélios ».

— Quels crimes avait-il commis pour que les Ataliens soient si heureux de le savoir mort ?

Ordinairement, la Mort avait pour conséquence des torrents de larmes et une tristesse sans faille, pas le sourire aux lèvres de milliers de personnes. Je pouvais en attester.

— Des horreurs sans nom. Pour n'en citer que quelques-unes, il avait entrepris de séparer le nord d'Atalia du sud en construisant un mur infranchissable. Il a également déclaré la guerre aux peuples frontaliers, ou encore voulu éliminer tous ceux qui ne vivaient pas dans la capitale par le biais d'une famine.

Il me fallut un moment pour encaisser la rudesse des mots de Gabriel, mais surtout, l'explication qu'ils contenaient. Comment pouvait-on se montrer si terrible ? Un monstre avec le pouvoir entre ses mains détruisait tout sur son passage. Un seul homme causait sans remords la misère de milliers d'autres.

— Remettons-nous en route, je crains une rencontre malvenue si nous restons trop longtemps près de ces sentiers. Nous arrivons bientôt.

J'acquiesçai et laissai mes pas me porter, réfléchissant aux nombreux dirigeants qui, par le passé, avaient semé le mal autour d'eux. Ils ne manquaient pas.

Mon regard caressait les maisons à colombages, survolait les rues pavées et étudiait avec attention les pancartes en bois indiquant des noms de boulevards et chemins. Impasse de Cenalla, annonçait celle dans laquelle nous pénétrâmes. Gabriel s'immobilisa devant le porche d'une demeure et posa sa main à plat au-dessus de la poignée. Perplexe, je restai silencieuse lorsqu'un claquement retentit dans le calme de la nuit, déverrouillant la porte.

Gabriel abaissa le battant, m'invita à entrer et me demanda de patienter dans le vestibule quelques instants. Je m'attardai sur cette réflexion et me promis de lui poser la question lorsqu'il reviendrait.

Le Royaume d'Atalia - PriméliaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant