Chapitre 1

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Quoique la vie me fasse, elle me met toujours a terre, je n'ai pas une seconde de répit. A l'age de 6 ans, elle se dit tu vas vivre avec ton père, loin de ta mère, vu qu'ils ne sont plus ensemble autant te faire recommencer une nouvelle histoire loin de tes amis et du reste de ta famille. A 15 ans je dois déménager parce que mon père devient coach dans une fac, mes nouveaux amis, adios ! Encore ! Entre temps rien ne va, la vie, ouais toujours elle, a du me donner qu'une moitié de cerveau, en cours je suis une catastrophe, si j'atteins la moyenne c'est un exploit. On me considère comme une moins que rien mais c'est pas grave. Pour les amours, bien j'ai embrassé un garçon en primaire, Tommy, mais il sentait la sardine, et au collège il y a eu Nemo, je dois avoir un truc en plus pour attirer les poissons. En bref, ma vie est catastrophique, mais il y a au moins une chose pour laquelle je ne suis pas une ratée, la photographie. Je ne me rappelle pas vraiment quand j'ai commencé à m'y intéresser mais je pense que c'était grâce a ma mère. Mon père et elle se sont connu a l'université, elle était la photographe pour le journal de l'étudiant,et lui loin ben il faisait parti de l'équipe de basket, alors les articles étaient très souvent centré sur l'équipe même. C'est comme ça qu'ils ont fini ensemble puis qu'ils ont divorcé, parce que je cite : « ton père et moi on s'aime plus comme avant ma chérie tu comprends, et maman a un travail qui lui prend tout son temps c'est pour quoi tu dois partir avec lui » Ouais un choix incroyable il faut le dire, j'ai un père coach, on déménage pour lui, plusieurs fois, mais le dernier déménagement se fait dans une bonne période, je vais à l'université où il travaille désormais, c'est chouette. Alors non, je ne vais pas avoir des cours de photographie, mais de littérature, c'est parti pour travailler sur du Shakespeare, Jane Austen et j'en passe. Si seulement j'aurais pu être ailleurs, vivre ma vie avec mes amis, aller dans la même fac qu'eux, mais non mon destin semble difficile à comprendre.

Je suis sûre que ma vie sera encore désastreuse cette année, alors pour m'y préparer à fond j'ai fait une liste :

- petit un : aucun garçon ( surtout ayant un lien avec du poisson)

- Pas de soirée ( ouais à qui je mens là, j'ai fait que ça au lycée)

- Un travail exemplaire ( et ne pas faire comme les années précédentes mais je doute fort tout de même)

- Éviter tous les machins de superstition ( genre passer sous une échelle, le vendredi 13, etc.)

- Garder son calme peu importe la situation ( bon ça faudrait que je le travaille un peu plus aussi)

- mais surtout ne jamais lâcher mon appareil photo, alors ça c'est non négociable.

Ouais, je suis sûre qu'avec cette liste je pourrais avoir un semblant de vie stable, si ce truc ne marche pas, il me reste juste à prier ma bonne étoile, si tentait qu'elle a des piles neuves. J'imagine bien que mon ange gardien doit être en vacances depuis bien longtemps, ou au chômage peut-être, je ne sais même pas si là haut ils vont à la retraite.

Enfin bon voila, j'ai la catastrophe dans la peau. Un lien avec mon prénom peut-être? Mallory, « malheureux », on est au top. Depuis le choix du prénom, en fait, je suis destinée au malheur. Bonjour, la positivité !

Après, la petite Mallory a grandi et va à l'université, je devrais finalement commencer à ne plus me remettre en question.

- Malouuuu, à table !! Ouais ben pour le côté grande fille, ce n'est pas encore gagné quand ton père t'appelle par ton surnom d'enfant

- A vrai dire j'ai pas trop faim, je lui crie de ma chambre.

- Mais j'ai fait des frites alors bouge tes fesses !!

Ouais bon, qui refuse des frites même, je descend vêtu d'un short de basket et de ma brassière de sport, vu que de base j'allais courir , mais au pire je le ferais après pour retirer la quantité de calories qu'il veut me faire avaler.

- Papa pour un coach, tu ne mange pas très sainement

- Oui mais toi un peu trop , mange il te faut des vitamines, puis après tu pourras prendre un yaourt au chocolat, il me fait un clin d'œil et rigole. Pour lui je reste l'enfant avec des nattes et des nœuds papillons dans les cheveux, c'est top cette image.

- Une pomme suffira je n'ai plus 8 ans je te rappelle.

Mon père soupire, mais il ne cherche pas à argumenter davantage. Il sait bien que quand j'ai décidé quelque chose, il n'y a pas grand-chose qui peut me faire changer d'avis. Ça, c'est peut-être le seul point commun que j'ai avec lui : la ténacité, ou l'entêtement, selon le point de vue.

Je m'assois à table, grignote quelques frites, mais je n'ai vraiment pas faim. Mon esprit est ailleurs, déjà perdu dans les pensées de ce qui m'attend cette année. L'université. Nouveau départ ou simple répétition des mêmes erreurs ? Franchement, je ne sais pas. Et puis est ce qu'on peut parler d'erreur ici ou de malchance, non parce que je me connais.

- « T'as besoin de quelque chose pour demain ? » demande mon père, brisant le silence.

Je secoue la tête. C'est peut-être la seule chose qui me plaît dans cette situation : il ne pose pas trop de questions. À vrai dire, il ne sait pas trop comment gérer une fille de dix-huit ans, surtout une qui n'est pas passionnée par le sport.

- « Non, c'est bon. Tout est prêt, » dis-je simplement.

Il hoche la tête, visiblement satisfait de ma réponse. On finit le repas en silence, chacun plongé dans ses pensées. Après avoir rangé mon assiette, je retourne dans ma chambre. J'attrape mon appareil photo posé sur mon bureau. C'est mon refuge, mon échappatoire. Dès que je l'ai entre les mains, le monde extérieur s'efface.

Je l'examine un moment, puis je décide de sortir. Le campus est désert à cette heure-là, les étudiants ne sont pas encore tous arrivés. C'est l'occasion parfaite pour capturer des clichés sans être dérangée.

La lumière du soir est douce, teintée d'orange. Les ombres s'allongent, dessinant des motifs intéressants sur les bâtiments. Je me perds dans les détails, les formes, les contrastes. C'est ça qui me plaît dans la photographie : la capacité de capturer un moment précis, de figer le temps. Peut-être parce que tout le reste dans ma vie semble si incertain, si instable. Ça peut paraître bizarre mais j'aime beaucoup cette opposition. Prendre des photos ce n'est pas juste capturer une image, c'est plutôt enfermer pour l'éternité un ressenti.

Après une bonne heure à me promener et à photographier, je rentre chez moi. Mon père est déjà dans son fauteuil, une bière à la main, les yeux rivés sur un match de basket à la télévision. Classique. Oui il peut regarder d'autres sports mais ce sera toujours après le basket.

Je monte directement dans ma chambre, retire ma brassière de sport et enfile un vieux t-shirt confortable. Je m'affale sur mon lit, en regardant le plafond. L'inquiétude commence à me ronger, comme à chaque veille de rentrée. Mais cette fois encore plus, je vis cette expérience seule, loin de mes amis.

Je me tourne sur le côté et attrape mon carnet, celui où je note tout ce qui me passe par la tête. C'est un peu mon journal, mais sans l'avouer. Je le feuillette, tombant sur des pages remplies de croquis, de listes, de pensées décousues. J'y ajoute quelques lignes sur ma journée, sans grande inspiration. J'ai l'impression qu'elles se ressemblent toutes depuis que je suis ici, se lever, aller courir parce que oui mon père cherche a ce que je devienne comme lui, prendre des photos puis rentrer. Je dois sans cesse me plier à ses exigences, il ne veut pas que je fasse de la photographie mon métier. « Ca ne va rien t'apporter, que des ennuis » « trouve toi un vrai métier qui auras de l'avenir ». Je pense qu'au fond de lui il a peur, peur que je devienne comme ma mère à ne voir rien d'autre et oublier ma famille.

Puis je me mets à penser à demain. La première journée de cours. Rien que d'y penser, je ressens un nœud dans mon estomac. La littérature, c'est vraiment pas mon truc, mais je n'ai pas eu le choix. Peut-être que si je réussis à trouver une échappatoire, ou une opportunité d'exposer mes clichés... Ça serait le seul moyen de supporter tout ça.

Je soupire et referme mon carnet. Il est encore tôt, mais je me glisse sous les couvertures. Demain, c'est le grand jour. La première étape d'une nouvelle galère, sûrement. Mais au fond de moi, il y a une minuscule lueur d'espoir, celle qui me murmure que peut-être, juste peut-être, cette fois-ci, les choses pourraient être différentes. Je m'endors sur cette pensée, espérant sincèrement ne pas être déçue.

coeur en crash testOù les histoires vivent. Découvrez maintenant