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L'eau est sûrement un peu froide, s'étend jusqu'à un infini qui doit rester secret. Les vagues sont douces ce soir et ma cigarette qui se consume entre mes doigts se mélange à l'odeur salée de la mer. C'est enivrant et étrange à la fois. Ça apaise les maux, ça écrase les douleurs sous le sable.

Assis sur le rebord du ponton de la maison de vacances de mes parents, je me demande si quelqu'un quelque part allume une cigarette à chaque contemplation nocturne. C'est comme hommage à cette immensité bleuté, comme lancer un multitude de sourires dans ces sublimes abysses.

« Harry ? Tu viens dîner avec nous ce soir ? »

Je me retourne vers ma sœur et hoche la tête. Elle me sourit comme réponse et je crois qu'elle est ma personne préférée sur terre. Nous avons deux ans d'écart et un millier d'histoire à raconter. J'écrase ma cigarette et lâche dans le cendrier. Je regarde une dernière fois la mer comme un au revoir et rejoins l'intérieur. Ma famille mange déjà et mon père me fait signe de m'asseoir à ses côtés. Le dîner se passe dans les rires mais je m'y noie comme si je pouvais moi aussi, rire. J'ai cette mélancolie en moi et ce noeud dans la gorge qui broie tout sur son passage.

« T'as vu qu'on avait de nouveau voisins H ? »

Je me tourne vers ma sœur qui boit son verre de vin.

« Non, du tout. Vous les avez rencontré ?
— Tu connais maman, elle leurs a apporté un gâteau de bienvenu. »

Je souris faiblement.
Et parfois je m'en veux.
De cette douleur.
De cette électricité qui brûle mes os.
Je ne voulais assisté à ça et pourtant j'y étais. Seul.
J'avais tenté de garder mon sang froid alors que mon cœur lui, était au bord de l'implosion.

Un coup de feu.
Jusqu'à côté de ma tête.
Je me suis dis : c'est la fin.
Tout va s'éteindre et plus aucune lumière ne s'allumera.

Le vendeur a entendu et a accouru, et l'inconnu qui voulait me tirer dessus s'est barré.

Je ne sais plus vraiment pourquoi moi, et il m'arrive quelques fois de me dire qu'avec la suite de mon vécu que j'aurais aimé qu'il ne se rate pas. Parce que le manque me gratte et picote la peau. Ça me dévore, me tords le ventre. Parce que je ne comprends pas pourquoi elle a fait ça.

Pourquoi un soir, elle mît fin à ses jours.
C'était mon amie.
Ma meilleure amie.
Nous étions fusionnel.
Comme des âmes sœurs peuvent l'être.

C'était ma moitié.
Une fille avec qui j'ai grandis et avec qui j'ai eu les aventures les plus folles et les plus douces.
Violette et ses tâches de rousseurs.
Violette et ses cheveux couleur soleil.
Violette et ses sourires qui fait s'illuminer un univers entier.
Violette et son amour pour l'art.

« Harry ? T'es avec nous ? »

Et ça me sort de mon état de transe ou je vis dans ma propre tête suivi de ce vacarme qui craquelle mes pensées.

« Mmh, désolé. Je vais monter dans ma chambre, bonne fin d'appétit à tousser , à demain. »

Je ne me retourne pas, parce que je connais leurs regards.

Parce qu'il transpire l'inquiétude et la compassion.

Ce soir sera le soir ou j'aurais enfin le courage d'écouter son vinyle. D'Elliott smith.
Sa préférée était between the bars et je me revois l'écouter avec elle sous les astres.
Ou dans notre cabane construite par son grand-père. On avait des bières et des guirlandes qui émettait une lumière semblable à un coucher de soleil.
Depuis je ne peux plus voir ni même parler de ce lieu qu'on s'était créer à nos douze ans. La porte de ma chambre se ferme et je fixe ma bibliothèque de vinyles, comme si ça allait me donner du courage.

J'ouvre la fenêtre, me grille une cigarette et la fumée se mêle à mes larmes. Je ne vais pas y arriver, c'est trop dur. Trop brute. Ça risque d'éveiller tellement de souvenirs que je ne peux plus vivre ni même toucher. Alors je regarde le ciel presque noir et je laisse mon esprit divaguer sur toutes choses qui remplisse mes nuits de cauchemars et de soirée où mes yeux ne savent pas se fermer et où ma tête explose dans tout les sens.

J'entends quelqu'un toquer à ma porte, je ne réagis pas. Je l'entends s'ouvrir et je sais déjà que c'est ma mère. Je sais déjà qu'elle va s'asseoir en tailleur au milieu de mon lit.

« Je te l'ai déjà dis mon ange, mais si tu as besoin tu sais qu'on est et que je suis là. »

Je tire une taffe sur ma cigarette et expire la fumée avant de la caler contre le cendrier poser sur le rebord. J'inspire profondément et expire lentement avant de la rejoindre sur mon lit.

« J'y arrive pas, je suis désolé maman. »

Elle attrape mes mains et me lance un regard bienveillant et doux avant de presque me murmurer.

« Je t'attendrais, tu parlera quand tu te sentiras prêt. Quand tu en seras capable, mais je suis persuadée que tu y parviendras. Ça fait juste un an, et même si ça en faisait dix, ça restera toujours un peu compliqué. Mais on est là et je te lâche pas, jamais. »

Nos regards ne se quitte pas.
Et ce qui sort en premier n'est pas un mot mais un éclat de sanglots. Elle se rapproche de moi et me serre fort contre elle, caressant mes boucles avec douceur. Je me laisse aller contre elle, m'accrochant à son pull comme si j'allais m'écrouler.

« Tu es fort Harry, je sais que tu ne le vois pas encore mais tu l'es. »

Je renifle et me redresse un peu pour la regarder nouveau.

« J'ai l'impression de m'affaiblir, de crever de l'intérieur.
— Tu as énormément souffert, et Violette était est et sera toujours ta partenaire, ta meilleure amie. Elle sera toujours là dans le creux de ta poitrine et dans les souvenirs que vous aviez. Toi qui écris, tu as déjà songé à lui écrire ?
— Elle était mon éternité et oui j'ai essayer mais la douleur était trop forte et je n'ai même pas réussis à écrire un mot.
— Ça viendra, je n'ai aucun doute là-dessus. »

Elle me sourit et je souris presque, elle essuie mes joues et dépose un baiser sur mon front.

« Repose toi, tu en as besoin. Demain on invite les voisins à manger sur la terrasse, si tu te sens de te joindre tu peux. En attendant dors bien, mon fils, dors. »

J'hoche la tête et elle me tend un paquet de mouchoirs et je m'endors avec la pensée chanceuse d'avoir une maman comme la mienne.
D'avoir la chance d'être entouré d'une famille au grand cœur.

D'avoir la chance de voir la mer de ma fenêtre.

Une chance qui ne s'oublie pas.
Qui ne se gâche pas.
Jamais.

La mer et le soleil. Où les histoires vivent. Découvrez maintenant