IMBER | jikook

• chapitre 6

Jamais personne ne l'avait prévenu que l'amour pouvait faire si mal. Il ignorait depuis quelques jours les appels et messages de Taehyung. Cela avait déjà été assez dur de le féliciter, de lui sourire et de le prendre dans ses bras alors que tout son monde se fracassait devant ses yeux. Taehyung n'était pas seulement un meilleur ami ou un crush; Taehyung était sa vie. Il était celui qui avait ramassé les miettes de ce qu'il restait de son âme après la mort de son père, il avait été le bouclier qui le protégeait de tout le monde quand on se moquait de la couleur de ses yeux ou de ses fossettes, il avait été ce pourquoi il travaillait si dur. Il était si simple à aimer, à adorer. Dans sa vie si compliquée, Tae était la seule chose qui avait toujours été stable peu importe le nombre de fois où il avait dû s'appuyer sur lui pour se relever. Il était persuadé que c'était la même chose pour Taehyung. C'était avant qu'il ne lui annonce pour sa copine. Tae avait sa propre vie, son propre avenir et Jimin n'était pas dedans autant qu'il l'aurait aimé. Quand il lui avait demandé quand est-ce qu'il serait libre pour la rencontrer, il avait inventé des rendez-vous et des peintures à finir qui n'existaient pas, et même si elles existaient, il les aurait annulé pour lui. Et c'était tellement douloureux de se dire qu'il le ferait encore maintenant. Tae ne lui parlait jamais de ses histoires amoureuses, alors il avait espéré, cru même, qu'il y avait ne serait-ce qu'une once d'amour pour lui dans le cœur de son meilleur ami. Une larme tomba soudainement sur sa peinture quasi intacte depuis plusieurs heures. Il reposa doucement le pinceau sur sa table avant de se lever pour regarder par les grandes vitres de son atelier. Dans ce genre de moment, il se demandait ce que ça faisait de ne pas avoir de cœur. Ce serait tellement simple s'il pouvait ne pas comprendre ce qu'était l'amour. Il avait fait énormément d'efforts pour en arriver là. Fut un temps où il lui était impossible de distinguer les humeurs, autant les siennes que celles des autres, ou encore de savoir pourquoi il pleurait et riait. C'était l'une des raisons de pourquoi les enfants se moquaient de lui, mais maintenant, il aurait bien aimé être inconnu à l'amour et à la joie d'être près de Taehyung. Une fois qu'on mettait un nom sur quelque chose, on l'apprivoisait et il était dur de s'en séparer.

Il n'avait pas le temps de pleurer, Jungkook devait sûrement déjà l'attendre pour leur session. En parlant de lui, le plus jeune était comme une machine, si seulement il n'avait pas cet ego surdimensionné qui ne rentrait même pas dans son corps et débordait dès qu'il ouvrait sa bouche. Il était sûr que lui n'avait pas de problèmes de coeur, il se moquerait même de ceux qui pleurent pour des choses aussi futiles. Jimin ne savait pas pourquoi il avait accepté si facilement de l'aider. Il était encore sonné et avait pensé que c'était la seule manière de le rembourser. Il se sentait bien bête à présent. Au moins, il avait la qualité de faire oublier au plus vieux son cœur brisé pour quelques instants. Il était tellement insupportable qu'il lui était difficile de penser à autre chose. Une fois calmé, il sortit de son atelier,fermant la porte derrière lui. Il y allait tous les jours depuis sa sortie avec Taehyung mais pourtant rien n'avait bougé. Il était incapable de finir ou continuer ses peintures. Il ne faisait que peindre son meilleur ami d'une manière obsessionnelle dont il avait honte. Son visage était partout, et même si ce n'était pas rare qu'il le peigne, le plus jeune étant beau et ressemblant à une œuvre d'art, il n'avait jamais eu cette incapacité à peindre autre chose que lui. Pourquoi la tristesse prenait plus de place que tous ses bons souvenirs ?

De l'autre côté de la ville, Jungkook sortait en vitesse de chez lui. Aujourd'hui, c'était son premier cours avec Jimin. Il avait pris son carnet et ses crayons, prêt à boire chacune de ses paroles. Quelqu'un qui connaissait Chimchim était obligatoirement doué lui-même, c'était seulement de la logique. La grandeur ne fréquente que la grandeur. Seulement Jimin était trop petit pour être appelé grandeur, ou alors Jungkook n'arrivait pas à avouer que cette sirène vicieuse était quelqu'un qu'on pouvait qualifier de grand dans le monde de l'art. Il avait cru comprendre qu'il était un amateur de l'art, voire un collectionneur vu son tableau signé par Chimchim. Mais il ne savait pas s'il peignait lui-même. C'était assez étrange d'attendre de quelqu'un de si mystérieux que Jimin une aide miraculeuse qui viendrait le remettre sur le piédestal qui lui était réservé. Appuyé contre un arbre du parc où le plus vieux l'avait invité, il fumait de manière absente sa cigarette qui se consumait lentement sans qu'il ne le remarque. C'est seulement en relevant son regard qu'il vit celui de Jimin qui le fixait en se bouchant le nez, l'air sévère. Il se dépêcha de s'approcher de son vis-à-vis qui fit un pas en arrière sous le regard étonné de Jungkook.

    -Tu fumes ?

Encore plus étonné devant la voix dégoûtée avec une pointe d'une autre émotion qu'il n'arrivait pas à déchiffrer (pas étonnant de sa part), Jungkook haussa ses sourcils.

    - Je n'ai pas le droit ? C'est une zone autorisée aux-

    - Ne fume pas avant nos séances.

Un léger rire sans once d'amusement échappa à Jungkook. Il supportait déjà très difficilement de laisser un mec aussi chelou que Jimin être son mentor, et en plus il devait le laisser commander sa vie ? Combien de gens voulaient lui dicter sa vie ?

    - C'est pas comme si je fumais devant toi ou que t'étais ma mère. Je fais ce que je veux.

    - Fais ce que tu veux, mais ne viens pas me voir avec cette puanteur.

Fait choquant, il n'avait jamais vu une émotion aussi forte que la colère qui tordait le visage de Jimin sur son visage habituellement si vide. Non, plutôt, il n'avait vu ce genre d'émotions que quand il avait eu peur de la grenouille. Mais cela ne suffit pas à décontenancer Jungkook qui était déjà sur les nerfs à force d'être repris constamment.

    - Quoi d'autre te gêne chez moi, hein ? En premier, c'était ma peinture qui était trop ennuyeuse, puis ma personne, puis mes études et maintenant je pue ? Je t'ai demandé de changer ma technique, pas ma personne, donc tais toi. Si j'avais la même attitude envers toi, on y passerait la journée. Crois-moi, j'ai bien plus de choses qui m'irritent chez toi que dans l'autre sens.

Un moment silencieux passa avant que la colère se vide du visage de Jimin, et c'était bien pire car maintenant il avait l'impression de faire face à une ombre.  Il n'avait aucune possibilité de deviner quel genre de sarcasme allait sortir des lèvres pulpeuses de son vis-à-vis. Il était tellement imprévisible, et cette description montra ses faits puisque Jimin se contenta de tourner les talons et de marcher vers le parking sans rien dire. Jungkook jeta sa cigarette par terre, l'écrasant avant de rattraper le plus petit, lui prenant le bras pour l'obliger à s'arrêter. Cependant, Jimin n'était pas du même avis. Il repoussa violemment son bras, le regardant comme s'il était la personne la plus dégoûtante sur Terre.

    - Ne me touche pas ! Je vais te payer tes vêtements que tu as sali la semaine dernière. Envoie moi la somme que tu veux par message et supprime mon contact par la suite. C'est fini.

Jungkook ouvrit grand les yeux alors que son cœur commençait à battre un peu trop fort. Qu'est-ce qui se passait ? Il avait littéralement répondu avec le même ton que Jimin utilisait avec lui et soudainement il était le grand vilain ?

    - Non ! Tu as promis de m'aider avec-

    - Tu voulais comprendre comment je fonctionne ? Tu te foutais de moi ? Je ne suis pas une bête de foire ou un spécimen à étudier pour enrichir ta science. Je crois que nous nous sommes mal compris sur ça.

    - Mais non-

    - Envoie la somme par message. Au revoir, Jeon Jungkook.

Jungkook le regarda partir sans rien pouvoir faire de plus. Qu'est-ce qui venait de se passer, au juste ?