Chapitre 1

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Cela fait 3 ans. 3 ans que je n'ai pas tenu un skate dans les mains. Ça me fait bizarre quand même, sentir de nouveau le bois de la board et le froid du métal et des roues, j'en ai plus l'habitude. Mon skate était quand même très stylé, et bien collé à mon style : coloré et sans queue ni tête. On pouvait y trouver des autocollants têtes de mort à côté de coeurs roses dessinés ou de tags des logos de mes groupes de musique préférés. Mais ce que je préférais et ce que je préfère toujours, c'est de voir les signatures de tous mes amis skateurs.

À l'époque, j'avais une petite réputation, pas dans de grandes compétitions diffusées, mais plutôt à une course illégale connue sous le nom de "S". Comparé à certains qui avaient des surnoms stylés, moi on m'appelait "la femme", "la meuf là bas", enfin bon bref. Enfin même si... Si on devait m'appeler par un prénom, on m'appelait "Eden", sûrement en référence à mon vrai prénom et puis aussi peut-être à sa signification en hébreu pour quelques hommes assez peu fréquentables, mais passons. Quelques uns de mes potes m'appelaient aussi "la surexcité" ou "la terreur", notamment pour mon style de ride assez vif.

Mais quand je repense à tout ça, je me dis que maintenant, il me serait sûrement compliqué de reprendre ce style là. Même si ces trois années n'ont pas été les meilleures de ma vie, j'ai beaucoup pris en maturité. Passant de 22 ans à 25 ans, je suis désormais beaucoup plus calme, et je ne sais pas si je devrais m'arrêter ou continuer mon chemin jusqu'à cette montagne.

Il y a quelque minutes je m'étais enfin décidée à retourner à S, mais maintenant que ma planche était sous mes pieds, je me rendais compte d'à quel point j'avais régressé et surtout... D'à quel point j'avais peur. La peur irrationnelle de tomber et de me faire mal, qui ne m'envahissait aucunement avant.

Et puis une autre angoisse montait lentement en moi également. Il y a trois ans, je les ai quitté sans jamais leur donner de raison, répondre à leur message ou ne serait-ce que les rassurer -pas que j'en étais dans la possibilité, mais ce n'est quand même pas cool-. Ça se trouve, en me voyant débarquer trois années plus tard, une dégaine et un caractère totalement différents en plus de mon niveau au skate qui avait baissé exponentiellement, ils me rejeterai, et je les comprendrai.

Je soufflais finalement, posant mon regard sur l'écran de mon téléphone ; 00h23. Il fallait que j'y aille maintenant, je m'étais déjà dégonflée hier et avant-hier, aujourd'hui il faut que j'y aille !

Je redoublais alors ma vitesse, me faisant échapper quelques injures à cause de la panique me serrant les entrailles et titillant mon coeur pour le faire battre à la chamade. J'avais peur du skate, c'était sur. Cela faisait pourtant 2 semaines que j'avais repris, mais je ne m'étais toujours pas habituée de nouveau. Ces jours en hôpital m'auront donc pris le bonheur de rider...

Et voilà, me voilà en compagnie de quelques skateurs alors que je commençais à monter la montagne. Heureusement que j'avais pris le soin de me couvrir d'un sweat à capuche et de ne pas vraiment montrer mon visage, je n'osais même pas imaginer comment ils m'auraient devisagé... C'était déjà compliqué de m'être fait respecter avant, mais maintenant que mon look était encore plus remarquable... J'imagine même pas la galère.

Puis j'arrive finalement devant les portes de la course illégale. Les gardes me dévisagent, comprenant quand ils me détaillaient que j'étais une femme. Je couvre un peu plus mon visage de la capuche et leur montre rapidement mon badge, puis ils me laissent passer et, d'un geste très peu assuré, je reprends mon skate en mains et avance.

En entrant, un brouhaha me parvint aux oreilles, mais j'arrivai à discerner quelques discussions. Bizarrement, ils n'avaient tous qu'un nom à la bouche, me faisant frissonner. Avais-je été si peu discrète que ça...?

« Regarde là-bas !
- Quelle honte sérieux...
- Quelle audace surtout ! Ce mec va se faire démarrer par les anciens !»

Cette discussion était tourné vers moi. Comment je le savais ? Parce que les deux hommes ne se gênaient pas pour me dévisager, je m'étais alors tourné vers eux et ils m'avaient adressé un regard haineux.

Je ne comprenais pas la situation. Enfin jusqu'au moment où une voix s'éleva, demandant le silence.

«Je sais qu'aujourd'hui est un jour compliqué, il l'est pour nous tous ! Mais nous avons quand même des courses à faire, il ne faudrait pas contaminer les plus jeunes avec notre déprime tout de même ! Eden restera dans nos cœurs, même si...»

Sa phrase fut coupée par le bruit distinct de pas courant et d'un corps se mangeant le sol. Bien évidemment, qui cela pouvait être d'autre que moi ? En fait, en entendant mon pseudonyme, cela avait déclenché une vraie angoisse en moi. Cela faisait 3 ans jour pour jour que je les avait quitté, et ils avaient retenu la date comparé à moi. Quand j'ai entendu les mots de l'homme, qui par ailleurs n'était autre que mon ancien meilleur ami Joe, j'ai voulu fuir. Mais avec tous ces gens écoutant le gorille parler, mes pas avaient raisonnés dans la montagne. Et quand mes jambes cédèrent, apparemment pas encore aptes à courir sur une trop longue distance, le bruit de ma chute avait fait d'autant plus de bruit, un silence assourdissant résonnant alors que tous se tournèrent vers moi. Les yeux furent d'abord rivés sur ma silhouette, puis très vite ils dérivèrent sur ma planche roulant doucement car je l'avais lâchée à cause de la chute.

Un homme s'approcha alors que je me relevais difficilement. Je n'arrivais pas à voir de qui il s'agissait, ma vie s'étant brouillée. Mais quoi qu'il en soit, il prit mon skate d'une douceur inédite. Il le regarda sous toutes ses coutures, se paralysant en y découvrant le dos. Je fis un effort pour me concentrer sur cet homme et ma vue devint plus clair : cet homme était mon deuxième ancien meilleur ami de l'époque, Kaoru Sakurayashiki ou plus connu sous le nom de Cherry Blossom.

J'avais oublié un certain détail sur mon skate, sûrement ce qui avait fait commenter les deux hommes de tout à l'heure. Les roues avaient été faites d'une telle manière que, la friction qu'elles exerçaient sur le sol leur donnaient un son tout particulier, comparable à une mélodie. Et puis, il y avait des LEDs dessus aussi, les faisant les remarquer beaucoup plus que les autres.

Celui aux cheveux roses, s'étant sûrement paralysé en voyant sa signature au dos de ma board, regarda Joe, puis me regarda moi. Moi qui était toujours au sol, le regardant avec appréhension et angoisse.

«Hedern ?»

L'utilisation de mon vrai prénom me fit sursauter et au quart de tour je me remis sur mes pieds et m'approcha de lui pour lui prendre des mains mon skate. D'une manière très peu assurée, je le mis sur le sol et commença à skater à toute allure, me provoquant de nombreux pics de stress, fuyant cet endroit dans lequel je voyais auparavant un refuge.

Dans ma course, un papier s'était échappé de ma poche sans que je ne le voit.

Sk8 the infinity - Fanfiction Où les histoires vivent. Découvrez maintenant